Nous devrons intégrer plusieurs exigences qui sont totalement absentes des projets proposés jusqu’à présent, en particulier la question des États de transit, dans lesquels les demandeurs d’asile ne font que passer et où ils ne souhaitent nullement s’installer.
Monsieur le ministre, pour ces populations en transit, il est impératif de trouver un outil juridique simple, en lieu et place de la solution radicale que vous proposez, à savoir le retour forcé !
Il faut aujourd’hui se pencher sur cette question, comme il faudra examiner celle qui concerne les réfugiés climatiques. Il convient en effet d’adapter le cadre général de la politique d’asile aux situations urgentes de nature nouvelle. Je pense en particulier à ce flux important de réfugiés. Dans de telles circonstances, seule une refonte complète et inclusive du droit d’asile est susceptible de répondre aux situations spécifiques, comme celle que connaissent les réfugiés afghans.
Cela étant dit, est-il raisonnable aujourd’hui de renoncer à appliquer, en faveur des Afghans, la directive relative à la protection temporaire ? Au cours d’un débat qui s’était tenu ici même sur la politique d’immigration, quelques jours après la première vague de reconduites d’Afghans vers leur pays, reconduites que je continue de qualifier de scandaleuses, j’avais évoqué la possibilité de recourir à cette directive, adoptée en 2001 pour protéger les personnes fuyant les conflits des Balkans. Une telle directive est, à nos yeux, un exemple de la solidarité européenne, dont nous devons nous féliciter.
Pourquoi, dans l’attente d’un second « paquet asile », ne pas appliquer cette directive ou rédiger un nouveau texte permettant d’apporter une réponse en la matière ? Nous serions tout à fait honorés de l’« impulser » en Europe !
Je ne souscris pas entièrement aux arguments développés par M. Fauchon ni, d’ailleurs, à ceux du HCR, concernant l’applicabilité aux Afghans des critères prévus par cette directive. J’estime en effet que l’attribution de la protection temporaire aux ressortissants afghans est possible, car les critères fixés par la directive de 2001 ne paraissent pas cumulatifs. Je me souviens encore du débat qui s’était tenu à l’époque au Parlement européen, puisque j’en ai été l’une des actrices. Je vous demande d’ailleurs, mes chers collègues, d’en relire le compte rendu, ce qui vous permettra de constater la véracité de mes propos.
Personne ne peut le nier, l’Afghanistan connaît une situation de guerre, ce qui entraîne un afflux important, certes moindre que celui que nous avons connu en 2000, de réfugiés afghans. Nous devons oublier un instant la question du droit, ou plutôt la dépasser, pour évoquer le fond du problème, à savoir le courage politique nécessaire pour répondre à la situation posée.
Monsieur le ministre, vous n’avez pas jugé bon de protéger ces personnes, alors que, au même moment, le site internet de l’ambassade de France en Afghanistan recommandait aux Français de ne pas se rendre dans ce pays. Ce cynisme, nous sommes nombreux à ne pas le partager !
Le décret du 10 août 2005, qui a transposé en droit français la directive du 20 juillet 2001, peut être modifié dans les plus brefs délais. Rien ne vous interdit d’assouplir les conditions requises. Rien ne vous interdit de créer un régime sui generis pour la protection effective des populations afghanes. Rien n’interdit de mettre un terme au scandale qui consiste à renvoyer des personnes vers un pays en guerre. Rien, si ce n’est le manque de courage politique !