Dans son rapport écrit, le rapporteur général s’est interrogé : s’agit-il d’une suppression, d’une transformation ou d’une réforme de la taxe professionnelle ? Pour le groupe socialiste, c’est clair : il s’agit d’une suppression.
En réalité, supprimer la taxe professionnelle, c’est s’attaquer à l’idée même de décentralisation. Tel est d’ailleurs le débat que nous devrions avoir avec la majorité. En effet, notre choix à nous, groupe socialiste, c’est d’assumer et de poursuivre la décentralisation. C’est pourquoi nous portons un jugement sévère sur votre projet.
Celui-ci signifie, en effet, la fin de l’investissement public local. Vous l’avez dit vous-même à de nombreuses reprises, il s’agit, par la suppression de la taxe professionnelle, de ne plus avoir à choisir entre investissement privé et investissement public.
Vous vous attaquez à l’investissement public civil, alors que l’investissement des collectivités locales représente trois quarts de celui-ci. De plus, l’investissement privé n’est jamais spontané dans notre pays. La preuve en est que l’on attend du « petit » emprunt de l’État qu’il soit le déclencheur de l’investissement privé à une hauteur égale à celui de l’État.
Enfin, l’engagement des collectivités locales dans l’investissement étant capital pour la sortie de crise, il est quelque peu paradoxal de les accuser de trop dépenser ! D’ailleurs, en période de crise, quand les usines menacent de fermer, c’est vers elles qu’entrepreneurs et salariés se tournent, sachant qu’elles sont réactives, pour qu’elles se battent à leurs côtés afin de préserver le tissu industriel local !
Le choix d’attaquer l’investissement public n’est pas anodin. L’action publique, particulièrement celle des collectivités territoriales, permet aujourd’hui l’égal accès de tous les citoyens à un même service public. C’est l’un des fondements de notre pacte républicain.
Par la suppression de la taxe professionnelle et la perte de plus de 10 milliards d’euros de recettes fiscales qui seront plus ou moins bien compensées – plutôt moins que plus ! –, cela dans des conditions fortement critiquables, vous signez l’acte de décès du service public local. Cette grave remise en cause de la décentralisation dans notre pays, nous la refusons. Nous souhaitons, au contraire, reprendre le bon chemin de la décentralisation !
Le président de la République déclarait à Saint-Dizier, le 20 octobre dernier : « tous nos rois n’eurent de cesse, pour asseoir leur souveraineté, de construire un État fort, centralisé, hostile aux féodalités et, au fond, à toute forme de pouvoir local, qu’il soit politique, économique ou intellectuel ». Madame la ministre, puisqu’il y a un roi, on comprend mieux pourquoi on ne veut pas organiser les féodalités !
C’est avec gravité, et au nom de trente ans de décentralisation, que nous vous demandons de retirer votre projet de suppression de la taxe professionnelle, madame la ministre. Nous invitons la majorité à se montrer décentralisatrice et à voter notre amendement de suppression de l’article 2.