Intervention de Annie David

Réunion du 24 janvier 2008 à 9h45
Pouvoir d'achat — Article 4, amendement 87

Photo de Annie DavidAnnie David :

À l'occasion de la discussion du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, nous avions souhaité alerter le Gouvernement sur le problème des coupures d'énergie infligées aux familles les plus démunies, premières victimes de la hausse vertigineuse des tarifs de l'énergie. Mon collègue Guy Fischer vient de faire un très bon tour d'horizon de ce problème.

Très lapidairement, la commission nous avait alors répondu que l'amendement que nous avions déposé n'avait pas de rapport avec le texte discuté, ce que vient de dire M. le rapporteur sur l'amendement précédent. Toutefois, aujourd'hui, l'amendement n° 87 est au coeur de nos préoccupations, puisque ce projet de loi est consacré au pouvoir d'achat.

Les familles qui se trouvent dans l'impossibilité de payer leurs factures d'électricité, d'eau ou de téléphone sont dans une situation inadmissible dont il faut tenir compte dans un débat sur le pouvoir d'achat.

Le Président de la République, en poursuivant l'ouverture du capital d'EDF, conforte la stratégie de désengagement de l'État, en faveur des actionnaires et au détriment du service public de l'énergie.

Nous remarquons que les prix de l'énergie ne cessent de subir des augmentations, qui auront pour conséquence immédiate d'accroître le nombre de coupures dues aux difficultés que rencontrent les ménages pour honorer leurs factures. Nous ne pouvons le tolérer !

L'électricité est un facteur essentiel de la cohésion nationale, en ce qu'elle garantit l'accès à la santé, à l'hygiène et à un confort décent, que toutes les personnes résidant sur notre territoire sont en droit d'attendre. Il s'agit d'une mission d'intérêt général justifiant l'existence d'un service public national.

De plus, la fourniture d'électricité à un tarif acceptable participe du droit au logement inscrit à l'article 10 du préambule de la Constitution de 1946 et à l'article 25 de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

En outre, les coupures d'électricité contraignant à l'utilisation de moyens de remplacement, tels que la bougie, conduisent à une augmentation des risques d'incendie. Les derniers accidents survenus sont là pour en témoigner.

Pourtant, EDF continue de couper l'électricité à 600 000 foyers par an et à refuser un contrat à ceux qui ne peuvent plus payer ou aux occupants sans droit ni titre. Alors que des millions de personnes vivent, dans notre pays, sous le seuil de pauvreté et que plus du quart des ménages en difficulté a une dette envers EDF et GDF, il est plus que jamais indispensable que l'État prenne ses responsabilités en inscrivant dans la loi le principe d'interdiction des coupures d'énergie, aux conditions mentionnées dans cet amendement, et le principe de la responsabilité des fournisseurs qui engagent sans consultation la procédure de coupure d'énergie.

Enfin, je mentionnerai l'évolution de la jurisprudence sur les arrêtés « anti-coupures ». Le 16 mai 2007, le tribunal administratif de Melun a jugé légal l'arrêté pris en 2005 par la commune de Champigny-sur-Marne Il serait donc opportun que le législateur s'inspire de cette décision courageuse et progressiste.

Il faut également évoquer la tentation grandissante de l'État de se désengager du fonds solidarité énergie. Les dispositifs actuellement prévus par l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles restent limitatifs. Concrètement, cet article, modifié par la loi portant engagement national pour le logement, ouvre à toute personne éprouvant des difficultés particulières le droit à une aide de la collectivité pour bénéficier de la fourniture d'eau, d'énergie et de services téléphoniques.

Ainsi, en cas de non-paiement des factures, et jusqu'à ce qu'il soit statué sur la demande d'aide, cette disposition assure un service minimal de fourniture de ces services. Mais elle n'est pas suffisante et cela justifie à nos yeux une nouvelle refonte de la législation.

L'amendement n° 87, qui vise à interdire les coupures d'électricité, d'eau, de téléphone, tient compte de l'évolution du périmètre d'intervention du fonds solidarité logement et tend à renforcer les obligations des fournisseurs et des distributeurs, afin de protéger les familles les plus modestes.

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