Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous entamons l’examen du projet de loi organique sur le fonctionnement des institutions de la Polynésie française, sur lequel le Gouvernement a engagé la procédure accélérée.
Comme vous l’avez rappelé, madame le ministre, la Polynésie française connaît, depuis 2004, une profonde instabilité politique. Les renversements de majorité ont été provoqués par des motions de défiance, dites « constructives », mais qui ont le plus souvent été très préjudiciables au territoire polynésien et à ses habitants.
En effet, ces motions ont empêché la mise en œuvre continue des politiques publiques en Polynésie française. Elles ont affaibli le lien de confiance entre les Polynésiens et leurs élus. Elles ont détérioré l’image de la Polynésie.
Cette situation est devenue ubuesque depuis 2004, onze présidents s’étant succédé depuis lors à la tête de la Polynésie française.
Il était donc urgent de proposer aux Polynésiens de redonner du sens, de la cohérence et de la durée à l’action politique locale. Qui pourrait être défavorable à cet objectif alors qu’une instabilité institutionnelle chronique ronge l’archipel ?
Comme l’a rappelé M. le rapporteur, ce texte modifie les dispositions relatives à l’élection des représentants à l’assemblée de la Polynésie française. Afin de garantir une meilleure représentation des différents archipels, il instaure la création d’une nouvelle circonscription électorale.
Le texte initial du Gouvernement a toutefois été profondément modifié par la commission des lois, qui a fait de la Polynésie une circonscription unique pour l’élection des membres de l’assemblée ; je salue cette initiative.
En effet, la circonscription unique conforte l’unicité de la collectivité et rend possible une gouvernance plus stable. Ce système présente plusieurs avantages.
D’abord, en permettant d’appliquer la prime majoritaire de manière globale, il favorisera la constitution d’un groupe politique doté de la majorité absolue des sièges au sein de l’assemblée de la Polynésie française.
En outre, il interdira aux listes de présenter des candidats seulement dans les archipels éloignés et découragera la création de groupes politiques strictement « locaux » au sein de l’assemblée.
Parallèlement à la création de la circonscription unique, la commission des lois a prévu un intelligent découpage de la Polynésie française en huit sections, permettant ainsi de préserver la représentation spécifique des archipels éloignés.
Le groupe UMP est heureux de pouvoir souscrire à une idée qui satisfait les élus polynésiens. Je tiens d’ailleurs, à cet instant, à saluer l’excellent travail du rapporteur, Christian Cointat, qui, après de nombreux échanges avec les différentes composantes politiques polynésiennes, a su proposer une architecture globale et cohérente.
Nous sommes pleinement satisfaits des enrichissements apportés au texte par la commission des lois, et notamment de la possibilité pour l’assemblée de la Polynésie française de disposer des éléments constituant l’étude d’impact, lorsqu’elle est consultée sur un projet de loi, ainsi que de la possibilité donnée à la Polynésie de créer, par une « loi du pays », des autorités administratives indépendantes dont elle devra définir les garanties d’indépendance et d’expertise. Cette disposition vise notamment la création d’une autorité administrative indépendante chargée de missions de régulation dans le secteur économique, telle une autorité de la concurrence.
Nous pouvons encore citer, parmi les nouvelles dispositions du texte, la possibilité donnée au président de la Polynésie française de solliciter l’engagement de négociations avec les institutions européennes. Nous avions adopté une disposition similaire pour les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon, ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. Il nous semble donc légitime d’accorder également ce pouvoir à la Polynésie française.
Outre les dispositions visant à permettre la constitution d’une majorité stable à l’assemblée de la Polynésie française, le projet de loi comporte également des mesures tendant à encadrer certains aspects de son fonctionnement institutionnel, afin de réduire les dépenses publiques, de rationaliser les relations entre l’exécutif et l’assemblée délibérante et de lutter contre l’instabilité politique.
Ainsi, le second volet du projet de loi comporte trois mesures phare poursuivant cet objectif.
Tout d’abord, il limite à deux mandats consécutifs, c’est-à-dire à dix ans, l’exercice du pouvoir par le président de la Polynésie française, afin de favoriser le renouvellement de la classe politique polynésienne.
Ensuite, il rend beaucoup plus difficiles le dépôt et le vote d’une motion de défiance.
Enfin, il met fin à la possibilité de renouveler de façon anticipée ou annuelle, sauf en cas de démission de son Président, le bureau de l’Assemblée de la Polynésie française, qui a connu neuf présidents en six ans.
Je voudrais revenir un instant sur ces deux derniers points.
S’agissant de la motion de défiance dite « constructive », le projet de loi augmente le nombre d’élus nécessaire pour son dépôt et son adoption, afin de garantir une meilleure stabilité politique, tout en conservant le principe de la responsabilité du gouvernement de la Polynésie française devant l’assemblée.
Ainsi, une telle motion ne sera désormais recevable que si elle réunit un tiers des membres de l’assemblée, et non plus seulement un quart. En outre, une seule motion de défiance pourra être signée par chaque représentant à l’assemblée de la Polynésie française au cours d’une même année civile, contre deux depuis la loi organique du 7 décembre 2007.
Pour que le durcissement des règles relatives à la motion de défiance ne se traduise pas par un recours accru, par une partie de l’assemblée qui souhaiterait exprimer son mécontentement, à la motion de renvoi budgétaire, les règles de dépôt et d’adoption de cette dernière ont été calquées sur celles prévues pour la motion de défiance.
S’agissant de la suppression de la possibilité de renverser chaque année le président de l’assemblée, que j’ai mentionnée précédemment, je rappelle qu’actuellement l’assemblée de la Polynésie française peut interrompre chaque année le mandat de son président si la majorité absolue de ses membres le souhaite. Ce dispositif contribue à l’instabilité politique locale. Le nouveau texte réduit la possibilité de changement du président au gré des fluctuations politiques par une limitation des hypothèses de renouvellement intégral du bureau. Le renouvellement anticipé ou annuel du bureau deviendra impossible, sauf en cas de démission du président de l’assemblée de la Polynésie française. La démission du président entraînerait donc celle du bureau, et non l’inverse.
Enfin, le texte réduit le nombre des membres du gouvernement polynésien : le président de la Polynésie française pourra nommer de sept à dix ministres. Cette proposition, que le groupe UMP soutient, répond à une demande fortement exprimée par la société polynésienne, tout en tenant compte de la nécessité de réaliser des économies budgétaires. Le statut ainsi modifié permettra de constituer des ministères plus homogènes et cohérents, aux attributions plus larges et complémentaires, afin d’éviter les doubles emplois.
Autre point important : les collaborateurs de ministres. Afin de mettre fin à leur recrutement pléthorique par le gouvernement de la Polynésie française, la commission a judicieusement modifié le texte initial, en prévoyant que l’assemblée de Polynésie serait compétente pour fixer le nombre maximal de collaborateurs de cabinet du président, du vice-président et des ministres.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, ce projet de loi est fondamental pour le bon fonctionnement des institutions de la Polynésie française, et donc pour sa cohésion générale.
II est de notre devoir d’assurer à la Polynésie une vie institutionnelle plus stable, afin qu’elle puisse se donner les moyens de réaliser ses projets ambitieux pour améliorer la vie de sa population et pour préparer l’avenir de sa jeunesse.
Le groupe UMP votera donc en faveur de ce texte, avec conviction et ambition, pour nos concitoyens polynésiens et pour l’avenir du pays.