Monsieur le rapporteur, je tiens vous remercier d'avoir rappelé les enjeux du présent projet de loi et d'avoir évoqué la nécessité de prendre en charge les délinquants les plus dangereux.
Comme vous l'avez souligné à juste titre, de tels enjeux sont extrêmement complexes.
Monsieur le président de la commission des affaires sociales, je souhaite vous rassurer.
Tout d'abord, je vous rejoins sur la nécessité de s'entourer de toutes les garanties qui s'imposent avant de placer des individus en rétention de sûreté. Le texte que nous présentons aujourd'hui répond à cette exigence.
Je vous rejoins également sur la nécessité d'assurer une prise en charge psychiatrique adaptée en prison. Nous travaillons donc avec Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, en vue d'améliorer cette prise en charge. Aujourd'hui, nous avons 971 personnels de santé, dont 288 psychiatres, qui travaillent dans de telles unités spécialisées.
Afin d'améliorer encore cette prise en charge, nous souhaitons instituer des groupes de parole dans les prisons. Comme vous le savez, des unités hospitalières spécialement aménagées seront instituées d'ici à 2011, afin de disposer à terme de 700 places.
En outre, Mme Roselyne Bachelot-Narquin a également décidé de mettre en place une équipe mobile dans chaque service médico-psychologique régional, ou SMPR, afin d'assurer une prise en charge dans tous les établissements.
Sept centres de ressources sur la prise en charge des auteurs de violences sexuelles ont été mis en place depuis la fin de l'année 2007 pour diffuser des conseils aux professionnels de la psychiatrie. Leur nombre sera porté à vingt-six dès cette année.
Monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous-même et Mme Bernadette Dupont avez également évoqué la nécessité de renforcer les personnels qui assurent le suivi de l'injonction de soins, en application de la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs. Au demeurant, nous avons différé l'entrée en vigueur de certaines dispositions, afin d'avoir les personnels nécessaires. Un plan spécifique de formation est prévu au bénéfice de tous ces professionnels.
Par ailleurs, l'arrêté portant l'indemnisation des médecins coordinateurs de 470 euros à 700 euros a été publié le 24 janvier dernier. Actuellement, nous avons 203 médecins coordinateurs, contre seulement 150 au mois d'août, lors de l'entrée en vigueur du texte que je viens d'évoquer. Mme Roselyne Bachelot-Narquin et moi-même souhaitons - c'est un engagement du Gouvernement - que ce nombre atteigne 500 d'ici à la fin de l'année.
Mais vous savez que l'on ne peut pas forcer une personne à se soigner. C'est précisément à cette faille que la rétention de sûreté vise à répondre. Je vous le rappelle, d'un point de vue juridique, si une personne n'est pas condamnée à une obligation de soins, elle ne peut pas être contrainte à en suivre.
Certains ont mentionné le cas de Francis Evrard. En l'occurrence, il s'agit d'un individu qui avait commencé à suivre des soins, puis qui a catégoriquement refusé de continuer.
Actuellement, il n'existe aucun moyen de contraindre une personne placée en détention à se soigner. C'est la raison pour laquelle le présent projet de loi est précisément destiné à inciter beaucoup plus fermement des individus dangereux à suivre une thérapie.
Monsieur Portelli, je vous remercie d'avoir clarifié les termes du débat juridique. La rétention de sûreté est non pas une peine, mais une mesure de sûreté destinée à assurer la sécurité des citoyens face à des délinquants dangereux qui présentent encore une grande dangerosité à la fin de leur peine.
J'entends ici ou là nombre de commentaires définitifs sur l'inconstitutionnalité d'une telle mesure. Pourtant, le Conseil constitutionnel est seul compétent pour en juger. À mon sens - je partage votre point de vue, monsieur le sénateur -, la position adoptée par la Cour constitutionnelle allemande sur la question ne peut pas être écartée au seul motif que les décisions allemandes ne s'appliquent pas en France.
Mesdames Borvo Cohen-Seat et Boumediene-Thiery, le projet de loi ne vise pas seulement à répondre à des faits d'une extrême gravité qui suscitent - sur ce point, vous avez raison - une vive émotion.
Que faites-vous des travaux de la commission présidée par Jean-François Burgelin, qui est un haut magistrat ? Que faites-vous du rapport de M. Garraud ? Que faites-vous des travaux de MM. Philippe Goujon et Charles Gautier ?
D'ailleurs, s'agissant de la nécessaire prise en charge des délinquants dangereux, il était même envisagé de créer des centres de protection et de prise en charge.
Je ne peux donc pas vous laisser affirmer que nous instituons une peine à perpétuité. La rétention de sûreté fera l'objet d'une évaluation chaque année. De fait, elle sera ainsi d'emblée limitée à un an. Ses conditions de renouvellement seront extrêmement strictes - cela figure dans le projet de loi -, tout comme d'ailleurs les conditions de placement initial en rétention de sûreté.
Je peux également vous rassurer sur la loi pénitentiaire, attendue depuis l'époque où Mme Élisabeth Guigou ou Mme Marylise Lebranchu était garde des sceaux : elle sera soumise au Parlement avant la fin du premier semestre de l'année 2008.