Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 30 janvier 2008 à 21h30
Rétention de sûreté — Article 1er

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Je ne développerai pas ici les arguments que j'expose dans l'objet de cet amendement, qui, vous l'aurez remarqué, est largement suffisant pour justifier juridiquement ce dernier.

Je me permets toutefois de préciser dans quelle mesure cet amendement permettrait de « sauver » la mesure de rétention de sûreté, dans son objet et dans ses modalités d'application, tout en garantissant la constitutionnalité du texte qui nous est aujourd'hui proposé.

En l'état, ce texte constitue, je l'ai dit, une abdication totale devant les principes les plus élémentaires du droit pénal. Il constitue également une abdication devant plusieurs principes garantis par la Constitution.

L'inconstitutionnalité est tellement évidente et flagrante que je commence à douter de la capacité de vos services à rédiger un texte respectueux des droits constitutionnellement garantis. Nous sommes face à un texte qui est indéfendable de ce point de vue. Il met en place une pseudo-mesure de sûreté qui est en réalité une peine.

Cette peine n'est rattachable ni à la condamnation initiale de la personne retenue ni à un fait commis après sa libération. Il s'agit d'une peine sanctionnant de manière préventive la commission d'un crime qui n'a jamais eu lieu. Sur quel fondement ? Sur la dangerosité plus ou moins grande du condamné.

Madame la ministre, mes chers collègues, je pense que nous devons, comme nous avons su le faire en ce qui concerne le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, trouver un compromis juridique sur l'applicabilité de ce texte.

Je suis contre ce projet de loi, je l'ai déjà dit. Mais je préférerais, s'il devait être appliqué, qu'il le soit dans le respect de notre Constitution et des valeurs de notre République.

Cet amendement est un amendement de compromis : il maintient l'application de ce texte, mais tend à l'aménager de manière à échapper à la censure de la Cour européenne des droits de l'homme.

Le dispositif reste intact, mais il s'intègre dans le droit existant, en tant que mesure de sûreté telle qu'elle est définie par le Conseil constitutionnel. Le résultat reste le même, seul le cadre juridique diffère.

S'il s'agit réellement de mettre en place une mesure et pas une peine, alors vous devez réfléchir à l'adoption de cet amendement. En substituant la rétention de sûreté aux réductions de peine dont a bénéficié le condamné, votre dispositif, madame la ministre, devient alors une mesure.

À défaut, il devra être considéré - c'est mon sentiment - comme un énième coup médiatique, surfant sur l'émotion d'un pauvre enfant dont vous vous permettez - je parle de la majorité - de citer le nom dans un débat parlementaire. Si cela n'est pas légiférer dans l'émotion, alors je ne comprends plus !

Vous dites qu'il ne faut pas céder à l'émotion, au fait divers, mais tout votre dispositif repose sur ce système, y compris, ai-je envie de dire, l'ensemble des dispositions pénales que vous nous avez proposées aujourd'hui.

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