Intervention de Fadela Amara

Réunion du 4 décembre 2009 à 22h00
Loi de finances pour 2010 — Ville et logement

Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le président de la commission des finances, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je constate, aux vues de la diversité de vos questions, que vous nourrissez un vif intérêt pour la politique de la ville, et je m’en réjouis.

Les actuelles zones urbaines sensibles, ou ZUS, comprennent quatre millions d’habitants. Et si l’on considère les quartiers bénéficiant d’un contrat urbain de cohésion sociale, ce sont huit millions d’habitants qui sont concernés par les actions que je mène au titre de la politique de la ville. II ne s’agit donc pas d’un enjeu marginal.

La dynamique « Espoir banlieues » se veut une politique sur mesure pour répondre aux exigences et aux besoins des habitants des quartiers. Si j’ai appelé ainsi cette action, c’est parce qu’elle crée une dynamique collective qui mobilise l’ensemble des acteurs concernés : l’État, les collectivités locales, les associations, le monde économique.

L’année 2010 connaît un contexte budgétaire difficile, certes. Mais, compte tenu des enjeux, les crédits d’intervention de la politique de la ville doivent être non seulement maintenus, mais renforcés. C’est pourquoi ce projet de budget pour 2010 doit être regardé à l’aune de l’effort qui sera accompli pour les banlieues.

Je ne reviendrai pas sur les grandes tendances décrites par M. Dallier, rapporteur spécial, mais je tiens à affirmer que la sécurisation de ce budget est l’une de mes priorités. Elle l’est d’autant plus que le dernier rapport de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, ou ONZUS, a mesuré l’ampleur de la précarité que connaissent les populations des zones urbaines sensibles, pauvreté qui a augmenté sous l’effet de la crise économique, comme l’a judicieusement rappelé Mme Bariza Khiari, rapporteur pour avis.

Cela nous montre plus que jamais que nous devons redoubler d’efforts pour réduire cette fracture sociale. Dans cette perspective, mon action ministérielle sera renforcée sur les grandes priorités.

Il s’agit, d’abord, de la rénovation urbaine. Ce sujet me tient particulièrement à cœur, parce qu’il est le levier de la transformation visible du cadre de vie des habitants. Depuis 2007, le chemin parcouru par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine est considérable. Au travers de 375 projets concernant 475 villes, près de 42 milliards d’euros de travaux ont été générés par les 12 milliards d’euros apportés par l’ANRU. Ce sont autant d’emplois sauvegardés ou créés.

Grâce à une meilleure fluidité des financements, on assiste à une accélération du programme, qui constitue une véritable force d’entraînement pour l’ensemble de notre économie.

Aujourd’hui, la totalité des 12 milliards d’euros est réservée et la forte augmentation du volume d’opérations sur la période 2009-2011, communément appelée la « bosse de l’ANRU », suscite des inquiétudes. Le financement de l’ANRU sur cette période est assuré. Pour celle qui s’ouvre en 2012, je m’engage à ce qu’une concertation avec les partenaires sociaux débute dès l’année prochaine.

Le succès de l’agence est salué par tous les élus. Ensemble, nous considérons qu’il faut terminer le travail, et c’est pourquoi je milite pour un PNRU 2.

De plus, cette année, la mobilisation supplémentaire de l’État s’est traduite par l’allocation de 350 millions d’euros à l’ANRU dans le cadre du plan de relance. Rapidement consommés, ces crédits ont permis la montée en puissance d’opérations qui ont généré 4, 4 milliards d’euros de travaux. Ce sont autant d’emplois créés, notamment pour les jeunes des quartiers.

Par ailleurs, un projet de rénovation urbaine ne peut être réussi que lorsqu’il rejoint la préoccupation première des habitants : l’emploi. Les clauses d’insertion vers l’emploi introduites dans les marchés publics de l’ANRU connaissent des résultats encourageants : près de 7 000 personnes des quartiers populaires en ont déjà bénéficié.

Je veux persévérer et amplifier notre action sur ce point. C’est pourquoi j’ai demandé à l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’ACSE, de consacrer 10 millions d’euros à des actions exceptionnelles, venant renforcer celles qui sont menées par les régies de quartier ou les structures d’insertion par l’activité économique au bénéfice de l’emploi.

Cet ensemble de dispositions s’ajoutera naturellement à toutes les mesures annoncées par le Président de la République, dont l’objectif premier est de faire reculer le chômage des jeunes dans les quartiers.

À ce sujet, il convient de rappeler quelques vérités sur le contrat d’autonomie, qui apporte une réponse pour les jeunes les plus éloignés de l’emploi. Aujourd’hui, ce sont cinq cents contrats signés par semaine. Ce dispositif exceptionnel bénéficie à 18 000 jeunes, soit 70 % de l’objectif de 2009.

Par ailleurs, parmi les jeunes qui ont reçu leur formation, 46 % profitent d’une sortie positive soit dans l’emploi, soit dans une formation qualifiante. Vous le voyez, en période de crise et compte tenu du public ciblé, les résultats sont très encourageants, mais il nous faut aller au-delà.

Enfin, je tiens à rappeler qu’une évaluation, menée en partie par l’ONZUS et un cabinet indépendant, présentera dès 2010 des statistiques détaillées sur la mise en œuvre de ce dispositif.

J’attire votre attention sur un autre point fondamental de mon action : je souhaite que la République soit présente dans nos quartiers. Nous ne pouvons bâtir un pacte républicain solide sans cette présence impérative de l’État. Dans ce cadre, la mise en place de délégués du préfet dans les quartiers prioritaires est un levier nouveau de la politique de la ville, et constitue le maillon de proximité de l’État qui manquait dans les quartiers.

Au 30 novembre 2009, trois cent un délégués ont été recrutés, soit 85 % de l’objectif fixé pour la période 2008-2010. Les deux tiers sont d’ailleurs affectés dans les régions comportant les plus fortes concentrations de quartiers en difficulté.

Tous les ministères, ainsi que les établissements publics, les associations, la fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale ont participé, comme je l’ai souhaité, au recrutement. Parmi ceux-ci, les ministères de l’intérieur et de la justice sont les mieux représentés. De plus, près de 5 % des délégués sont issus de la société civile et des associations, ce qui répond aux impératifs de la promotion de la diversité.

La politique de la ville ne peut se penser sans une vision claire non seulement des enjeux, mais aussi des zones d’intervention. C’est pourquoi une réforme de la géographie prioritaire s’impose, conformément au souhait de la représentation nationale lors du projet de loi de finances de 2009. Concernant les échéances à venir, un prochain conseil interministériel à la ville, en janvier 2010, validera le calendrier de cette révision, ainsi que ses grands principes.

L’objectif fixé est de disposer d’une nouvelle carte des zones urbaines sensibles avant l’été 2010. Ensuite, les contrats urbains « nouvelle génération » devront être opérationnels en janvier 2011.

Ainsi que l’a rappelé le Président de la République à maintes reprises, il faut donner plus à ceux qui ont moins et donc concentrer notre action sur les territoires les plus en difficulté si nous voulons atteindre cet objectif simple, mais indispensable : la réduction des écarts territoriaux. Ce principe, qui est la base du pacte républicain, répond aussi aux impératifs de la lutte contre les discriminations et de la promotion de la diversité qui est au cœur de ma démarche.

Jean Jaurès a dit : « Je n’ai jamais séparé la République des idées de justice sociale, sans laquelle elle n’est qu’un mot ». C’est l’essence même de la dynamique « Espoir banlieues », dont la réussite repose sur la mobilisation de tous.

C’est pourquoi, il faut continuer à désenclaver, à « déghettoïser », à lutter contre la pauvreté et le chômage, à créer les conditions de réussite pour nos enfants, à favoriser la diversité, à promouvoir l’excellence et à réduire la fracture sociale. En conclusion, je peux assurer les membres de la représentation nationale qui m’accueillent ce soir de ma totale et ferme détermination pour y parvenir.

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