Cet amendement a pour objet d’instaurer un moratoire sur l’entrée en vigueur de la troisième directive postale du 20 février 2008, qui, par son article 7, interdit désormais aux États membres d’accorder ou de maintenir des droits exclusifs et spéciaux dans le secteur postal.
Or, avec l’arrêt Corbeau du 19 mai 1993, la Cour de justice des communautés européennes a étudié le droit exclusif de collecter, de transporter et de distribuer le courrier confié par la loi belge à la Régie des postes. Elle a admis que l’article 90 du traité permet aux États membres de conférer à des entreprises, qu’ils chargent de la gestion de service d’intérêt économique général, des droits exclusifs susceptibles de faire obstacle à l’application des règles du traité sur la concurrence, dans la mesure où des restrictions à la concurrence sont nécessaires pour assurer l’accomplissement de la mission particulière qui a été impartie à ces entreprises.
D’autres arrêts rendus depuis lors, comme Commune d’Almelo du 27 avril 1994 et International Mail Spain du 15 novembre 2007, vont dans le même sens.
Cette jurisprudence constante n’a empêché ni l’adoption de directives soumettant les services d’intérêt général à la loi du marché ni une interprétation très libérale des directives sectorielles par la Commission.
Dans le cas de la troisième directive postale, aucune étude préalable n’a été menée, ni de la part de la Commission européenne ni de la part du Gouvernement, sur la portée de cette jurisprudence qui vient conforter, sur le plan juridique, la nécessité économique et sociale du maintien du secteur réservé comme option laissée aux États membres pour financer le service universel postal.
Dès lors, il nous paraît indispensable de demander un moratoire sur l’entrée en vigueur de la troisième directive postale et de contester le bien-fondé du projet de loi, qui vise à la transcrire, en attendant que la preuve soit faite que les droits exclusifs et spéciaux ne peuvent être invoqués dans le cas présent pour préserver le secteur réservé postal. Nous souhaitons que le Gouvernement prenne en compte notre demande et se rapproche d’autres États européens pour obtenir l’instauration d’un moratoire. Dans un contexte marqué par une profonde crise économique, financière et sociale, il devrait trouver des alliés.