Cet amendement concerne la question sensible de la modulation, introduite à l’Assemblée nationale.
Les parties prenantes du Grenelle de l’environnement étaient arrivées à un compromis ambitieux, visant à fixer une émission maximale de 50 kilowattheures par mètre carré pour les bâtiments ici visés, norme validée techniquement par les professionnels.
Il s’agit d’un enjeu tout à fait stratégique puisque les émissions de gaz à effet de serre dans le bâtiment représentent 30 % de la consommation des énergies fossiles et 20 % du CO2 émis, soit 60 millions de tonnes par an.
À l’instar de ce que nous avons vécu ici lors de la discussion du projet de loi sur les OGM, il semblerait qu’un certain nombre de lobbies reviennent à la charge pour tirer vers le bas le projet du Gouvernement. J’en veux pour preuve l’introduction – à l’Assemblée nationale, cette fois-ci – de cette modulation, qui limite au bout du compte les normes à atteindre dans la construction en termes d’émissions de gaz à effet de serre en fonction de la source d’énergie primaire.
Cela m’inspire deux remarques.
Premièrement, modulées de cette manière, les normes techniques de la construction donnent une prime au chauffage électrique d’origine nucléaire. Or la filière nucléaire mérite d’être appréhendée sous l’angle des émissions globales de CO2.
Si nous raisonnons en termes de consommation d’énergie à la source, le bilan global de la filière cogénération à gaz est plutôt meilleur que celui de l’énergie nucléaire. C’est à ce constat que parviennent les études allemandes. En effet, l’uranium se trouve en Namibie, il faut l’extraire, le transporter, le traiter, ce qui entraîne une forte consommation de CO2.
Si nous raisonnons en termes de chauffage, le bilan se dégrade encore. Les besoins en chauffage ne sont pas réguliers, il existe des périodes de pointe auxquelles le nucléaire n’est pas capable de faire face. L’électricité d’origine nucléaire répond à des besoins stables : son utilisation est donc pertinente sur les circuits de transports collectifs, tels les TGV ou les TER. En revanche, il ne permet pas de répondre de manière adéquate aux consommations connaissant des périodes de pointe, donc à l’usage privé, notamment en ce qui concerne le chauffage domestique, ce qui implique de recourir à des sources d’appoint, lesquelles ont un impact négatif sur la maîtrise des émissions de gaz à effet de serre.
L’étude menée conjointement par l’ADEME et le gestionnaire du réseau de transport d’électricité précise que, pour un kilowattheure de chauffage électrique produit, 500 à 600 grammes de CO2 sont émis.
Dans un texte fondateur comme celui-ci, l’hypocrisie n’est pas de mise. En effet, si nous voulons réellement réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le bâtiment, il ne faut pas moduler l’application du seuil de 50 kilowattheures par mètre carré.
Deuxièmement, la première source d’énergie renouvelable, la première source de gains en gaz à effet de serre dans le bâtiment, ce sont les économies d’énergie. Revenir sur ce principe fondamental s’apparente à un sabotage.
C'est la raison pour laquelle je souhaite que le Sénat supprime cette disposition introduite par l'Assemblée nationale, qui va à l’encontre des objectifs et des engagements du Grenelle de l’environnement.