Les campagnes sont en ébullition, et la colère est très grande. Notre rôle de parlementaires est de traduire cette colère ; car la situation est inacceptable, scandaleuse, par bien des points amorale, et suicidaire.
Près de 100 000 exploitations agricoles sont aujourd’hui touchées, ainsi que plusieurs centaines de milliers d’emplois, directs ou indirects.
Cela est totalement inacceptable et scandaleux : les producteurs ne peuvent pas être en permanence la variable d’ajustement !
C’est amoral : comment peut-on accepter que, au même moment où les agriculteurs, les producteurs de lait, n’arrivent pas à vivre de leur travail, 80 % des quatre cents plus grosses fortunes françaises se trouvent dans la grande distribution ? Ces fortunes ont été réalisées non pas sur plusieurs générations, comme ce fut le cas des grandes industries au XIXe siècle et au début du XXe siècle, mais simplement en quelques années !
Il est scandaleux et amoral que les producteurs et les industriels soient contraints de fournir des marchandises qu’on ne leur paie pas : on achète, par exemple, 500 000 pots de yaourt, mais on demande d’en livrer 550 000. Un grand hebdomadaire parlait de « racket » ; pour ma part, je considère que c’est du « gangstérisme légal », il ne faut pas avoir peur des mots.
Il faut créer dans notre pays une véritable solidarité de la filière. Celle-ci est constituée des producteurs, des transformateurs et de la distribution. « Le soleil brille pour tout le monde », rappelle le vieil adage. Alors, que chacun puisse vivre décemment de son travail ! Nous attendons, monsieur le ministre, que vous agissiez dans ce domaine. Sinon, on en arrivera à une situation suicidaire.
L’élevage laitier a des contraintes importantes – mes collègues les ont exposées –, en particulier la traite deux fois par jour. Un élevage laitier demande au moins dix ou douze ans avant d’être constitué valablement. Les investissements sont très lourds. Il faut être conscient que, lorsque ces éleveurs laitiers auront abandonné, on ne reviendra pas en arrière : ils ne reprendront pas cette activité. Il est donc de notre responsabilité, de la vôtre aussi, monsieur le ministre, de faire savoir que, si nous ne prenons pas des mesures extrêmement draconiennes, une pénurie de lait pourra s’installer en quatre ou cinq ans.