Intervention de Guy Fischer

Réunion du 24 janvier 2008 à 15h00
Pouvoir d'achat — Vote sur l'ensemble

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Vous avez dit, monsieur About, que nous cherchions réellement à revenir sur le compte épargne temps. Croyez bien, mes chers collègues, que notre opposition à ce dispositif va grandissant avec les modifications que les gouvernements de droite successifs lui apportent.

Lors de l'élaboration de la loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, nous exprimions déjà notre inquiétude quant au recours au compte épargne-temps et dénoncions le risque de voir la question de la rémunération et des salaires passer au second plan, masquée par l'existence des CET et de l'ensemble des mécanismes de participation : épargne salariale, distribution d'actions gratuites, plans d'épargne retraite...

Deux ans plus tard, vous nous donnez raison. Les fonctionnaires qui ont manifesté aujourd'hui posent en fait la question suivante : à quand une véritable prise en considération de la baisse chronique du pouvoir d'achat des salariés, tant du public que du privé ? Or, pour éviter de subir les critiques de la grande majorité de nos concitoyens quant à la détérioration du pouvoir d'achat, vous leur proposez de faire racheter les journées de RTT qui, précisément, sont comptabilisées sur les comptes épargne-temps. Ces derniers, par l'effet des mesures que vous avez promues, sont devenus tout simplement des comptes d'épargne.

Soyons clairs : nous sommes opposés moins au CET qu'à la logique qui sous-tend ce dispositif. Ce que nous dénonçons, c'est la dénaturation, le « détricotage » des lois sur les 35 heures ; ce que nous ne pouvons tolérer, c'est que vous cachiez derrière un écran de fumée la vraie, la seule question qui intéresse les Français : celle des salaires et des retraites.

Le gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, se fait fort de pouvoir négocier sur tous les sujets, mais se dit pourtant incapable de réunir rapidement une conférence nationale sur l'emploi et les salaires. Il est capable de tout, sauf d'assurer la juste rémunération du travail des salariés, sauf de garantir aux retraités une pension digne de ce nom ! Relever le montant des retraites à hauteur de 1, 1 % est une insulte faite aux intéressés, monsieur le ministre !

En outre, croyez-vous réellement qu'un salarié père de famille convenablement rémunéré s'userait la santé à multiplier les heures supplémentaires, plutôt que de profiter de ses proches et de sa famille ? J'en doute, car lorsque l'on interroge les Françaises et les Français sur leur envie d'effectuer des heures supplémentaires, leur réponse unanime est qu'il ne s'agit en réalité pour eux que de compenser la faiblesse de leurs salaires. Telle est la vérité !

Ce projet de loi aura au moins eu l'avantage, à défaut de relancer le pouvoir d'achat et la croissance, de manifester l'existence d'une ligne de fracture entre, d'un côté, les tenants d'une économie libérale, à savoir le Gouvernement, sa majorité et le MEDEF, et, de l'autre, les défenseurs d'une économie que j'ose qualifier de sociale et de solidaire.

Vous défendez donc l'instauration de règles individuelles négociées de gré à gré entre l'employeur et le salarié, alors que nous souhaitons au contraire garantir des règles collectives. Vous voulez individualiser les salaires, quand nous voulons les asseoir sur une protection collective. Vous voulez supprimer notre régime de retraite solidaire par répartition en lui substituant progressivement des mesures individuelles reposant sur la capitalisation, lorsqu'il ne s'agit pas de montages boursiers. Pour nous, au contraire, il faut mettre fin à tous ces dispositifs et aux exonérations de cotisations et d'impôts qui y sont liées, pour assurer le financement à la hauteur des besoins de notre régime de retraite par répartition. Cela permettrait notamment de revaloriser les pensions, que le Gouvernement rogne en n'accordant qu'une hausse de 1, 1 %.

Enfin, vous entendez poursuivre dans la voie du recours régulier et abusif aux contrats précaires, quand nous défendons le CDI et voulons le généraliser.

Les Françaises et les Français attendront donc encore longtemps avant de connaître une augmentation de leur pouvoir d'achat. Ils constateront toutefois que votre logique est la suivante : dès lors qu'il s'agit de satisfaire les plus riches et le patronat, toutes les mesures sont bonnes ; quand il s'agit en revanche de permettre aux salariés de vivre dans la dignité des fruits de leur travail, le Gouvernement est aux abonnés absents.

Je conclurai donc en répétant ce que j'ai dit lors de mon intervention dans la discussion générale : augmenter les retraites, les minima sociaux, les salaires, voilà l'urgence, voilà ce qu'il faut faire. Pour l'heure, nous voterons contre ce projet de loi.

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