Intervention de Marc Massion

Réunion du 8 juillet 2008 à 16h00
Règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2007 — Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Marc MassionMarc Massion :

Vous l’aurez compris, le groupe socialiste entend exprimer ses fortes réserves quant à la sincérité des comptes affichés.

Au préalable, je ferai plusieurs observations sur l’évolution négative de la situation économique de la France en 2007.

Les chiffres de l’année 2007 sont là pour confirmer nos craintes. Cette année aura été celle de la dégradation des finances publiques. La croissance stagne, le solde commercial se creuse, le déficit et la dette publique augmentent et, si les prélèvements obligatoires baissent, c’est le plus souvent au détriment de l’équité de notre système fiscal.

Il n’y a pas de quoi se réjouir de la croissance, car elle n’a pas évolué par rapport à l’année précédente. Elle reste pour la deuxième année consécutive à 2, 2 %. Le fameux point de croissance, si cher au Président de la République, n’a donc pas été « arraché », comme il le prétendait. Et si ce chiffre est bien dans la fourchette des estimations qu’annonçait le Gouvernement lors de la discussion du projet de loi de finances de 2007, à savoir entre 2 % et 2, 5 %, il se situe dans la partie basse de cette prévision. Tout triomphalisme serait par conséquent malvenu.

La France fait une nouvelle fois office de mauvais élève de l’Europe, puisque notre taux de croissance pour 2007 est nettement inférieur à l’évolution constatée sur la même période dans la zone euro – 2, 6 % – et dans l’Union européenne – 2, 9 %.

La France se trouve ainsi derrière l’Allemagne, 2, 5 %, le Royaume-Uni, 3, 1 %, et au même niveau que les États-Unis, lesquels ont pourtant dû affronter la crise des subprimes bien avant nous, puisque les répercussions devant toucher notre pays restent encore à venir.

La France n’a donc pas su, à l’image des années précédentes, profiter de la dynamique européenne et n’a fait que regarder passer le train de la croissance.

La consommation des ménages, en légère augmentation, reste, ce n’est pas nouveau, le principal moteur de l’activité économique.

Les réformes mises en place par le Gouvernement ne sauraient à elles seules, contrairement à ce que vous prétendez, expliquer cette constance, puisque la réforme du barème de l’impôt sur le revenu – 4, 4 milliards d’euros – et les suppressions et allégements de droits de succession et de donation – 0, 4 milliard d’euros – n’ont bénéficié qu’aux plus favorisés.

Le déficit commercial se creuse ! La croissance n’a pu compter, en 2007, sur une amélioration de nos exportations, qui ont subi un ralentissement particulièrement marqué. Le coût pour la croissance est tout de même de 0, 8 point.

L’investissement stagne. Il est stable en 2007, à 4, 9 % en volume, pour un montant de 406 milliards d’euros. De nouveau, les administrations publiques – les collectivités territoriales pour une large part – ont participé à hauteur de 72 milliards d’euros à la formation brute de capital fixe.

Le déficit public s’aggrave dangereusement en 2007. Si la croissance a été atone, le déficit public s’est particulièrement accentué, puisqu’il s’élève à 50, 3 milliards d’euros, soit 2, 7 % du PIB, contre 2, 4 % en 2006.

Le déficit constaté en 2007 est par conséquent bien supérieur aux hypothèses prévues dans le projet de loi de finances pour 2007, à savoir 2, 5 %, et plus encore si l’on regarde la prévision de 2, 4 %, révisée à l’occasion du projet de loi de finances pour 2008.

Ce taux est reparti à la hausse pour la première fois depuis 2004. Rappelons également que le déficit public, en 2001, s’élevait à seulement 23, 2 milliards d’euros, soit un montant plus de deux fois inférieur au niveau actuel.

Malgré les accusations répétées du Gouvernement désignant les collectivités territoriales comme les seules responsables de cette aggravation, l’augmentation du déficit est due à une hausse de 0, 2 point respectivement à la charge de l’État et des collectivités territoriales, et à une baisse de 0, 1 point du déficit de la sécurité sociale.

Si les besoins de financement des administrations publiques ont largement augmenté, leur évolution diffère selon l’administration concernée. Ainsi, le déficit de l’État a augmenté de 4, 9 milliards d’euros, celui des collectivités locales de 4 milliards d’euros, et le déficit de la sécurité sociale a diminué de 1, 7 milliard d’euros, notamment grâce à l’excédent dégagé par l’assurance chômage, soit 3, 5 milliards d’euros.

L’État et les administrations centrales ont donc vu leur besoin de financement atteindre 41, 8 milliards d’euros en 2007, en raison notamment des trop nombreuses, et souvent injustifiées, mesures d’allégements des impôts, qui ont coûté 0, 8 point du PIB, et du dynamisme de la charge de la dette.

Les coupes sévères effectuées dans la fonction publique et les transferts de compétences aux collectivités territoriales n’ont pas suffi à sortir l’État de cette mauvaise passe.

Cette aggravation a été limitée par l’effet de mesures exceptionnelles, telles que l’acompte versé à l’État sur les dividendes d’EDF, à hauteur de 0, 9 milliard d’euros, qui a permis de réduire le besoin de financement de 0, 1 point du PIB.

Pour toutes ces raisons, la Cour des comptes estime à nouveau, en 2007, que les causes de l’augmentation du déficit public sont essentiellement structurelles. Selon son rapport, le déficit structurel s’élèverait à 2, 9 % du PIB en 2007, soit un niveau particulièrement proche du seuil fixé par l’Union européenne. Si la conjoncture devait encore se dégrader, ce taux pourrait être rapidement franchi.

Encore une fois, cette dégradation du déficit fait de la France le mauvais élève de l’Union européenne. En effet, comment la France peut-elle assurer sa crédibilité devant ses partenaires européens, lorsque son déficit public dépasse de très loin celui de la zone euro, qui est de 0, 6 %, celui de l’Union européenne, qui est de 0, 9 %, et celui de son principal partenaire, l’Allemagne, dont le niveau de déficit public a été ramené à 0 % ?

La dette publique est toujours en hausse !

La part de la dette publique s’établit en 2007 à 63, 9 % du PIB, soit environ 1 210 milliards d’euros, en augmentation par rapport à la fin de 2006, où elle s’élevait déjà à 63, 6 % du PIB. C’est ainsi la cinquième année, depuis 2002, que ce taux est supérieur au taux requis de 60 % permettant de respecter les contraintes européennes.

La dette a donc atteint le montant exorbitant de 1 210 milliards d’euros, en hausse de 5, 2 % par rapport à 2006. Chaque habitant supporte dorénavant une dette de 19 000 euros – n’est-ce pas, monsieur le rapporteur général ? –…

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