Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 4 décembre 2009 à 22h00
Loi de finances pour 2010 — Ville et logement

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari, en remplacement de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis :

C’est donc dans son contexte qu’il faut analyser le budget du logement. Certes, ce budget, évalué à près de 7 milliards d’euros, augmente de 6 % par rapport à l’année dernière. Toutefois, permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de relativiser ce chiffre. En effet, il ne résulte pas d’un effort particulier du Gouvernement en faveur du logement mais s’explique en réalité par la hausse des aides personnalisées au logement qui, comme vous le savez, s’accroissent mécaniquement sous l’effet de la montée du chômage, celui-ci pesant directement sur la situation financière des ménages.

À cet égard, je m’inquiète de l’avenir du financement de ces aides puisqu’il provient en partie des cotisations des employeurs, amenées à décroître sous l’effet de la crise. Pourtant celles-ci sont aujourd’hui indispensables pour nos concitoyens.

En ces temps d’interrogation sur le pouvoir d’achat, le logement est bel et bien devenu un critère pertinent pour mesurer les disparités de conditions de vie entre les ménages aisés et les ménages les plus modestes Depuis une vingtaine d’années, ce poste de dépenses n’a fait qu’augmenter, passant de 14 % du budget des ménages en 1988 à près de 30 % aujourd’hui.

J’en viens maintenant à la prévention de l’exclusion et à l’insertion des personnes vulnérables. Je dois vous dire mon étonnement lorsque, le 20 novembre dernier, j’ai découvert, sans doute comme vous, monsieur le secrétaire d’État, que 56 % des Français estiment qu’ils pourraient un jour se retrouver sans abri. Le constat est douloureux pour la France : aujourd’hui, près de 8 millions de personnes, soit plus de 13 % des Français, sont confrontés à la pauvreté. Aussi, je ne peux que m’étonner de constater une diminution des crédits consacrés à cette politique, alors même que la situation sociale se dégrade du fait de la crise économique.

S’agissant du développement et de l’amélioration de l’offre de logement, comment justifier que les crédits accusent une baisse de plus de 15 %, alors que ces dotations sont indispensables pour financer la construction de logements sociaux et la réhabilitation du parc privé ?

Je ne peux donc que regretter le désengagement progressif de l’État, inacceptable dans la mesure où la mobilisation des opérateurs du logement social ne cesse de s’amplifier et que les collectivités locales sont de plus en plus mises à contribution. À cet égard, je doute que la réforme du 1 % logement soit totalement maîtrisée. En effet, celui-ci devrait théoriquement contribuer au financement de l’ANAH à hauteur de 480 millions d’euros par an en 2009, en 2010 et en 2011. Or ce versement accuse déjà un retard en 2009, puisque seulement 200 millions d’euros ont été versés à ce jour.

Je remarque ensuite que 480 millions d’euros sont budgétés cette année pour produire 110 000 nouveaux logements sociaux. C’est bien, mais est-ce suffisant, face à l’ampleur des besoins, 60 % des ménages français étant éligibles à l’attribution d’un logement social ? Surtout, le Gouvernement fait passer l’enveloppe budgétaire consacrée au logement social de 550 millions d’euros à 480 millions d’euros cette année. Si l’on en juge par les chiffres, ce sont les subventions unitaires moyennes qui seront revues à la baisse.

Monsieur le secrétaire d’État, n’y a t-il pas un paradoxe à voir l’État diminuer sa participation alors même que vous nous demandez de développer le logement social ?

Pour finir, j’insisterai sur un sujet qui intéresse particulièrement notre commission : la promotion de l’habitat durable. J’ai la conviction que le secteur du logement peut apporter sa contribution à la lutte contre le changement climatique, ce secteur représentant pas moins de 40 % de la consommation d’énergie finale dans notre pays. De nombreux logements demeurent « énergivores », le nombre de « passoires thermiques » étant évalué à 7 millions. Or les propriétaires concernés sont souvent modestes et la rénovation de ce parc est très coûteuse. C’est pourquoi notre commission soutient le « verdissement » de la législation fiscale dans ce domaine.

En définitive, la crise que nous traversons doit être l’occasion de refonder la politique du logement pour l’adapter aux besoins des personnes et l’orienter résolument vers l’édification d’un habitat durable.

Répondre à cette exigence serait triplement bénéfique pour la société. Premièrement, cela permettrait d’assurer la pérennité d’un parc respectueux de l’environnement ; deuxièmement, nos concitoyens pourraient ainsi réduire la facture d’un poste de dépense aujourd’hui incontournable ; troisièmement, nous disposons là d’un gisement d’emplois non négligeable.

Pour conclure, vous comprendrez que, à titre personnel, M. le rapporteur pour avis appelle à voter contre ce budget, la commission de l’économie ayant, pour sa part, émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits.

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