Cet amendement a pour objet de prévoir au moins un pôle de l'instruction pour chacun de nos départements.
Il s'agit d'oeuvrer, dans le cadre de l'aménagement du territoire, afin de conserver les services publics dans nos départements, notamment les plus ruraux, en maintenant toute la substance humaine et sociale provenant des magistrats, de leurs équipes, ainsi que des avocats.
Le projet de loi prévoit que les futurs pôles de l'instruction seront fixés par voie réglementaire. Or il y a tout lieu de penser que ce sont les départements ruraux à faible population qui risquent, dans le cadre d'une réorganisation, d'en être privés.
La Chancellerie tente d'apaiser nos craintes en indiquant qu'il y aura 125 pôles et que « la plupart » des départements en seront dotés, ce qui n'est pas de nature à rassurer les départements qui en seraient privés et qui pourraient, selon certaines informations, être au nombre d'une dizaine.
Il est important de préciser que cet amendement n'a pas pour objet de s'opposer aux nécessaires réformes de la justice, tout particulièrement de la carte judiciaire, qui date d'un autre âge. Nous aurions pu, à cet égard, envisager un amendement de repli afin que, dans le cadre de cette réorganisation, les trente départements les moins peuplés de France soient dotés d'un pôle de l'instruction.
Ce qui nous interpelle, c'est que les départements souffrant particulièrement de la diversification et de l'évasion des services publics soient, une nouvelle fois, frappés par une réorganisation. Or, s'il est bien un domaine, régalien de surcroît, où l'aménagement du territoire pourrait être préservé dans sa proximité, c'est celui de la justice, tout particulièrement, au siècle de l'Internet, dans le choix de la localisation des pôles de l'instruction.
Est-il besoin de rappeler que le cadre et la quiétude de la ruralité sont, eux aussi, propices à la sérénité qui doit présider à toute instruction ?
Nous sommes bien conscients du sort qui sera réservé à notre amendement en raison de la composition de notre hémicycle, même ici, au Sénat, mais il me semble important d'attirer l'attention du Gouvernement sur l'impact économique d'une telle mesure dans un département rural et sur le besoin de proximité dans l'instruction de la justice, qui fait également l'objet de voeux de la part de nos concitoyens, à la ville comme à la campagne.
Je crains qu'une telle mesure ne vienne ajouter à la crise du service public, qui continue à « couver » actuellement dans nos campagnes. Il me semble qu'il est l'heure de se poser la question d'un aménagement cohérent de notre territoire.
À défaut de donner un avis favorable sur cet amendement, je vous remercie, monsieur le garde des sceaux, de bien vouloir rassurer toute une partie de nos concitoyens sur ce problème important.