Intervention de Jean-Jacques Mirassou

Réunion du 4 novembre 2009 à 14h30
Entreprise publique la poste et activités postales — Article 1er

Photo de Jean-Jacques MirassouJean-Jacques Mirassou :

Comme vient de le dire avec talent mon collègue et ami Didier Guillaume, l’article 1er constitue le cœur – on pourrait aussi parler de « noyau dur » –de ce projet de loi.

Le Gouvernement a d’ailleurs, sans ambiguïté, annoncé la couleur : si ce texte est adopté, La Poste cessera d’être une entreprise publique pour devenir une société anonyme. Chacun se rend bien compte qu‘il est bien difficile de faire rimer « société anonyme » avec « entreprise publique » !

On nous soumet un texte qui donnerait la possibilité à l’État de se retirer progressivement et significativement du capital, et ce quelles que soient les multiples assurances données par M. le ministre et les modifications apportées par les sénateurs de la majorité.

En effet, au bout du compte, malgré toutes les dispositions « prophylactiques » éventuellement mises en place, et au-delà du caractère prétendument « imprivatisable » – votre néologisme est, lui, définitivement improbable, monsieur le ministre ! – de La Poste, ce que fait une loi, une autre loi pourrait le défaire.

Notons-le au passage, cela signifie que, malgré l’ampleur de la crise qui secoue notre pays, le Gouvernement persiste, là comme ailleurs – ou, plutôt, là plus qu’ailleurs ! –, à administrer sa potion libérale sans mesurer les risques qu’il fait courir à notre société, notamment aux plus fragilisés de nos concitoyens, qui ont un impérieux besoin de s’appuyer sur le service public.

Personne ne saurait nier les difficultés rencontrées par La Poste, mais c’est surtout dans les rangs de l’opposition que des voix se font entendre pour dire que ces difficultés trouvent leur origine dans le désengagement de l’État, qui avait, qui a et qui pourrait continuer à avoir la possibilité d’abonder les crédits destinés, par exemple, à garantir l’acheminement de la presse et la présence postale.

À travers l’article 1er, le Gouvernement enfonce le clou et prend, de surcroît, le risque de brûler ses propres vaisseaux ! Mais comment pourrait-il en être autrement quand l’exécutif a, dans la ligne du libéralisme pour lequel il a opté, fait de la réduction du coût des services publics l’alpha et l’oméga de son mode de gestion ? Ce qui ne l’empêche pas, de manière tout à fait paradoxale, de laisser exploser dans le même temps la dette publique, en prenant des mesures dont nous avons largement contesté le bien-fondé. Je pense à l’aide colossale apportée, sans droit de regard, au secteur bancaire ; au pacte automobile et aux crédits engagés en faveur de ce secteur, dont peu de sous-traitants – j’en parle en connaissance de cause ! – ont pu apprécier les effets bénéfiques ; à la baisse de la TVA pour les restaurateurs avec, à la clé, une perte fiscale de 2, 5 milliards d’euros ; enfin, encore et toujours, aux fameuses niches fiscales et au bouclier fiscal, maintenus contre vents et marées.

On connaît maintenant votre recette : sélectionner très strictement les bénéficiaires des aides, puis, juste après, mutualiser la dette !

Voilà ce que vous voulez à présent appliquer à La Poste. Malgré vos dénégations, le risque existe bel et bien que vous ne résistiez pas à la tentation de céder une partie des actifs de l’État : transformée en société anonyme, La Poste pourrait parfaitement faire l’objet d’une telle démarche, grâce à l’adoption d’une loi dans le cadre de cette procédure accélérée dont le Gouvernement est si friand.

Pour toutes ces raisons, et parce que nous n’accordons plus aucun crédit à vos prédictions sur le statut de La Poste, nous voterons contre l’article 1er.

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