Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 24 janvier 2008 à 9h45
Pouvoir d'achat — Article 4

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Cet amendement porte sur les surloyers.

L'application d'un surloyer, naguère faculté laissée aux organismes bailleurs, est, nous le savons, devenue une obligation par la grâce de dispositions votées encore récemment et masquées derrière le généreux discours sur l'engagement national pour le logement.

Il faut dire que, confronté à la difficulté de mettre en oeuvre le droit opposable au logement, le Gouvernement attend peut-être du surloyer obligatoire qu'il permette d'activer la vacance technique des logements locatifs sociaux. Et tant pis si cela favorise un urbanisme ségrégatif fondé sur la ghettoïsation des quartiers d'habitat social !

Dans les faits, le supplément de loyer de solidarité est largement lié aux circonstances du marché local : différentiel entre loyers dans les HLM et loyers du marché, files d'attente, besoin de maintenir ou de renforcer la mixité.

Le dispositif actuel, validé par la loi portant engagement pour le logement, traite de manière uniforme des situations qui correspondent pour l'essentiel à l'Île-de-France, voire à Paris, en stigmatisant de prétendus privilégiés qui occuperaient des logements auxquels ils n'auraient pas droit.

Qui sont donc ces locataires en situation de dépassement ?

Les ménages dont les revenus dépassent les plafonds de ressources n'ont pas bénéficié d'un passe-droit ! Entrés dans leur logement depuis plus ou moins longtemps - parfois très longtemps - leur situation a évolué : soit leur revenu a augmenté soit, à revenu égal, leur situation familiale a changé.

Ainsi, sans aucune augmentation de revenu, un chômeur qui trouve un emploi, un couple dont l'un des conjoints décède, une famille dont un enfant quitte le foyer fiscal, toutes ces personnes sont susceptibles de dépasser le plafond de ressources.

Pour ne citer que quelques exemples, certains locataires retraités résidant dans des cités d'habitat collectif local en banlieue parisienne, non imposables au titre de l'impôt sur le revenu, sont aujourd'hui soumis au surloyer obligatoire.

Contrairement à une idée répandue, les plafonds de ressources ne couvrent pas 65 % des ménages français pour toutes les catégories et dans toutes les régions de France. Ainsi, en Île-de-France, seulement 44 % des couples sans enfant ont un revenu inférieur aux plafonds de ressources. De nombreux couples se retrouveront donc très vite dans le champ d'application du surloyer.

Le surloyer épargne les familles nombreuses, mais il touche particulièrement les jeunes ménages actifs et les personnes âgées. Ces deux catégories ont donc vu leur situation s'aggraver.

Ainsi, les trois quarts des ménages qui sont aujourd'hui frappés par le surloyer obligatoire sont en fait composés de personnes seules âgées de plus de soixante ans.

De fait, en stigmatisant comme « profiteurs » les habitants qui relèvent des classes moyennes ou encore des ménages composés d'une seule personne et en identifiant le logement social comme ne devant accueillir que les plus démunis, on ne peut que diminuer l'attachement de nos concitoyens au logement social et renforcer la défiance de nombre d'entre eux à l'encontre des HLM, ce qui ne peut que rendre plus difficile leur construction là où ils sont pourtant nécessaires.

Il convient aussi, alors même que l'on s'interroge sur la modération de la progression des loyers dans le secteur privé, de faire en sorte que les locataires du parc social ne soient pas soumis à un taux d'effort exorbitant au regard de leurs ressources.

Telles sont les observations que nous ne pouvions manquer de présenter à l'appui de cet amendement.

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