Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 21 décembre 2006 à 15h00
Ratification de l'ordonnance relative à l'organisation de certaines professions de santé — Articles additionnels après l'article 12

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Avec cet amendement, réapparaît un article adopté lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, mais censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 14 décembre dernier.

Ce jour-là, le Conseil a censuré pas moins de vingt articles de la loi de financement de la sécurité sociale. C'est sans précédent et c'est un désaveu pour le Gouvernement !

Vous avez choisi de voir le verre « à moitié plein » et vous avez constaté que ces censures étaient essentiellement motivées par des questions formelles.

Pourtant, ces questions de forme ne sont pas anodines tant depuis cinq ans les gouvernements successifs n'ont eu de cesse de maltraiter le Parlement : toutes les méthodes ont été utilisées pour forcer la main à l'Assemblée nationale et au Sénat. La censure du Conseil constitutionnel vaut, selon nous, rappel à l'ordre.

Concernant le contenu de l'amendement, nous avions voté contre lors de son examen dans le cadre du PLFSS ; nous voterons de nouveau résolument contre. En effet, l'objectif visé à travers cet amendement est d'autoriser les dépassements d'honoraires, d'abord pour les chirurgiens et, demain certainement, pour l'ensemble des praticiens de santé.

Avec cet amendement, le Gouvernement passe au niveau supérieur en matière de manoeuvres électoralistes et de pratiques délétères vis-à-vis de l'assurance maladie. Le secteur 2, qui existe depuis des années, est trop souvent la règle pour certaines spécialités, notamment la chirurgie, et le moins que l'on puisse dire est qu'il n'est pas régulé.

Pour y remédier, vous jugez préférable d'ouvrir à l'ensemble des chirurgiens un secteur à honoraires libres, plutôt que de les encourager à revenir vers le secteur conventionné. C'est le début de la fin des tarifs opposables.

Finalement, ce sont bien les assurés sociaux qui devront payer ces dépassements d'honoraires. Les organismes complémentaires seront autorisés à compenser la différence entre le tarif demandé par le chirurgien et celui qui est remboursé par la sécurité sociale ; ils n'auront donc pas d'autre choix que d'augmenter leurs tarifs, en raison des charges supplémentaires qu'ils auront à assumer, privant ainsi un nombre de plus en plus important de Français de l'accès à une couverture complémentaire.

Par ailleurs, et comme le président de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, l'UNCAM, l'a souligné, le Gouvernement s'immisce directement dans la discussion entre les partenaires sociaux, ce qui va à l'encontre de ses proclamations si souvent répétées sur la nécessité du dialogue social.

Vous le savez parfaitement, monsieur le ministre, votre amendement ouvre la porte à une hausse continue du coût des soins, car non seulement il sera difficile de restreindre cette mesure à une seule spécialité, mais elle alimentera aussi les revendications de ceux qui n'en bénéficieront pas.

Je rappelle que, déjà au mois de septembre, trois syndicats de médecins libéraux - l'Union des chirurgiens de France, l'UCDF, l'Association des anesthésistes libéraux, l'AAL, et le Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France, le SYNGOF - ont recommandé à leurs adhérents de pratiquer des dépassements d'honoraires illégaux pour protester contre une revalorisation de leurs honoraires qu'ils estiment insuffisante.

Vous mettez le doigt dans un engrenage destructeur pour la sécurité sociale, et tous les efforts pour en réduire le déficit seront vains, mais ce n'est pas la première fois que le Gouvernement prend des dispositions contraires aux objectifs vertueusement affichés.

En conclusion, je tiens à souligner que l'absence de mesures prises contre les médecins qui refusent de soigner les personnes éligibles à la couverture maladie universelle ne nous encourage pas à voter un tel amendement, qui, en fait, aggravera la situation des bénéficiaires de la CMU.

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