Intervention de Jean-François Le Grand

Réunion du 6 décembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Compte spécial : contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route

Photo de Jean-François Le GrandJean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Je concentrerai mon propos sur le transport aérien et sur le budget annexe « Contrôle et exploitations aériens ».

Yvon Collin s'étant excellemment chargé de décrire le format financier et les évolutions que vient de subir la taxe d'aéroport, je me contenterai de vous livrer quelques réflexions.

Première observation : les quelque 66 millions d'euros qui sont attendus de l'augmentation de la taxe payée par les passagers seront affectés aux petits aéroports.

La question qui se pose dès lors est de savoir si le montant de l'affectation sera lié au niveau d'activité des aéroports.

Si tel est le cas, je souhaiterais qu'un critère prenant en compte la valeur ajoutée en termes d'aménagement du territoire soit appliqué à l'activité des petits aéroports. En effet, les petits aéroports doivent être considérés non pas seulement en fonction de leur niveau d'activité, mais aussi en fonction de leur aptitude en matière d'aménagement du territoire.

Je maintiendrai ou je retirerai l'amendement que j'ai déposé en fonction de la réponse que le Gouvernement m'apportera sur ce point

Ma deuxième observation est plus fondamentale, car elle concerne en quelque sorte la pérennité de la République. Rapportant ces budgets depuis de nombreuses années, j'ai demandé à des gouvernements successifs s'il était légitime de faire supporter au contribuable la charge de missions régaliennes. Les réponses ont régulièrement été les mêmes, et je ne doute pas que vous me répondrez de la même manière, mais, convenez avec moi, monsieur le secrétaire d'État, que l'État devra un jour assumer ses responsabilités et cesser de faire peser le coût de la sûreté et de la sécurité sur le seul passager.

Je m'interroge enfin, troisième observation, sur la pertinence et la finalité des mesures que nous prenons en matière de sécurité et de sûreté. Depuis le 11 septembre 2001, c'est à qui se fera le plus sécuritaire, et nous assistons à une véritable compétition entre aéroports, alors qu'un grand nombre des mesures qui ont été prises non seulement sont coûteuses, mais restent relativement peu efficaces.

Le Parlement européen, dans sa résolution du 5 septembre dernier, s'interroge sur le maintien des mesures concernant les gels et les liquides transportés dans les avions.

Soyons lucides, madame, monsieur les secrétaires d'État : nous ne pourrons jamais nous protéger totalement du terrorisme. Il est donc légitime, et raisonnable, de se poser la question du rapport entre le coût de l'investissement et la protection offerte à nos concitoyens, sans pour autant baisser la garde devant la menace terroriste.

En conclusion, permettez-moi de vous livrer trois brèves observations, pour rester dans le temps qui m'est imparti.

La première porte sur la loi relative aux aéroports. L'État va entamer cette année des négociations avec plusieurs grands aéroports régionaux pour définir leur programmation annuelle de l'évolution des redevances. Sur l'initiative du Sénat, la loi avait instauré une commission consultative aéroportuaire dont le rôle était de réguler de manière équilibrée et raisonnable les redevances aéroportuaires. Consultée pour Aéroports de Paris et les grandes compagnies qui se posaient à Roissy ou à Orly, la commission consultative a émis des avis qui n'ont pas été suivis. Aura-t-elle plus de chances d'être écoutée lorsqu'elle se prononcera sur les aéroports régionaux ?

Je maintiens que cette commission consultative est nécessaire, car elle est le lieu normal de règlement des conflits entre les usagers et les clients, entre les compagnies et les aéroports.

Ma deuxième observation, plus technique, concerne les personnels des bases aériennes qui viennent d'être transférées à des collectivités territoriales. J'aimerais que vous puissiez rassurer ces personnels, car ils se posent des questions sur leur avenir.

Enfin, j'évoquerai la situation d'EADS et d'Airbus : comme chacun le sait, l'écart de change entre le dollar et l'euro affecte lourdement et durablement la construction aéronautique européenne. Dès lors, deux perspectives seulement s'ouvrent à nous : soit nous arrivons à corriger cette parité, mais j'ignore comment ce serait possible, soit EADS et Airbus seront contraints d'aller produire hors de la zone euro, ce qui pose un problème majeur.

De fait, les difficultés commençaient pour nous à 1, 40 euro pour un dollar ; le taux de change est aujourd'hui de presque 1, 50 euro pour un dollar : comme le disait récemment le président d'Airbus, Tom Enders, à ce stade, nous avons dépassé le seuil de la douleur. Mes chers collègues, je voulais attirer votre attention sur ce problème, car, ensuite, il sera trop tard pour pleurer !

En revanche, la situation d'EADS appelle deux observations positives.

Tout d'abord, une nouvelle gouvernance a été instaurée, ce qui peut être mis à l'actif du Sénat. En effet, dans un rapport remis en juin dernier, Roland Ries et moi-même suggérions une telle réforme. Même si le lien de cause à effet peut être discuté, cette nouvelle gouvernance que nous appelions de nos voeux porte aujourd'hui ses fruits, car l'entreprise est devenue plus agile, elle est en meilleure adéquation avec son environnement et sa situation s'est améliorée si on la compare avec celle de groupes de taille normale. D'ailleurs, l'A 350 enregistre aujourd'hui des commandes.

Ensuite, l'A 380 suscite beaucoup d'intérêt et d'estime, vous le savez comme moi, monsieur le secrétaire d'État, puisque nous avons pu le constater tous deux lors d'un déplacement à Montréal. Je le rappelle, cet avion est aujourd'hui l'appareil qui, au monde, consomme le moins de kérosène - seulement 2, 3 litres pour 100 kilomètres par passager transporté -, ce qui correspond tout à fait à vos souhaits, madame la secrétaire d'État.

Je vous précise enfin, après mes collègues rapporteurs pour avis, que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

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