Les associations qui représentent les gestionnaires d’établissements – notamment des établissements ou services d'aide par le travail, ESAT – comme les familles que nous avons rencontrées nous ont fait part de leurs inquiétudes quant à l’application de l’article L. 344-2-5 du code de l’action sociale et des familles, tel qu’il résulte de l’adoption de l’article 39 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
En effet, cet article prévoit que « en cas de rupture de ce contrat de travail ou lorsqu’elle n’est pas définitivement recrutée par l’employeur au terme de celui-ci, la personne handicapée est réintégrée de plein droit dans l’établissement ou le service d’aide par le travail d’origine ».
Nous comprenons la logique qui a prévalu à l’adoption de cet article, c’est-à-dire permettre la réintégration d’une personne anciennement accueillie en ESAT qui a subi la rupture de son contrat de travail. Si, comme vous, nous considérons que personne ne doit être laissé au bord de la route, que toutes les personnes handicapées qui correspondent aux critères doivent pouvoir bénéficier d’un accueil et d’un accompagnement en ESAT, nous craignons que l’article L. 344-2-5 du code de l’action sociale et des familles ne soit pas opérant.
Pire, cet article risque à terme de faire peser des risques importants sur les établissements, dans la mesure où il prévoit expressément un droit opposable, la « réintégration de plein droit », sans même préciser de délai d’extinction de ce droit.
Malheureusement, les établissements sur lesquels vous faites peser cette obligation légale ne sont pas en mesure de la satisfaire. En effet, tout le monde le sait, les ESAT connaissent d’importantes difficultés financières. C’est la raison pour laquelle les représentants des gestionnaires d’ESAT revendiquent le droit à bénéficier de « l’aide à la contractualisation », afin de leur permettre d’accompagner la procédure de « CPOMisation ». De la même manière, ils vous demandent, madame la secrétaire d’État, de pouvoir bénéficier des crédits à l’investissement PAI – plan d’action immédiate – auxquels ils ne peuvent actuellement pas accéder.
J’en reviens donc à cet amendement, car dans le contexte actuel, les ESAT ne sont pas, de fait, en capacité de respecter la loi. En raison de leur mode de financement, les ESAT sont dans l’obligation d’atteindre la capacité totale d’accueil, ce qui n’est pas difficile vu les demandes. À défaut, les établissements perdent de l’argent. Ainsi, le seul fait de conserver, ne serait-ce même que deux places, par prudence, afin d’accueillir éventuellement un retour est synonyme de pertes sèches.
Par ailleurs, cela n’est absolument pas possible, puisque, comme vous le savez, la tendance est aujourd’hui plus à la suppression de places qu’à leur maintien. On voit même se créer une situation paradoxale où les établissements bénéficient de fonds pour créer des places, mais en ferment par ailleurs, car ils ne disposent plus de ressources suffisantes pour maintenir les places existantes.
Les enveloppes sont notoirement insuffisantes, et la faible hausse des enveloppes dédiées à la reconduction de places fait courir un risque réel de suppressions de postes ; le bruit court que 450 emplois pourraient être supprimés.
C’est pourquoi, dans ce contexte, il nous semble important de tirer un bilan – pour mieux nous projeter dans l’avenir – sur l’application de cette disposition. En effet, il ne faudrait pas qu’en raison d’un manque crucial de financements les ESAT soient, demain, lourdement pénalisés sur le plan financier, et que cela entraîne la fermeture d’un certain nombre d’entre eux, donc la suppression de places.