Monsieur le président, en application de l'article L. 136-1 du code des juridictions financières, j'ai l'honneur de vous remettre le rapport public annuel de la Cour des comptes, que j'ai présenté, hier soir, à M. le Président de la République. Je vous adresse des remerciements particuliers pour votre accueil.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, l'exercice, auquel je viens de procéder, est rituel, et pour cause : comme vous l'avez fort opportunément rappelé, monsieur le président, le rapport annuel fête cette année, avec la Cour, ses 200 ans.
Certes, le Parlement ne connut pas ses vingt-cinq premiers millésimes, qui ne profitèrent qu'à Napoléon d'abord, puis à Louis XVIII, à Charles X et à leurs gouvernements ensuite. Mais l'essor du parlementarisme allait très vite changer la donne et, en 1832, les chambres obtinrent la communication de ce travail, qu'elles réclamaient depuis déjà plusieurs années.
Le rapport annuel est ainsi, avec la déclaration générale de conformité, à l'origine même de la mission d'assistance de la Cour au Parlement.
Cette mission, indissociable du nouvel équilibre des pouvoirs réalisé par la Monarchie de Juillet, n'a cessé, depuis lors, d'être réaffirmée, confortée et élargie. Mais elle a surtout changé de dimension voilà cinq ans, avec la mise en place de loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, qui l'a littéralement et radicalement réactivée et revigorée.
La Cour des comptes est donc plus que jamais à votre disposition. Elle est à votre disposition pour assister la commission des finances dans ses travaux d'évaluation et de contrôle et pour assister la commission des affaires sociales dans ses travaux relatifs aux lois de financement de la sécurité sociale. Je viens moi-même régulièrement m'exprimer devant ces instances avec beaucoup de plaisir et répondre aux questions de leurs membres.
Elle est également à votre disposition pour mener toutes les enquêtes que vous souhaitez lui confier, en application du troisième alinéa de l'article 58 de la LOLF et de l'article 14 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.
Ai-je besoin de rappeler qu'aujourd'hui ce n'est plus seulement un rapport annuel que nous vous remettons ? Ainsi, depuis 2002 et l'introduction des nouvelles dispositions législatives, ce sont 188 référés, 167 rapports particuliers, 5 rapports sur l'exécution budgétaire, 5 rapports sur la sécurité sociale, 4 rapports préliminaires et 44 autres rapports établis à la demande du Parlement, sur la base des deux lois organiques précitées, qui ont été remis aux deux assemblées.
Par ailleurs, la dynamique s'est radicalement accélérée. En 2002, nous consacrions un quart de notre temps de travail à ces travaux. En 2006, la proportion avait doublé et elle est, selon toute vraisemblance, encore appelée à s'accroître.
Et encore me suis-je abstenu de prendre en compte les rapports publics thématiques et autres travaux, qui ne relèvent pas directement de notre mission d'assistance, mais qui vous sont également communiqués.
En 2006, nous vous aurons ainsi remis 31 référés, 34 rapports particuliers. Nous avons réalisé, à votre demande, plusieurs enquêtes sur la gestion immobilière du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur les commissions placées auprès du Premier ministre, sur l'Agence nationale de valorisation de la recherche, sur les aides à l'emploi, sur l'Association française d'action artistique, sur la réforme de la tarification des établissements de santé et sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage. Vous avez d'ailleurs organisé un débat de contrôle budgétaire particulièrement approfondi - et nous nous en réjouissons -, sur le fondement de ce dernier travail. Nous sommes, bien entendu, très sensibles à cette initiative et très flattés que nos rapports puissent vous aider dans votre propre travail d'évaluation et de contrôle.
Nous nous sommes, par ailleurs et d'ores et déjà, mis en situation d'assumer celles de nos nouvelles compétences qui prennent effet cette année. Nous vous remettrons ainsi au printemps prochain quatre documents. Deux d'entre eux sont déjà connus de vous : le rapport sur les résultats, qui sera enrichi cette année, pour la première fois, des commentaires de la Cour sur les performances obtenues pour une vingtaine de programmes, et le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, qui actualisera et approfondira l'analyse contenue dans le présent rapport annuel. Le troisième document sera l'expression de notre opinion sur les comptes de l'État, rédigé au terme du processus de certification, et qui viendra en lieu et place du rapport sur les comptes réalisé l'an dernier. Nous vous remettrons enfin un quatrième document dans lequel nous exprimerons notre opinion sur les divers comptes du régime général de la sécurité sociale. Pour autant, comme les années passées, nous vous remettrons, à l'automne, le traditionnel rapport sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale.
S'agissant de la certification, je veux encore une fois rappeler en cet instant que nous ne concevons pas nos nouvelles missions comme des armes de censure ou de sanction d'une politique. Nous nous contenterons de nous prononcer sur la conformité et la fidélité des états comptables au référentiel que l'État s'est donné.
De façon plus générale, nous avons bien conscience que les réformes comptable et budgétaire qu'impose la LOLF sont lourdes et très ambitieuses. Les administrations - je leur en donne bien volontiers acte -, ont déjà fourni un effort énorme pour répondre à ces nouvelles exigences. Nous n'avons d'ailleurs pas manqué de souligner les progrès déjà réalisés. Nous travaillons dans une logique de partenariat et d'accompagnement de la réforme plus que de sanction. Les rencontres et les échanges avec les ministères sont plus nombreux et nous veillons à répondre à leurs propres attentes.
Nous avons ainsi nous-mêmes engagé de profondes réformes internes pour nous adapter aux enjeux de la LOLF. Dans l'esprit des préconisations du récent rapport de MM. Lambert et Migaud, nous avons spécialisé nos équipes ; nous distinguons mieux les différents types de contrôle. Ainsi, le domaine juridictionnel, la certification et l'examen de la gestion font l'objet de méthodologies, de contrôles, de rapports et de délibérés distincts.
De la même façon, nous souhaitons vous apporter le soutien que vous jugerez nécessaire pour assumer les nouveaux pouvoirs que vous confère la LOLF et nous voulons que notre contribution à vos travaux soit toujours plus fructueuse.
C'est pourquoi, comme je l'ai annoncé à l'occasion de la séance solennelle de la Cour, nous tiendrons désormais l'ensemble des parlementaires régulièrement informés de l'état de la liste de nos communications. Par ailleurs, nous assortirons la transmission de nos référés et rapports particuliers de synthèses explicatives.
La Cour entend, en outre, se donner les moyens d'une plus grande réactivité. Nous savons que nous devons nous adapter au rythme de vos travaux. C'est pourquoi nous demanderons la réduction des délais de contradiction avec les organismes contrôlés, délais qui expliquent pour une bonne part un décalage trop fréquent entre le temps de la Cour et le temps du Parlement, et nous nous efforcerons de ramener le délai moyen de réponses à vos demandes d'enquêtes à la durée habituelle des commissions d'enquête parlementaire. Dans certaines circonstances, une note d'information pourra vous être communiquée dans des délais encore plus courts.
Enfin, pour que nous soyons en mesure de répondre totalement à votre attente, il nous reste à trouver la procédure de concertation la plus appropriée pour nous permettre, s'agissant de l'évaluation de la performance, programme par programme, de nous engager sur les travaux dont vous aurez vous-mêmes signalé la priorité. Il serait absurde de procéder autrement : notre vocation est de vous assister. C'est à vous de dire vos besoins et vos choix. Nous saurons adapter nos programmes en conséquence.