Compte tenu du peu de formation qui sera dispensé aux juges de proximité, il est légitime de s'interroger sur leur capacité à rendre un jugement. Ne pas prévoir de procédure d'appel dans ces conditions constitue un danger pour les justiciables quant à la protection de leurs droits.
Le danger est d'autant plus grand qu'avec cette nouvelle extension des compétences les litiges seront encore plus complexes, tant dans les faits qu'en droit. Il est incompréhensible que, dans ces conditions, les justiciables ne puissent faire appel de la décision rendue.
Il est enfin un dernier point inacceptable : l'extension des compétences des juges de proximité en matière pénale. Trois aspects retiennent notre attention.
Tout d'abord, l'intervention des juges de proximité en correctionnelle sera laissée à l'entière discrétion des présidents des tribunaux de grande instance. D'où une fragilisation de l'impartialité des juridictions et un facteur d'inégalité - encore ! - des justiciables devant la loi, dans un domaine où sont pourtant directement en jeu les libertés individuelles.
Cette inégalité sera de surcroît aggravée par l'impossibilité matérielle de constituer partout sur le territoire, de la même manière et pour toutes les audiences, des juridictions correctionnelles collégiales.
L'intervention des juges de proximité dans les audiences correctionnelles, dans les conditions proposées aujourd'hui, poserait d'ailleurs, me semble-t-il, les mêmes difficultés que celles qui ont été évoquées par le Conseil constitutionnel en 1975.
Par ailleurs, nous estimons dangereuse la possibilité offerte au président du tribunal de grande instance de désigner, pour valider les mesures de composition pénale, tout juge de proximité de son ressort.
Enfin, nous sommes particulièrement inquiets de la participation des juges de proximité au jugement des délits correctionnels. Il est en effet difficilement admissible qu'un juge non professionnel se prononce en matière de peine privative de liberté. A cet égard, la comparaison avec la cour d'assises n'est absolument pas acceptable !
Je vous rappelle que, lors du débat sur la loi organique, vous juriez vos grands dieux que jamais les juges de proximité n'auraient à participer à des jugements pouvant donner lieu à des peines privatives de liberté !
Bien entendu, les initiateurs de cette proposition de loi balayent nos objections d'un revers de main. Ils sont évidemment, en l'occurrence, les porte-parole du Gouvernement puisque la proposition de loi est identique au projet de loi qui était en gestation à la Chancellerie.
Devant une telle obstination à faire passer une réforme rejetée par tous les professionnels de justice, et dont l'urgence n'apparaît pas clairement, on peut s'interroger sur les réelles motivations du Gouvernement et des initiateurs de cette proposition de loi. S'agit-il de faire des économies ? Les formations au rabais, les rémunérations sous forme de vacations engendreraient une justice moins coûteuse... Franchement, aujourd'hui, il n'est pas évident que les vacations reviennent au bout du compte moins cher au ministère de la justice que la rémunération d'un magistrat professionnel exerçant à temps plein.
Je le disais en introduction, l'instauration d'une nouvelle juridiction de proximité apparaît comme un échec, ...