Intervention de Jean-René Lecerf

Réunion du 7 février 2007 à 21h30
Modification du titre ix de la constitution — Suite de la discussion d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi d'abord de remercier l'UMP d'avoir accepté de me confier une partie de son temps de parole alors que je défends une position contraire à celle qui a été très majoritairement adoptée par le groupe dont je suis membre. Je m'exprime donc ici à titre personnel.

J'exposerai très rapidement les deux raisons principales de mon hostilité à cette révision constitutionnelle.

D'une part, et c'est là pour moi l'essentiel, j'estime que cette réforme bouleverse les fondements de la Ve République, auxquels je suis profondément attaché. D'autre part, un certain nombre de ses modalités m'apparaissent ou dangereuses pour la sérénité du fonctionnement de nos institutions, ou préjudiciables au respect qui doit leur être porté.

La doctrine a disserté à perte de vue sur la nature originale de la Ve République et sur le caractère semi-parlementaire et semi-présidentiel du régime qu'elle met en place. Je pense pour ma part - je peux me tromper, mais c'est ma conviction - qu'elle établit une double responsabilité politique : celle du gouvernement devant le Parlement et celle du Président de la République devant le peuple français.

À l'accusation selon laquelle un président irresponsable disposerait désormais de considérables pouvoirs propres, dispensés du contreseing ministériel - dissolution, référendum, article 16 -, il est aisé de répondre qu'à l'irresponsabilité du Président devant le Parlement s'est substituée sa responsabilité devant le suffrage universel, aujourd'hui à l'occasion des échéances présidentielles, mais aussi, lorsque le général de Gaulle était chef de l'État, lors de chaque référendum, voire de chaque élection législative.

La réforme actuelle vise à introduire une responsabilité politique du Président de la République devant le Parlement, étrangère selon moi tant à l'esprit de nos institutions qu'à la volonté des constituants.

Lorsque l'on cherche des exemples de ce « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat » qui devrait se substituer à la notion de haute trahison, ce n'est pas tant à certains faits divers réels ou supposés que l'on se réfère, c'est bien plutôt à certains choix dans l'exercice du pouvoir opérés par le premier Président de la Ve République : utilisation du référendum direct de l'article 11 pour réviser la Constitution, mise en oeuvre et durée d'application de l'article 16, refus de convocation du Parlement en session extraordinaire. L'idée même, mes chers collègues, que l'on aurait pu songer à traduire le général de Gaulle devant l'Assemblée nationale et le Sénat réunis donne un frisson rétrospectif, ...

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