Intervention de Bernard Frimat

Réunion du 31 mai 2010 à 15h00
Application du cinquième alinéa de l'article 13 de la constitution — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire

Photo de Bernard FrimatBernard Frimat :

Cette mise en perspective nous permet donc de prendre conscience à la fois du caractère éminemment secondaire de la question posée et de son importance constitutionnelle. Quelle position adopter face à cette opposition curieuse, sept sénateurs contre sept députés ?

Nous connaissons sinon l’issue, du moins l’itinéraire…

Nous allons, nous, Sénat, confirmer la position du Sénat, et, M. le ministre ayant affirmé qu’il appliquerait la Constitution, ce dont nous ne doutions pas, le texte va repartir à l’Assemblée nationale, qui tranchera, en dernière lecture.

On peut penser sans trop risquer d’être démenti que l’Assemblée nationale confirmera sa position. Comme nous sommes en présence d’une loi organique, c’est le Conseil constitutionnel qui tranchera et rendra, en définitive, l’interprétation qu’il considère comme bonne. L’Assemblée nationale, dont l’interprétation ne sera pas confirmée, continuera au fond d’elle-même à penser qu’elle avait raison ! §Mais le Conseil constitutionnel aura choisi.

Pour notre part, nous reprenons l’argumentation qu’ont développée M. le président Hyest, en commission, et M. le doyen Gélard ainsi que Nicole Borvo Cohen-Seat, à l’instant : puisque l’on autorise la procuration pour la révision constitutionnelle, qui constitue l’acte plus important, à savoir l’élaboration de la loi suprême, pourquoi l’interdire dans le cadre d’un avis émis par une commission compétente ? Je sais bien que, dans le cas, impossible, disons-le, où l’on trouverait ces trois cinquièmes de votes négatifs, cela n’irait pas sans emporter un certain nombre de conséquences. Mais ce n’est qu’un avis, tout de même !

Or, quand on relit l’article 27 de la Constitution, sur lequel les députés fondent leur argumentation, on voit qu’il ne concerne jamais le fond, c'est-à-dire que l’on n’y trouve jamais d’énumération des sujets sur lesquels il serait impossible de donner procuration. Le seul cas, vous l’avez rappelé, pour lequel une telle interdiction est prévue, concerne, à l’article 68 de la Constitution, la destitution du chef de l’État. Mais c’est la Constitution elle-même qui le prévoit.

Quant à l’ordonnance organique qui découle de l’article 27 de la Constitution, elle ne cite que des problèmes de forme : cas de force majeure, service militaire, missions à l’étranger, notamment.

La position de nos collègues députés revient donc, dans le cadre d’une loi organique, à priver de son droit de vote un parlementaire qui se trouverait dans un cas de force majeur !

Or, selon moi, il n’est pas du pouvoir d’une assemblée, fût-elle aussi respectable que l’Assemblée nationale et aussi persuadée qu’elle de son bon droit et de sa primauté constitutionnelle sur le Sénat, de priver un parlementaire, représentant du peuple, de la possibilité d’utiliser son droit le plus élémentaire, c’est-à-dire son droit de vote.

Notre position est très claire : nous soutenons la position défendue par le rapporteur, comme nous l’avons fait lors de la commission mixte paritaire. Nous nous abstiendrons sur le texte parce que nous votons sur l’ensemble, mais le Conseil constitutionnel tranchera. En effet, il n’apparaît pas indispensable d’ajouter une quatrième, voire une cinquième lecture sur ce sujet qui, si passionnant soit-il, reste tout de même d’une importance relativement secondaire par rapport à d’autres questions qui peuvent être débattues par le Parlement. Je crois que nous y avons consacré suffisamment de temps.

Telle est, mes chers collègues, la position du groupe socialiste.

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