Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du 24 novembre 2004 à 22h00
Sport professionnel — Exception d'irrecevabilité

Photo de Jean-Luc MélenchonJean-Luc Mélenchon :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au cours du débat, nous avons beaucoup entendu parler de l'intérêt à porter aux préoccupations des investisseurs. Je fais partie de ceux qui étaient choqués par le fait que l'on ne mette jamais en regard la viabilité financière de la sécurité sociale, qui sera mise à contribution par cette décision, ni l'intérêt au moins égal des contribuables, qui financeront la totalité des mesures proposées par ce texte.

Le sport, au moins dans notre imaginaire collectif, est porteur d'un certain nombre de valeurs - la solidarité, l'effort, le mérite, le talent -, qui permettent l'ascension individuelle. Le sport est autant un spectacle qu'une activité économique, et ce spectacle repose sur l'exemplarité des acteurs.

Peut-être devrait-on être encore plus exigeant et réclamer avec force qu'à cette exemplarité de situation corresponde une exemplarité de comportement vis-à-vis des valeurs qui nous rassemblent et qui font le lien de notre patrie républicaine.

Or cette proposition de loi percute directement l'un des principes les plus évidents - eh oui, il faut parfois parler de morale, de responsabilité collective ! -, à savoir le principe d'égalité devant les charges publiques, qui est la base de notre solidarité nationale et de notre vivre ensemble.

Ce principe, vous en conviendrez, monsieur le ministre, est certainement parmi les mieux établis d'un point de vue constitutionnel. Il est proclamé dès l'article XIII de la Déclaration de 1789 : la contribution publique « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». Qui gagne plus contribue plus à l'effort de tous ! C'est une règle de bon sens et de morale civique élémentaire.

Dans ce texte, deux articles y contreviennent tout particulièrement. Je vais essayer d'en faire la démonstration de façon aussi dépassionnée que possible.

L'article 1er soustrait la part de rémunération des sportifs correspondant à l'exploitation commerciale de l'image de leur équipe à la fois à l'impôt sur le revenu et aux cotisations de sécurité sociale. J'attends qu'on explique une telle décision à nos concitoyens, surtout ceux qui ont cru aux arguments que vous avez avancés lors de l'examen du projet de loi de financement et du projet de loi de cohésion sociale.

L'article 3 du texte prévoit de ne plus soumettre les clubs sportifs à la taxe de 1 % sur les contrats à durée déterminée.

Dans les deux cas, la rupture de l'égalité devant les charges publiques est évidente. Et vous le savez, monsieur le ministre, car le gouvernement de M. Juppé avait imaginé de faire la même proposition en 1997. En séance plénière, le Conseil d'Etat avait, à l'époque, conclu à l'inconstitutionnalité de cette disposition.

Rien n'a changé depuis ! C'est la raison pour laquelle ce n'est pas le Gouvernement qui présente ce texte, sinon il se serait exposé à recevoir le même avis des mêmes juges.

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