Nous ne rejetons pas cet article 1er par obscurantisme ou pour nous priver de je ne sais quelle source d’énergie dans les années à venir, nous le rejetons pour deux raisons, l’une tenant à la forme et l’autre au fond.
Sur la forme, nous nous sommes sentis floués lorsque nous avons constaté que le texte soumis au Sénat n’était pas celui sur lequel nous pensions débattre.
En effet, lorsque le Premier ministre de la République française annonce, devant l’Assemblée nationale, le 13 avril 2011, qu’il faut abroger les permis d’exploration et d’exploitation des gaz de schiste afin de « tout remettre à plat », nous sommes d’accord ! Ce nouveau départ supposait d’attendre que la mission d’information de l’Assemblée nationale remette son rapport – ce qu’elle a fait hier –, afin de pourvoir débattre sur le principe de l’abrogation des permis, à la lumière de ce rapport. Or cet engagement n’a pas été tenu in fine, contrairement à ce qu’avait annoncé le Premier ministre ; Mme Kosciusko-Morizet l’a d’ailleurs reconnu.
En effet, et j’en viens au fond, le texte adopté par l’Assemblée nationale n’abroge pas les permis, mais laisse la porte ouverte à une autre technique. Nous savons parfaitement que le délai de deux mois qui séparera l’adoption de la loi du dépôt de leurs rapports par les industriels leur laisse une porte ouverte !
Ce n’est donc pas par obscurantisme que nous rejetons l’article 1er, mais parce que nous voulons être sûrs de préserver nos territoires et leur sous-sol grâce à l’interdiction de la fracturation hydraulique ou de toute technique recourant, sous une appellation différente, aux mêmes méthodes par l’injection de centaines de milliers d’hectolitres d’eau au moment où nous connaissons une sécheresse et des problèmes de qualité d’eau. Nous ne pouvons pas non plus accepter de prendre le risque d’injecter des produits chimiques, alors que nous devons prendre en compte la préservation de notre environnement. Voilà ce que nous disons !
Tout à l’heure, Jean Desessard évoquait la mobilisation de dizaines de milliers, voire de centaines de milliers de nos concitoyens, ainsi que d’élus qui se sont exprimés sur le sujet : elle mérite aussi d’être écoutée.
Lors du débat de très bon niveau et de très haute tenue, car dépourvu de tout excès, qui s’est tenu mercredi dernier dans cet hémicycle, nous avons simplement demandé que l’on prenne des précautions. Abrogeons donc les permis, comme s’y était engagé le Premier ministre, repartons de zéro et examinons comment procéder rationnellement ! Nous ne demandons rien de plus, mais c’est à cette seule condition que nous pourrons estimer avoir été entendus.
L’article 1er ne règle pas le fond du dossier et les amendements qui ont été intégrés dans le texte de la commission, sur proposition de notre collègue Claude Biwer, permettent une expérimentation, dont nous ignorons les conséquences. La défense de l’environnement, la défense de nos territoires passent avant tout. Il sera bien temps, demain ou après-demain, de délibérer sur un autre texte, en nous appuyant sur des réalités scientifiques, car nous ne réclamons pas l’application du principe de précaution pour le principe de précaution ! Lorsque nous en saurons plus, nous pourrons délibérer.
Pour toutes ces raisons, notre groupe s’oppose à l’article 1er. Même si celui-ci indique clairement que la technique de fracturation hydraulique est interdite, la lecture de l’ensemble des articles de cette proposition de loi laisse craindre que, malgré les déclarations du Premier ministre au mois d’avril, les industriels aient finalement toute latitude pour utiliser cette technique. En l’état, ce texte n’apporte pas de garanties suffisantes.