Intervention de Patrice Gélard

Réunion du 14 décembre 2006 à 9h45
Parité pour les mandats électoraux et les fonctions électives — Discussion d'un projet de loi

Photo de Patrice GélardPatrice Gélard, rapporteur :

La loi ne prévoit le remplacement du titulaire qu'en cas de décès. Nous proposerons quelques extensions, et notre commission acceptera d'ailleurs un amendement déposé par la délégation aux droits de femmes, qui permettra d'étendre cette possibilité et d'éviter les élections partielles en couvrant 90 % des cas de transformation d'un poste de membre du conseil général.

Cependant, reste le problème soulevé par des professeurs de droit que j'ai auditionnés : la notion de suppléant est peu sûre constitutionnellement, elle est même douteuse. Elle porte en effet atteinte à un principe essentiel du droit électoral contenu dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen : le droit pour chaque citoyen et pour chaque candidat de choisir. Or, à partir du moment où l'on impose deux personnes de sexe différent, la liberté de choix n'existe plus. Avec ce système, un parti purement féministe - il n'existe pas aujourd'hui, mais ce pourrait être le cas - ne pourrait pas présenter un candidat avec un suppléant.

Pour éviter tout risque d'inconstitutionnalité, cette mesure devrait être temporaire. C'est la raison pour laquelle je proposerai un amendement tendant à rendre cette disposition applicable uniquement sur une période de douze années, ce qui laisse le temps de faire fonctionner ce système des suppléants. Dès lors, l'inconstitutionnalité tomberait et le Conseil constitutionnel accepterait l'instauration obligatoire du suppléant d'un autre sexe.

L'article 4 prévoit des pénalités : le chef de l'État avait envisagé qu'elles soient très importantes ; elles sont simplement fortes : elles passent de 50 % à 75 %. Cela dit, cette disposition risque d'être inconstitutionnelle en raison de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur des sujets voisins : le Conseil exige une proportionnalité entre la mesure envisagée et l'importance des sanctions financières.

Je ne sais pas où s'arrête le seuil : 60 %, 75 % ou 80 % ? Mais, là encore, il faut espérer qu'au bout de deux élections il ne sera pas nécessaire de maintenir ce taux.

On pourrait envisager un autre système ! À terme, la formule de départ pourrait se révéler ne pas être la bonne. Peut-être aurait-il fallu prévoir que, sur la première tranche, ceux qui ne respectent pas la règle n'auront rien, et que ceux qui la respectent auront un bonus. Mais cette solution nécessiterait une révision constitutionnelle.

Par conséquent, je proposerai que cette mesure, comme les autres, ne soit applicable que pour deux élections, mais pas pour la prochaine. Sinon, nous serions dans l'inconstitutionnalité totale ! En effet, une règle constitutionnelle, non écrite mais validée par le Conseil constitutionnel, prévoit que les modalités du scrutin ne peuvent pas être modifiées à moins d'un an d'une élection.

Par ailleurs, chacun sait que les grands partis représentés au Parlement ont déjà désigné leurs candidats selon les règles anciennes. On ne peut les obliger maintenant à repenser les candidatures qui ont été arrêtées. Pour cette raison, je m'opposerai aux amendements qui visent à faire appliquer cette disposition dès les élections de 2007.

J'estime que nous devons tous voter ce texte. Il permettra une avancée réelle en matière de représentation des femmes dans les fonctions exécutives et au sein des conseils généraux. Il ne faut pas profiter de ce projet de loi pour faire le procès - il n'a pas sa place ici ! - du scrutin majoritaire, qui a fait ses preuves et qui est tout autant de qualité que le scrutin proportionnel.

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