L'actuelle rédaction du projet de loi organique ne permet pas au juge de relever d'office le moyen tiré de ce qu'une disposition législative méconnaîtrait les droits et libertés garantis par la Constitution.
Il nous paraît étonnant qu'une telle violation de la hiérarchie des normes, a fortiori dans un domaine aussi éminent que celui de la protection des droits fondamentaux et de l'État de droit, ne puisse constituer un moyen d'ordre public, alors que le moyen tiré de la violation de la loi s'impose d'office au juge comme moyen de légalité interne.
Certes, le Conseil d'État ne se saisit pas d'office des moyens tirés de l'inconventionnalité, mais le renforcement de l'effectivité des principes de l'État de droit tiré de l'article 61-1 de la Constitution rend nécessaire, selon nous, d’ouvrir cette possibilité nouvelle aux juges ordinaires.
De plus, l'existence d'un filtrage opéré par le Conseil d'État ou la Cour de cassation garantit que les contentieux transmis seront conformes aux critères établis par les autres dispositions du projet de loi organique.
Enfin, le maintien du dispositif actuel risquerait de ne permettre qu'aux seuls justiciables ayant les moyens de s'attacher les services d'un conseil de soulever un tel moyen.
Il paraît difficile d’envisager que le juge ne puisse pas d’office relever ce moyen. Lors du débat en commission, on a pu entendre qu’il lui suffirait de rouvrir les débats et de demander aux parties de s’expliquer sur ce qui pourrait être un moyen d’inconstitutionnalité. Effectivement, c’est une voie indirecte permettant au juge de relever ce moyen, mais il nous semblerait beaucoup plus simple qu’il puisse le faire d’office.