Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 13 octobre 2009 à 21h45
Article 61-1 de la constitution — Adoption d'un projet de loi organique

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je sais bien qu’il n’est pas question ici de saisine, puisque celle-ci émane du justiciable, du tribunal de première instance, du Conseil d’État ou de la Cour de cassation. Mais pourquoi ne pas ouvrir cette possibilité ? Quel inconvénient y aurait-il ? En quoi cela poserait-il un problème juridique, monsieur le rapporteur ? J’espère, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, que vous accueillerez favorablement notre amendement.

Le sixième point porte sur la conséquence qu’il convient de tirer d’une décision du Conseil constitutionnel.

En l’état, le projet de loi organique n’a pas prévu d’introduire dans le code de procédure pénale un mécanisme spécifique de révision visant à tirer les conséquences de la décision d’abrogation par le Conseil constitutionnel du texte ayant donné lieu à sa saisine, lorsque les voies de recours ordinaires et le pourvoi en cassation ne peuvent plus être exercés.

Une telle disposition paraît d’autant plus essentielle que les hypothèses visées concerneront, notamment au pénal, des questions touchant aux libertés individuelles, plus particulièrement lorsqu’une détention est en jeu.

L’absence de cette mesure incitera les parties à soulever prioritairement la question de conventionalité, ce qui pourrait avoir pour conséquence de vider de leur intérêt les dispositions de l’article 61- 1, d’autant qu’un dispositif de réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme est prévu aux articles 626-1 à 626-7 du code de procédure pénale.

Afin de combler ce vide, monsieur le secrétaire d’État, nous proposons que la procédure applicable au réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme s’applique également lorsque le juge a saisi le Conseil constitutionnel sans qu’il y ait sursis à statuer et a rendu une décision sur le fondement du texte abrogé par le Conseil constitutionnel. Il ne serait pas acceptable qu’une décision du Conseil constitutionnel n’ait pas de conséquences directes.

Septième et dernier point : notre vote sur ce projet de loi organique ne nous empêche pas d’avoir des choses à dire sur le Conseil constitutionnel.

En premier lieu, se pose la question de la compatibilité de membre du Conseil constitutionnel avec l’exercice de certaines professions. Pour aller plus loin que M. le rapporteur, nous proposerons que les membres du Conseil constitutionnel ne puissent exercer aucune profession : leur qualité est suffisante, leurs moyens raisonnables, et ce serait une garantie totale d’indépendance.

En deuxième lieu, il faudra veiller à ce que toutes les conditions du procès équitable soient remplies par le Conseil constitutionnel, conformément à ce que les instances européennes ne cessent d’affirmer.

Enfin, en troisième lieu, nous réaffirmons ici notre désaccord complet sur le mode de nomination des membres du Conseil constitutionnel. Si nous nous orientons vers une cour constitutionnelle, alors, monsieur le secrétaire d’État – je pense que vous en serez d’accord, car vous avez souvent défendu cette position –, nous ne pouvons nous satisfaire du mode de désignation de ceux-ci. On a cité tout à l’heure les démocraties où sont requises des majorités qualifiées au sein des parlements pour désigner les membres des cours constitutionnelles et des cours suprêmes.

Mes chers collègues, nous voterons ce texte, parce que nous ne voulons pas nous opposer à l’ouverture d’un droit nouveau à nos concitoyens, mais des questions importantes restent posées.

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