Intervention de Anne-Marie Payet

Réunion du 23 novembre 2007 à 10h20
Financement de la sécurité sociale pour 2008 — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire, amendement 40

Photo de Anne-Marie PayetAnne-Marie Payet :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme je vous le disais déjà à l'issue de l'examen de ce texte par notre Haute Assemblée en première lecture, si le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 n'est pas un texte de rupture fondamentale, il est tout de même porteur d'avancées notables.

C'est le cas de l'ONDAM, l'objectif national des dépenses de l'Assurance maladie, beaucoup plus crédible que le précédent et enfin rééquilibré entre l'hôpital et la ville.

C'est aussi le cas du passage à la T2A de 100 % des activités de médecine, chirurgie et obstétrique des établissements, qui est très en avance sur le calendrier initialement prévu.

Ce texte accompagne aussi la bonne nouvelle de l'amélioration des relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Le remboursement à la sécurité sociale de 5, 1 milliards d'euros est une excellente chose, de même que la compensation par le panier fiscal prévu en loi de finances des heures supplémentaires de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite loi TEPA.

De plus, l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a été l'occasion d'aborder des sujets très importants, annonciateurs, nous l'espérons, de réformes d'envergure.

C'est le cas en matière de retraites. Pour la branche vieillesse, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 est bien évidemment suspendu au grand rendez-vous programmé pour l'année prochaine. Néanmoins, les mesures de dissuasion des retraites anticipées prises dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale vont, à notre avis, indubitablement dans le bon sens.

Pour l'heure, je reviendrai sur un autre de ces sujets fondamentaux que l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 nous a permis d'aborder en profondeur. C'est l'un des sujets qui nous tient le plus à coeur, celui de la démographie médicale.

Comme nous le faisait remarquer Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, en matière de démographie médicale, le bilan est alarmant, tant les disparités de soins de premier recours peuvent être aujourd'hui marquées d'une zone géographique à l'autre. Il y a donc urgence à agir, mais dans quelle direction faut-il agir ?

Là encore, les débats que nous avons menés montrent que nous avons avancé sur la question.

Nous pouvons faire le constat suivant : si les médecins rechignent à s'installer dans certaines zones rurales ou urbaines, ce n'est pas du tout pour une question de rémunération. Les praticiens qui exercent en zone sous-médicalisée gagnent bien plus que leurs collègues en zones surmédicalisées. Autrement dit, les primes monétaires ne peuvent pas être d'une grande efficacité.

Si les médecins ont du mal à s'installer dans les déserts médicaux, c'est parce que les conditions d'exercice y sont difficiles. Le plus souvent, hélas ! ces zones ne se désertifient pas uniquement au regard de l'activité médicale. Souvent, ce sont des zones où l'activité économique est faible et où les services publics sont insuffisants et se raréfient.

Pour les médecins, ces conditions sont d'autant plus difficiles que la profession se féminise et aspire donc à exercer différemment.

La Réunion fait partie des zones sous-médicalisées, car le nombre de médecins pour 100 000 habitants est bien inférieur à la moyenne nationale. M. Christian Estrosi, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, a affirmé à plusieurs reprises, lors de son dernier passage dans notre île, sa volonté de doubler le numerus clausus, ce qui nous a tout à fait rassurés.

Face à ce constat, il apparaît clair que la meilleure manière de répondre au problème est de favoriser des modes alternatifs d'exercice de la médecine, c'est-à-dire de mener une réflexion sur la collaboration entre médecins et personnels paramédicaux, sur la délégation, donc, et sur les modalités de rémunération des praticiens. L'expérimentation de l'article 31 marque un premier pas dans cette dernière direction.

Pour notre part, nous croyons beaucoup aux maisons de santé. Ces maisons, qui rassemblent différents professionnels médicaux et paramédicaux, peuvent attirer les jeunes praticiens en zones de désertification médicale. Ce mode d'exercice minimise pour les professionnels de santé les risques financiers liés à l'installation.

Il est de nature à améliorer le temps médical d'une zone de recours aux soins ambulatoires et de désengorger les urgences des hôpitaux les plus proches.

Cependant, les structures collectives, telles que les maisons de santé, ont des coûts de fonctionnement supérieurs à ceux des cabinets individuels, car elles emploient du personnel administratif ou d'accueil.

Or, les maisons de santé ne reçoivent, aujourd'hui, généralement pas de subventions publiques. Lorsque c'est le cas, les aides publiques sont très aléatoires. Il arrive qu'elles bénéficient du fonds pour l'amélioration et la qualité des soins et de la dotation nationale de développement des réseaux, fonds et dotation qui ont été fusionnés pour former le FIQCS, le fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins.

Notre souhait initial était donc de faire adopter un amendement tendant à rendre systématique le financement par le FIQCS des maisons de santé s'installant dans une zone sous-médicalisée et des maisons de santé installées dans des zones qui seraient sous-médicalisées en leur absence. Malheureusement, cet amendement n'a pu être retenu, l'article 40 lui ayant été opposé.

Cela dit, avec le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons beaucoup avancé en matière de maisons de santé. Elles sont dorénavant définies dans le code de la santé publique ; elles sont explicitement incluses dans la réflexion sur la répartition territoriale de l'offre de soins primaires et, ce qui est très concret, elles peuvent participer à l'expérimentation de nouveaux modes de rémunération.

Pour revenir maintenant, plus précisément, sur les travaux de la commission mixte paritaire, même si nous regrettons certaines choses, nous estimons qu'ils sont très globalement satisfaisants.

Commençons par ce qui fâche un peu.

Nous regrettons que l'article 9 bis A, visant à instaurer une taxe sur les boissons sucrées, ait été supprimé.

Au moins aura-t-il permis de lancer le débat sur les taxes comportementales alimentaires à l'heure où l'obésité pourrait constituer une menace majeure en termes de santé publique.

Nous regrettons également que, dans l'article 39, la période pendant laquelle les ouvertures d'officines seront gelées dans les communes où auront eu lieu des regroupements de pharmacie ait été à nouveau portée à cinq ans au lieu de dix. L'allongement du délai à dix ans était le fait, notamment, d'un amendement de mon groupe. Cette durée de dix ans correspondait à la durée moyenne de remboursement des emprunts contractés par les pharmaciens. C'est la rentabilité de l'opération de regroupement qui pourrait en souffrir.

Cela dit, je suis très satisfaite que, toujours sur le sujet de la restructuration du réseau des officines, le délai avant lequel les dossiers complets déposés pourront être examinés, au regard de l'ancienne législation, ait été maintenu au 23 novembre. C'était important pour beaucoup de gens dont le projet n'attendait plus que d'être instruit.

Enfin, dans l'absolu, il est dommage que l'amendement de M. Nicolas About portant création dans les entreprises de plus de deux cent cinquante salariés d'un taux minimum pour l'emploi des personnes de cinquante-cinq ans ou plus n'ait pas été maintenu. Toutefois, nous nous rendons bien compte qu'il s'agissait plus d'un amendement d'appel destiné à pointer du doigt les difficultés d'emploi des seniors.

Peut-être le dispositif alternatif de bonus-malus que le Gouvernement s'est prochainement engagé à présenter apportera-t-il une solution intéressante à ce problème très sérieux.

Globalement, la commission mixte paritaire a conservé des dispositions qui nous paraissaient importantes et a permis d'améliorer encore le texte sur d'autres points.

Je ne peux que me réjouir que mon amendement visant à interdire la vente de produits du tabac en distributeurs dans les territoires d'outre-mer ait été maintenu dans le texte du PLFSS.

Il en est de même pour l'article consacré aux devis devant être fournis par les audioprothésistes à leurs clients. C'est un point sur lequel nous étions particulièrement intervenus.

Enfin, le maintien de la possibilité, pour les groupements de coopération d'établissements sociaux et médicosociaux, d'être accrédités « services à la personne » est une véritable avancée.

Au chapitre des améliorations apportées par la commission mixte paritaire, il faut noter un progrès dans l'information des clients de médecins exerçant en secteur 2.

Pour ce qui concerne la question du masquage des données du dossier médical personnel, il semblerait que la solution finalement adoptée par la commission mixte paritaire soit celle de la sagesse. La possibilité ouverte aux assurés de masquer des informations du DMP tout comme celle qui est offerte aux professionnels de santé d'avoir connaissance de l'existence d'un tel masquage sont en mesure de garantir la protection des droits et libertés individuelles, tout en préservant l'efficacité médicale du dispositif.

Pour toutes ces raisons, l'immense majorité du groupe de l'UC-UDF votera le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 tel qu'issu des travaux de la commission mixte paritaire. Pour ma part, je ne participerai pas au vote, en raison de mon opposition à l'article 46.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion