L'article 9 abroge les dispositions relatives au fonds de péréquation du gaz, créé par l'article 33 de la loi de 1946.
Dans l'exposé des motifs, vous n'avez pas manqué de rappeler que ce fonds n'avait jamais été réellement activé. Certes, mais Gaz de France était alors seul gestionnaire de la distribution sur son territoire et couvrait la grande majorité du territoire national. Cette entreprise pratiquait elle-même la péréquation de ses coûts de distribution. Or, c'est précisément au moment où vous encouragez l'ouverture à la concurrence de la distribution que vous voulez supprimer ce fonds !
Vous voulez ainsi mettre à mal un élément fondamental du service public de l'énergie, à savoir la solidarité nationale et la répartition des coûts sur l'ensemble du territoire. Ce principe avait pourtant une utilité réelle, celle de ne pas pénaliser les habitants en fonction de leur lieu d'habitation.
Il a joué un rôle important dans le développement du réseau de distribution de gaz, même si cette dernière n'est pas assurée dans l'ensemble des communes, dont plus de 8 000 sont desservies en gaz. La faiblesse des coûts d'installation dans les villes de taille moyenne est venue compenser, dans les investissements de l'entreprise, les coûts plus élevés enregistrés dans les villes très importantes ou, au contraire, dans les zones rurales.
On retrouve d'ailleurs ce principe de péréquation dans l'organisation d'autres services publics. Par exemple, pour ce qui concerne le service postal, un prix unique a été retenu pour le timbre sur l'ensemble du territoire national, sur proposition du député des Côtes d'Armor Glais-Bizoin.
Mes chers collègues, permettez-moi de vous faire remarquer que les élus qui voteront ce texte porteront une lourde responsabilité en termes d'aménagement du territoire ! Ce fonds aurait pu, en effet, aider au financement du développement de la desserte en gaz pour les communes le souhaitant et pour lesquelles le raccordement au réseau de distribution peut se faire à un coût raisonnable.
Mais la notion d'aménagement du territoire n'entre pas bien dans les cadres de la pensée libérale, qui prend en considération l'action avant tout en termes de gains financiers, et compte sur la main invisible du marché pour le reste.
L'aménagement du territoire, c'est au mieux une externalité positive, jamais un principe d'action en soi pour les économistes libéraux !
Les élus pourront malheureusement attendre longtemps les externalités positives du marché de la distribution du gaz !
Qui, en effet, viendra développer le réseau de gaz dans les zones où le raccordement serait envisageable mais coûteux, faute d'une péréquation entre les coûts de distribution ?
Qui, en outre, garantira qu'une fois les opérateurs privés positionnés sur le marché de la distribution du gaz, installés dans leur contrat de concession, ils ne pratiqueront pas des tarifs abusifs auprès de leurs clients ?
Ces questions n'ont-elles pas lieu d'être ?
Mais penser cela, c'est raisonner en termes d'égalité de traitement entre les usagers et en termes d'intérêt collectif, notions dont le marché fait peu de cas !
Raisonner en termes de péréquation sur l'ensemble du territoire, c'est vouloir que toutes les collectivités aient les mêmes droits, en l'occurrence celui de l'accès au réseau de distribution de gaz.
Avec ce texte, on s'éloigne d'une maîtrise publique de l'énergie fondée sur le souci de l'intérêt général et axée sur des considérations d'égalité et de justice sociale, comme elle devrait l'être en permanence.