Intervention de Annie David

Réunion du 4 novembre 2009 à 21h30
Entreprise publique la poste et activités postales — Article 1er

Photo de Annie DavidAnnie David :

En refusant le changement le statut, nous ne cherchons pas le statu quo, bien au contraire, monsieur le ministre.

Hier, lors de nos interventions, M. Jean-Claude Danglot, Mme Évelyne Didier et moi-même avons formulé des propositions, mais vous ne les avez pas entendues, en tout cas vous ne les avez pas retenues, ce que je comprends puisqu’elles ne vont pas dans votre sens.

Vous vous appuyez sur des constats que nous pouvons partager. Effectivement, La Poste a de dettes, mais vous ne spécifiez pas l’identité de ses créanciers. Certes, La Poste doit se moderniser, mais, jusqu’à présent, vous ne lui en avez pas donné les moyens.

La Poste se retrouve ainsi aujourd’hui dans une situation qui vous fait dire qu’un changement de statut est nécessaire. Et vous affirmez sans cesse que ce changement de statut ne débouchera pas sur une privatisation de l’entreprise postale. Vous nous l’assurez la main sur le cœur, l’ajout introduit à l’article 1er par la commission de l’économie permettant, selon vous, d’empêcher cette privatisation. En vérité, vous cherchez à faire taire les protestataires.

Pour notre part, nous ne sommes pas dupes. Je vous rappelle qu’en 2004 déjà, lorsqu’il s’agissait de l’augmentation du capital d’EDF-GDF, d’aucuns criaient : « Pas de privatisation ! » Depuis, l’État actionnaire ne possède plus que 35, 7 % du groupe GDF-Suez. France Télécom a connu le même sort que GDF, l’État y est désormais un actionnaire minoritaire.

Oui, nos craintes sont justifiées, et vous n’avez pas su les apaiser !

En outre, le processus de privatisation n’est pas le fait de ce seul texte. Le système privé n’est pas étranger à La Poste, qu’il s’agisse de ses modes de gestion ou de ses filiales privées dont la plupart ont le statut de société anonyme. La structuration de La Poste en quatre branches – courrier, colis et express, Banque postale et réseau de bureaux de poste – est d’ailleurs comparable à celle d’une entreprise privée.

La Banque Postale, par exemple, est une société anonyme dont le capital est détenu par La Poste. Elle a dévoilé début septembre un produit net bancaire semestriel en hausse de 3, 2 %. Certes, sa collecte a baissé au premier semestre, mais, en dépit de l’ouverture du livret A à la concurrence, les encours d’épargne et de dépôts à vue sont en hausse, au rythme annuel de 8, 1 %.

La Poste s’intéresse également à la société Tocqueville Finance ; elle veut « poursuivre l’équipement de ses clients » et faire progresser sa clientèle « dans la ligne de son objectif de 10 millions de clients actifs à la fin de l’année 2010 » : c’est bien la preuve qu’elle se situe pleinement dans le marché et adopte les critères d’une société privée.

Cette recherche de rentabilité n’a pas empêché la fermeture de nombreux bureaux de poste. C’est dans l’inversement de cette tendance qu’il faut chercher une solution constructive, et non dans le renforcement du processus de privatisation !

Au lieu de renforcer les missions de service public, vous ne faites que les affaiblir. Comment comprendre autrement que les fonds de compensation prévus depuis le vote de la loi en 2005 pour les missions de service public n’aient jamais été versés à La Poste ? Ils représentaient plus de 800 millions d’euros par an, soit 4 milliards d’euros à la fin de cette année. Et l’on ose dire que La Poste a besoin de liquidités alors que l’État n’a pas versé son dû !

Je profite de l’occasion pour saluer l’arrivée de notre collègue Jean-Pierre Sueur.

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