Nous sommes convaincus, monsieur le ministre, que le projet de loi dont nous débattons remet en cause, sous des apparences techniques, la péréquation tarifaire et que, à terme, nous serons amenés à constater des inégalités tarifaires sur notre territoire.
Aujourd'hui, en France, en dehors de quelques zones géographiques très spécifiques, chacun peut accéder à l'énergie et à la fourniture d'électricité sur la base d'un simple contrat, qui devient effectif au bout de quelques jours. Qu'en sera-t-il demain ?
Nous proposons donc de préserver, à l'avenir, la péréquation tarifaire, dispositif qui nous semble essentiel. Contrairement à nombre d'assertions entendues ici ou là, la déréglementation du secteur énergétique, appelée de ses voeux par la Commission européenne, n'a pas, pour l'heure, produit autre chose que des ruptures de charge et des hausses de tarifs !
Le retournement conjoncturel des prix des matières premières, gaz et pétrole entre autres, annonçant une tendance structurelle lourde de renchérissement, a en effet mis à mal les attendus de la directive de 2003, sauf à penser que c'est en termes de qualité de services amoindrie et de détérioration des conditions de travail des agents que la solution se trouve pour réduire les coûts variables de la production énergétique...
J'évoquerai, une fois de plus, à cet égard, l'exemple de la Grande-Bretagne, où l'on constate déjà l'introduction de tarifs différenciés selon les modes de paiement, ce qui conduit naturellement à pénaliser les titulaires de bas revenus.
Par ailleurs, les crises de pénurie qui sévissent sur les marchés de l'énergie entraînent l'apparition de phénomènes de spéculation, les premières n'allant pas sans les seconds.
L'électricité et le gaz sont pourtant - faut-il le rappeler ? - des biens vitaux, non substituables dans la plupart de leurs usages. En conséquence, la demande est peu sensible aux variations de prix. Devant ces hausses, que nul n'est en mesure de contester, les usagers sont bien sûr inégalement armés. La libéralisation du marché de l'énergie ouvre donc la voie à un rationnement par l'argent.
Nous tenons à souligner que la logique de bénéfice et de profit qui prévaut dans le secteur privé n'est pas compatible avec un tarif social de l'électricité et du gaz. On passera en effet d'une vente au prix de revient, comme le stipulait la loi de nationalisation de 1946, à la recherche de la rentabilité financière maximale.
Nous réitérons donc notre demande d'une pleine péréquation tarifaire, par souci de justice sociale et pour empêcher le rationnement par l'argent.