... et l'a examiné avec précision, ce dont je le remercie.
Je tiens également à remercier votre rapporteur, M. Jean-René Lecerf, de la clarté et l'exhaustivité de son rapport.
Ce projet de loi permettra de mieux protéger les Français et d'aider les personnes condamnées, dans le respect de nos principes fondamentaux. Il aborde la question de la prise en charge des criminels particulièrement dangereux en fin de peine et traite également de l'irresponsabilité pénale pour trouble mental et de l'injonction de soins.
Avant de vous présenter les principales dispositions de ce texte, je tiens, d'une part, à vous en expliquer l'origine et, d'autre part, à revenir sur son champ d'application.
J'entends parfois dire que ce texte vient en réaction à des affaires particulières qui font l'actualité. À cet égard, permettez-moi deux remarques.
La lutte contre la récidive est une préoccupation constante. Depuis 1998, les gouvernements successifs, toutes tendances confondues, ont cherché à améliorer la prise en charge des délinquants dangereux. Des solutions nouvelles ont été mises en place. L'objectif est de réduire leur dangerosité et le risque d'un nouveau passage à l'acte.
Je citerai notamment le suivi socio-judiciaire et le fichier national automatisé des empreintes génétiques, instauré par Elisabeth Guigou et étendu, en 2003, par la loi pour la sécurité intérieure ; le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, créé en 2004 ; le bracelet électronique mobile, mis en place en 2005 et généralisé depuis le 1er août 2007 ; les traitements antihormonaux, dits aussi castration chimique, autorisés depuis 2005 avec consentement ; et, enfin, l'injonction de soins, que j'ai souhaité renforcer avec la loi du 10 août 2007.
Dans le même temps, des réflexions très approfondies ont été conduites. Depuis 2005, trois rapports ont été rendus : le rapport d'une commission santé-justice présidée par un haut magistrat, Jean-François Burgelin ; le rapport parlementaire du député Jean-Paul Garraud, et le rapport, remis au nom de votre commission des lois, par Philippe Goujon et Charles Gautier.
Tous concluent à la nécessité de mettre en place un dispositif permettant de préserver la société des délinquants les plus dangereux. Ils préconisent soit des centres fermés de protection sociale, soit des unités hospitalières de long séjour spécialement aménagées. Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, la prise en charge des criminels les plus dangereux a été une préoccupation constante des gouvernements et des parlementaires. Ce n'est pas un sujet qui est apparu au cours de ces derniers mois !
Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi il faudrait s'interdire de répondre aux drames qui surviennent au quotidien.
L'action gouvernementale suppose réflexion et préparation, ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire ! Après le temps de la réflexion, vient celui de l'action. Il est de notre responsabilité de corriger les insuffisances de la loi. Il est de notre responsabilité d'assurer la sécurité de tous. Il est de notre devoir d'empêcher que de nouveaux crimes soient commis.
Je vous l'ai dit, depuis plus de dix ans, les gouvernements successifs et les parlementaires ont réfléchi à la prise en charge des criminels particulièrement dangereux. Tous proposent les mêmes solutions.
Depuis dix ans, des mesures nouvelles ont été prises, mais elles ne sont pas suffisantes. Elles ne permettent pas de prendre en charge efficacement les criminels qui présentent les troubles du comportement les plus graves. Et, depuis dix ans, de nouveaux crimes atroces et barbares ont été commis.
Or on s'est aperçu que leurs auteurs avaient déjà été condamnés à de lourdes peines et qu'ils étaient identifiés comme des personnes extrêmement dangereuses. On savait qu'ils recommenceraient, car les mesures nécessaires n'avaient pas été prises.
Les Français s'en sont émus. Pourquoi les criminels qui ont encore des pulsions et qui refusent de se soigner sont-ils malgré tout remis en liberté ? Pourquoi les meurtriers aux profils extrêmement inquiétants sont-ils libérés, alors même qu'on les sait encore extrêmement dangereux ? Pourquoi attendre que ces personnes commettent de nouveaux crimes et fassent de nouvelles victimes pour agir ?
Alors, que faut-il faire, mesdames, messieurs les sénateurs ? Continuer de fermer les yeux ? Réfléchir encore pendant dix ans ? Compatir, quand d'autres jeunes enfants comme les petits Matthias ou Enis sont victimes de violences et d'actes de barbarie ? Regretter que la prison n'ait pas suffi la première fois à leur agresseur ? Se contenter de saluer le courage avec lequel des jeunes filles comme Anne-Lorraine Schmitt résistent à leur agresseur avant de trouver la mort ? §Doit-on juste regretter ces événements et ne rien faire, sous prétexte qu'il ne faut pas se soumettre à l'actualité ?
Telle n'est pas ma conception de l'engagement politique. Nous n'avons pas le droit d'attendre. Le Gouvernement a fait le choix de l'action et de la responsabilité. L'actualité nous rappelle la nécessité d'agir pour ne plus subir. Tel est l'objet de ce texte. C'est aussi le sens de votre engagement, mesdames, messieurs les sénateurs, en tant que législateurs, au nom du peuple français.
Avant de vous présenter le projet de loi proprement dit, je voudrais également revenir sur son champ d'application.
Le texte initial ne concernait que les criminels condamnés pour des meurtres, viols ou actes de torture sur des mineurs âgés de quinze ans. La rétention de sûreté vise à remédier à une particulière dangerosité et à prévenir un risque extrêmement élevé de récidive. Ce n'est pas une peine ; c'est une mesure de sûreté.
Les réflexions ultérieures et les travaux des députés ont montré que la dangerosité n'était pas uniquement liée à l'âge et à la vulnérabilité de la victime. Les députés ont donc souhaité que toutes les victimes mineures soient concernées, qu'elles soient âgées de plus ou de moins de quinze ans. Je comprends cette position, et le Gouvernement s'y est rallié. Tuer un enfant de treize ans ou une jeune fille de seize ans démontre une dangerosité semblable. La distinction n'était pas opportune. C'est pour cette raison que les crimes les plus graves commis sur tout mineur ont été retenus.
Les députés ont également voulu que la loi concerne les crimes commis sur une personne majeure avec certaines circonstances aggravantes.
En effet, comment pourrait-on nier la dangerosité du criminel pervers qui torture les victimes ou qui les viole ? Il fallait en tenir compte dans la loi. Votre commission a approuvé cette nouvelle orientation, et je m'en réjouis.
Sur proposition du Gouvernement, le dispositif transitoire a été étendu aux condamnés qui sont actuellement incarcérés pour avoir commis une pluralité de crimes. Il vise les tueurs et violeurs en série.
Il s'agit d'un dispositif transitoire. Après l'entrée en vigueur de la loi, il faudra que la cour d'assises prévoie l'éventualité d'une rétention de sûreté en fin de peine. C'est le principe même du texte.
Mais, d'ici là, nous devons agir. Comment prendre efficacement en charge les détenus particulièrement dangereux qui vont être libérés dans les jours, les semaines, les mois et les années à venir ? Faut-il attendre quinze ans pour que cette loi soit applicable ? Ce ne serait pas responsable. Il n'est de l'intérêt de personne que des criminels reconnus particulièrement dangereux soient libérés pour commettre de nouveaux crimes.
Commettre plusieurs crimes est le signe évident d'une extrême dangerosité. Je pense, par exemple, à Francis Heaulme ou à Pierre Bodein. Avant de commettre les faits qui leur ont valu une condamnation à perpétuité, ils avaient tous deux été condamnés pour plusieurs viols ou meurtres. On aurait pu réagir avant. On ne peut pas laisser libérer des criminels comme ceux-là après l'entrée en vigueur de la loi.