Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 30 janvier 2008 à 21h30
Rétention de sûreté — Article 1er

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Cet amendement porte sur l'articulation possible entre le placement en centre médico-socio-judiciaire, le placement en centre pénitentiaire spécialisé et l'hospitalisation d'office.

Le présent projet de loi ne fait aucune différence entre les condamnés qui présentent des troubles mentaux et ceux qui ne présentent que des troubles de la personnalité. Ainsi, il n'exclut pas a priori du champ de la rétention de sûreté les individus qui présentent des troubles mentaux.

Il ne ressort pas de votre présentation, madame le garde des sceaux, que vous fassiez une distinction entre la dangerosité criminologique et la dangerosité psychiatrique. Or il ne faut pas confondre les deux. Heureusement, un criminel n'est pas forcément un fou et un fou n'est pas forcément un criminel ! L'accepter reviendrait à admettre les théories positivistes de Lombroso et les conséquences de celles-ci dans notre triste histoire. Cela reviendrait également à criminaliser les pathologies psychiatriques.

Votre projet de loi instille, de manière détournée, une confusion entre ces deux types de condamnés.

Vous le savez mieux que moi, madame le garde des sceaux, il existe une carence honteuse des soins psychiatriques en prison. Nous avons tous lu le rapport du Comité européen pour la prévention de la torture, récemment publié : les constats sont terrifiants.

Le placement des personnes détenues atteintes de troubles mentaux dans des unités hospitalières spécialement aménagées, les UHSA, répondra en partie à ces considérations. En attendant, les détenus présentant des troubles mentaux sont abandonnés à leur détresse et à leur souffrance.

Dois-je préciser que, dans une récente étude portant sur la santé mentale des personnes détenues en prison, étude réalisée à la demande de votre ministère par Mme Duburcq et MM. Rouillon, Fagnani et Falissard, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, montre que huit hommes sur dix incarcérés présentent des pathologies psychiatriques ; près de 7 % des détenus souffrent de paranoïa et de psychose hallucinatoire. Et je ne parle pas du nombre de suicides...

Ces détenus malades, allez-vous les envoyer en rétention de sûreté ? Allez-vous prévoir leur accueil dans des hôpitaux afin qu'ils puissent être soignés correctement ? Et ceux qui seront placés dans ces établissements spécialisés, que deviendront-ils à l'issue de leur peine ?

On ne pourra pas obtenir une réponse claire tant que la nature de la dangerosité des personnes visées par la rétention de sûreté ne sera pas précisée.

Cet amendement vise à prévoir une prise en charge médicale supplémentaire du détenu à la fin de sa peine et à exclure du dispositif de la rétention de sûreté les condamnés qui présentent des troubles mentaux distincts des troubles de la personnalité.

Je refuse que l'on traite tous les malades mentaux de criminels potentiels. Ils sont malades, et leur dangerosité est distincte de celle d'une personne présentant des troubles de la personnalité.

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