Nous sommes également confrontés à une carence dans l'exécution des lois puisque le placement sous surveillance électronique mobile, ou PSEM, n'était pas possible, faute de texte d'application de la loi de décembre 2005, au moment de la libération. Ce n'est que le 3 août 2007 qu'un décret d'application rendra possible la mise en place du bracelet électronique mobile dans le cadre du suivi socio-judiciaire et de la surveillance judiciaire.
Enfin, nous sommes confrontés à une carence dans le fonctionnement du service public, puisqu'une adresse laissée par une personne dont nul n'ignorait la dangerosité aurait mérité d'être contrôlée.
La commission des lois s'est également longuement interrogée sur la conformité tant à la Constitution qu'à la Convention européenne des droits de l'homme de la rétention de sûreté. Sur l'application immédiate de cette réforme aux faits et aux condamnations antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi, les avis ont été largement partagés.
La distinction entre mesure de sûreté et peine, ou plus précisément la distinction entre mesure de sûreté et mesure prise en considération de la personne et présentant le caractère d'une sanction ne va pas de soi, et bien imprudent serait celui qui s'aventurerait à prévoir l'éventuelle décision du Conseil constitutionnel.
De même, l'application de la rétention de sûreté aux criminels les plus dangereux, sans que la juridiction de jugement ait pu prévoir expressément dans sa décision le réexamen de la situation de la personne, pourrait poser problème à la Cour de Strasbourg.
Je sais bien que la Cour constitutionnelle fédérale d'Allemagne, dans une décision du 5 février 2004, a validé la détention-sûreté, dont le régime ressemble largement à la rétention de sûreté que nous voulons mettre en place, mais ce n'est pas manquer de respect à la cour de Karlsruhe que de rappeler que sa jurisprudence n'a pas davantage de portée dans notre pays que celle du Conseil constitutionnel en Allemagne.
Sur la seconde préoccupation majeure de ce projet de loi, qui est également relatif à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, les opinions exprimées lors des auditions se sont révélées beaucoup plus consensuelles. À l'opposé des craintes exprimées naguère par ceux qui imaginaient que l'on puisse s'aventurer à juger les fous, force est de constater que les nouvelles procédures améliorent le système actuel en permettant à la juridiction qui constate l'irresponsabilité pénale de se prononcer aussi sur la réalité des charges à l'encontre du mis en cause, ainsi que sur les mesures de sûreté indispensables.
Les victimes y trouvent plusieurs motifs de satisfaction : l'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental est préférable aux formules génériques souvent mal comprises de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement ; la comparution du mis en examen, si son état le permet, est plus aisée ; les victimes ont la possibilité d'entendre des témoins et d'être confrontées à une véritable audience publique ; enfin, l'action en responsabilité civile est facilitée.
On ne peut également que se féliciter de la possibilité pour la chambre de l'instruction de la juridiction de jugement de prononcer, à la suite de la reconnaissance de l'irresponsabilité pénale, une hospitalisation d'office, comme l'a prévu un amendement adopté par l'Assemblée nationale. En cas d'urgence, il peut en effet être prudent d'avoir prévu un tel dispositif, qui constitue peut-être une première approche d'une certaine judiciarisation de l'hospitalisation d'office que réclament un certain nombre de nos collègues, notamment M. Dreyfus-Schmidt.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, au-delà des problèmes qu'il règle, la commission des lois attend de ce projet de loi qu'il définisse les orientations d'une ambitieuse réforme de notre système pénitentiaire.
Je ne sais si la rétention de sûreté constitue, comme nous l'a confié un éminent universitaire, une révolution juridique. Quoi qu'il en soit, je renouvelle le souhait que la prochaine loi pénitentiaire soit la révolution à laquelle nous aspirons.