Sous prétexte d'obéir aux injonctions européennes, le Gouvernement fait le choix de livrer au secteur marchand l'énergie, alors même que les enjeux liés à l'épuisement des ressources énergétiques fossiles et les risques liés au réchauffement climatique, que nous venons d'évoquer, imposent au contraire un renforcement des politiques publiques dans ce secteur.
Nous estimons également, conformément à ce qui a été décidé par les États membres au sommet de Barcelone, qu'un bilan devrait être réalisé sur toutes les directives d'ouverture à la concurrence.
Pourtant, jusqu'à présent, aucun bilan n'a vu le jour.
Vous nous répondrez, monsieur le ministre délégué, que la Commission se propose aujourd'hui de réaliser ce bilan. Nous avons peu d'illusions en la matière, et nous nous étonnons que vous vous référiez à un tel document. Comment en effet l'institution qui joue un rôle moteur dans la mise en oeuvre de la libéralisation des services publics serait-elle à même d'avoir l'objectivité nécessaire pour réaliser un bilan ? Vous qui prônez sans cesse l'indépendance des expertises et la stricte séparation des pouvoirs conviendrez que cela semble bien incompatible.
Ce que nous appelons de nos voeux, c'est l'établissement d'un rapport contradictoire, issu de débats larges, comportant des analyses comparatives entre les différents États membres sur l'efficacité de la régulation des prix, la stabilité des contrats d'approvisionnement avec des petits producteurs et la perspective de mise en place d'une Europe de l'énergie.
La réalisation de ce bilan semble donc nécessaire, a fortiori lorsque l'on sait que l'adoption de ce texte a pour objet principal de permettre la création d'un géant européen de l'énergie. C'est, en tout cas, ce que disent les partisans de ce texte, mais ledit géant est-il vraiment aussi grand qu'ils le prétendent ?
C'est également l'engagement qu'avait pris le Président de la République lors du sommet de Barcelone.
Monsieur le ministre délégué, vous avez vous-même, en novembre dernier, lors d'un débat sur la libéralisation du secteur de l'énergie, souligné l'importance de réaliser un bilan sur l'ouverture à la concurrence.
Comment ne pas constater que la situation est difficile, avec des prix en augmentation, un déséquilibre entre l'offre et la demande et une régulation trop nationale, alors qu'elle mériterait d'être européenne ?
Ce bilan, s'il était réalisé, permettrait non seulement de faire la preuve du pragmatisme auquel vous nous appelez souvent, mais aussi de mettre en évidence l'inefficacité des politiques actuelles, qui aboutissent dans les faits à remplacer les anciens monopoles publics par des oligopoles privés.
Ainsi, selon une étude de l'Observatoire international des coûts énergétiques, la libéralisation du marché dans le secteur énergétique européen est plutôt synonyme d'augmentations. En effet, tous les pays européens, à l'exception de l'Allemagne, ont subi des hausses à deux chiffres du prix de l'électricité.
Face à toutes ces contradictions dans le secteur énergétique, comment oser poursuivre le processus d'ouverture à la concurrence et de privatisation des entreprises publiques ?
Ce processus est synonyme de dessaisissement de la puissance publique, alors même que l'énergie est un bien commun de l'humanité et que la puissance publique doit en garantir l'accès à tous.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.