Intervention de Michel Billout

Réunion du 9 juin 2011 à 15h00
Interdiction de l'exploration et de l'exploitation des mines d'hydrocarbures par fracturation hydraulique — Article 1er bis nouveau

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Cet amendement témoigne de notre détermination à nous opposer à la façon dont a évolué la proposition de loi à la suite de son examen par notre commission de l’économie.

Comme nous vous l’avons déjà indiqué voilà quelques jours, nous estimons que la réécriture de l’article 1er constitue un recul très important par rapport aux objectifs affichés par les différentes propositions de loi déposées sur ce sujet.

En effet, alors que la proposition de loi déposée par nos collègues socialistes visait à interdire purement et simplement l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures de roche-mère, l’Assemblée nationale a interdit la seule pratique de la fracturation hydraulique, tandis que la commission de l’économie du Sénat a autorisé cette pratique – je dirais même qu’elle l’a légalisée –, sous couvert de la nécessitéde poursuivre la recherche.

Dans la même logique, notre collègue Claude Biwer a fait adopter en commission un amendement, devenu article 1er bis, créantune nouvelle structure appelée « commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux ».

Sous cette appellation se cache en réalité une structure chargée d’évaluer les risques environnementaux liés aux techniques de fracturation hydraulique ou aux techniques alternatives. On se moque de nous ! Les risques environnementaux liés à la fracturation hydraulique sont connus et reconnus. En outre, deux missions sont en train de travailler sur cette question : une missionparlementaire, qui a rendu hier un rapport contrasté, et une mission interministérielle, formée le 4 février dernier. Nous n’avons donc pas besoin d’une structure supplémentaire.

De plus, les éléments portés à notre connaissance justifient d’ores et déjà l’interdiction pure et simple de la fracturation hydraulique.

S’agissant des techniques alternatives mentionnées dans le présent article, qui font également l’objet de recherches, je mepermettrais de poser à nouveau la question qui me semble essentielle : doit-on réellement poursuivre dans la voie d’exploitation d’une nouvelle énergie fossile, alors même que l’un des engagements du Grenelle de l’environnement consiste justement à réduire le recours aux énergies fossiles en raison de leur nature même ?

Ne pensez-vous pas que les besoins en recherche scientifique se situent principalement ailleurs, et notamment dans le domaine des énergies renouvelables ?

Quelques-uns d’entre nous ont rencontré hier matin au Sénat les responsables et dirigeants du syndicat des énergies renouvelables. Ces derniers nous ont fait savoir que les difficultés à développer l’éolien et le photovoltaïque étaient, en France, de plus en plus importantes. Je pense que là est le véritable sujet.

L’article 1er bis dispose que c’est cette nouvelle commission qui proposera à l’autorité publique les projets scientifiques d’expérimentation à mener. On frise le ridicule ! Il y a en effet fort à parier que cesnotamment par de grands groupes, comme Total, dont on connaît les grandes préoccupations environnementales.

Je m’étonne en outre que cette commission, dans sa composition, ne comprenne pas de parlementaires. Nous ne connaissons d’ailleurs pas, sur le fond, les équilibres en termes de représentation, puisque les missions et la composition de cette instance seront fixées par décret en Conseil d’État, c’est-à-dire bien loin du Parlement.

Votre commission représente donc un pis-aller de participation et de transparence.

J’ajoute que la présence de représentants des collectivités territoriales au sein de la commission ne doit en rien dispenser le Gouvernement d’informer l’ensemble des élus, ainsi que les populations, des projets en cours dans les territoires.

Concrètement, nous contestons la visée générale de ces amendements, qui est bien de tordre l’équilibre de la proposition de loi. Certes, ces amendements n’ont pour le moment permis d’autoriser le recours à la fracturation hydraulique qu’à des fins de recherche. Pour le moment…

Vous rejoignez les conclusions du député François-Michel Gonnot. Vous estimez en effet, envers et contre tout, que nous ne pouvons nous passer de ce type de ressources, quand bien même le prix environnemental d’une telle exploitation serait irréversible et dramatique.

Les débats au sein de la commission ont également contribué à nous éclairer sur l’objectif de votre majorité : permettre, à plus ou moins longue échéance – visiblement, la plus courte serait la meilleure ! –, l’exploitation de cette ressource au nom de l’indépendance énergétique et de la sécurité d’approvisionnement du pays.

Tranquillement, à petits pas, vous ne cessez de détricoter le Grenelle de l’environnement. Vous continuez de refuser de reconnaître toute idée de développement durable comme élément constitutif de l’action publique et de faire prévaloir les intérêts économiques sur les impératifs environnementaux et sociaux.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, mes chers collègues, de voter notre amendement de suppression.

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