Tous les anciens Présidents de la République sont de droit membres à vie du Conseil constitutionnel. Il en résulte des problèmes redoutables, a fortiori lorsque le Président de la République a été destitué par la Haute Cour ou condamné par la Cour pénale internationale ou encore condamné par une juridiction pénale française à l'issue de son mandat.
Les dispositions prévues dans l'amendement n° 9 sont fondamentales. Sans elles, rien ne pourrait empêcher un ancien Président de la République de siéger au Conseil constitutionnel quand bien même il se serait rendu coupable d'un « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat », qu'il s'agisse d'un crime contre l'humanité ou d'un crime de droit commun.
M. Portelli nous a dit tout à l'heure que cela était prévu par l'article 10 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, complété par l'article 7 du décret du 13 novembre 1959. Mais ces dispositions ne s'appliquent pas aux membres de droit. La doctrine est unanime sur ce point, à la seule exception de Maurice Duverger, dont M. le garde des sceaux ne semble pas penser le plus grand bien.
La note de service des études législatives du Sénat du 9 février 1984 est sans équivoque sur ce point. Lorsqu'il s'agit de membre de droit à vie du Conseil constitutionnel, cette jurisprudence ne s'applique pas. C'est d'ailleurs logique. Le fait que le Président de la République est membre de droit à vie du Conseil constitutionnel est prévu par la Constitution et une loi, fût-elle organique, ne peut pas revenir sur une disposition inscrite dans la Constitution.
Ces dispositions s'imposent aussi au membre lui-même, qui ne peut pas démissionner. Vincent Auriol, confronté à cette situation, avait décidé de ne plus siéger au Conseil constitutionnel, en déclarant : cela équivaut pour moi à la démission que la Constitution m'empêche de donner.
Les dispositions de l'ordonnance de 1958 et du décret de 1959 s'imposent donc au membre de droit à vie, qui ne peut pas démissionner, et au Conseil constitutionnel, qui ne peut pas renvoyer un membre de droit.
J'ajoute qu'elles lient toujours la démission au remplacement du membre démissionnaire. Or un membre de droit à vie n'est pas nommé ; il ne peut donc pas être remplacé.
Pour cet ensemble de raisons, il nous semble cohérent et de bonne législation de prévoir que les membres de droit qui auraient manqué à leur devoir, ou qui seraient condamnés par ailleurs, ne puissent pas siéger au Conseil constitutionnel.