Cette empreinte libérale se retrouve donc, en toute logique, dans presque tous les articles que nous avons à examiner, hormis l'article 2. Cela en fait au moins un, me direz-vous !
En effet, cet article 2 vise à sécuriser heureusement la situation juridique des sportifs sélectionnés en équipe de France et concerne, enfin, tous les sports ! C'est indéniable, garantir l'accès au régime d'accident du travail est une bonne mesure.
Encore faudra-t-il veiller à ce que l'application de cette disposition n'entraîne pas de transferts de charges vers les fédérations, puisqu'elles sont financées, pour partie, par les licences des sportifs quels qu'ils soient, et que le prix des licences est déjà suffisamment élevé, ce qui se ferait alors au détriment d'une meilleure accessibilité de tous aux pratiques sportives.
Quant au reste de cette proposition de loi, deux axes se dégagent.
Le premier axe du texte consiste à vouloir rendre plus performants les clubs professionnels français, de football en particulier, dans la mesure où de nombreuses études ont pu relever le déficit de compétitivité de nos clubs professionnels vis-à-vis de leurs principaux concurrents que sont les clubs britanniques, espagnols et italiens.
Pour ce faire, on nous propose d'adopter deux articles, l'article 1er concernant la rémunération de l'image collective des équipes professionnelles et l'article 3 prévoyant la suppression du prélèvement de 1 % sur la masse salariale pour les CDD.
L'article 1er sert effectivement les sportifs professionnels en les assimilant fiscalement aux artistes interprètes et en abaissant le taux d'imposition des revenus qu'ils perçoivent au titre du droit à l'image.
Vous assimilez alors le sport à une activité culturelle, soit. Pour autant, l'objectif visé est bien d'exonérer des charges habituelles les recettes qui proviendraient de ce droit, en considérant ces recettes non plus comme un salaire mais comme une redevance. Dès lors, la question de l'exonération de la taxe professionnelle et de la TVA finira par se poser, puisqu'au plan fiscal la partie redevance sera imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et ne supportera donc ni la TVA ni la taxe professionnelle.
Le risque est donc grand, et du coup inacceptable, pour éviter l'hémorragie des joueurs vers des pays plus fiscalement attrayants, de commencer à ouvrir aux sportifs professionnels une porte pour sortir du droit fiscal commun, ce qui, je le crains, ne sera pas d'un grand secours à la compétitivité de nos clubs.
L'article 3, très critiquable à mon sens, prévoit la suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée. C'est une mesure de régression en parfaite adéquation avec la politique du Gouvernement d'affaiblissement du droit social et de destruction du code du travail.
Certes, le CDD d'usage est la norme dans le sport professionnel. Mais, dans la pratique, peu de CDD sont menés jusqu'à leur terme. Ils sont souvent résiliés au gré des opportunités financières sur le marché des transferts si bien que certains s'apparentent plus à des contrats d'intérim.
Par ailleurs, on sait combien est courte la durée de la carrière d'un professionnel et que le monde du sport professionnel laisse de plus en plus de jeunes sans avenir au bout de quelques années de vie dorée. Dès lors, j'ai du mal à comprendre la philosophie de cet article.
Cette suppression est choquante sur plusieurs points.
D'abord, elle permet à une catégorie d'échapper au financement de la formation et de la reconversion des sportifs, qui est pourtant une noble tâche.
Ensuite, elle va exclure des prélèvements obligatoires de très hauts salaires, les salaires de ceux qui n'auront aucun souci de formation et de reconversion.
Enfin, la grande masse des professionnels de tous les sports, qui sont loin, eux, de toucher des sommes mirobolantes et qui connaîtront ces soucis, sera privée de cette ressource.
Cela n'est pas concevable, d'autant que cette suppression, dont on sait qu'elle est l'émanation de pressions des clubs de football, ne fait pas l'unanimité au sein du mouvement sportif, notamment parmi le monde du rugby.