Intervention de Jean-Pierre Vial

Réunion du 31 mai 2010 à 15h00
Dialogue social dans la fonction publique — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Jean-Pierre VialJean-Pierre Vial, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Sénat est aujourd’hui saisi du dernier volet du triptyque « dialogue social », après le vote de la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale dans le secteur privé et l’adoption de loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental et sa composante « salariale ».

Ce projet de loi constitue une étape nouvelle et importante. Résultat d’un accord négocié entre les pouvoirs publics et les organisations syndicales, il modernise profondément la concertation.

Mais le projet de loi déborde de son objet initial pour aborder divers aspects du statut de la fonction publique par des ajouts divers et d’importance inégale.

C’est ainsi que la commission des affaires sociales s’est saisie pour avis, sur le rapport de notre collègue Sylvie Desmarescaux, de l’article 30 supprimant le classement en catégorie active des corps et cadres d’emplois d’infirmiers et de personnels paramédicaux accédant à la catégorie A.

Le texte a été déposé le 1er avril 2009 sur le bureau de l’Assemblée nationale, qui l’a adopté le 27 avril 2010. Il comporte trois parties distinctes.

La première partie est consacrée à la rénovation du dialogue social, transcription d’un accord signé entre les partenaires sociaux à l’origine du projet de loi.

La deuxième partie, c'est-à-dire le volet « infirmières », introduit par lettre rectificative adoptée en conseil des ministres le 23 février 2010, constitue la mise en œuvre d’un engagement du Président de la République.

Enfin, la troisième partie contient des retouches au statut dans le sens des évolutions souhaitées par le Gouvernement, votées par l’Assemblée nationale.

L’Assemblée nationale a notamment adopté les fondements législatifs de la nouvelle politique de rémunération des agents publics par la prise en compte dans le régime indemnitaire de la performance individuelle du fonctionnaire et de la performance collective des services, la création d’un grade à accès fonctionnel dans les corps et cadres d’emplois de la catégorie A.

La commission des lois du Sénat a tenu à ce que les évolutions souhaitées se fassent dans le respect des particularismes : « ratifier » l’accord du 2 juin, oui, mais sans niveler la diversité des fonctions publiques, monsieur le ministre ; nous avons eu l’occasion d’en parler à plusieurs reprises.

Il a été volontiers pris acte des négociations conduites avec succès par le Gouvernement. Elles aboutissent sans conteste à une modernisation, dans le cadre légal, du dialogue social dans la fonction publique, qui doit en améliorer les pratiques.

Cependant, l’unité ne doit pas être l’unification.

La rénovation entreprise ne doit pas conduire à niveler les particularismes des trois fonctions publiques – fonction publique de l’État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière –, qui tiennent notamment au cadre d’exercice des agents.

À l’État, employeur unique et pour tout dire « désincarné », s’oppose la réalité du dialogue social dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale, qui réunit responsables et délégués d’établissements et de collectivités.

La suppression du paritarisme ne doit pas conduire à une dilution de ce dialogue.

La commission a apprécié l’avancée réalisée à l’Assemblée nationale pour atténuer la radicalité de la suppression du paritarisme numérique dans la fonction publique territoriale en offrant à chaque collectivité la possibilité de la maintenir dans les comités techniques.

La commission a prévu la même règle pour les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Elle a renforcé l’articulation entre le Conseil commun et le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. À cet effet, elle a, d’une part, prévu dans l’instance inter-fonctions publiques la présence de droit du président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et, d’autre part, précisé la compétence matérielle du Conseil commun en en excluant l’examen des textes spécifiques propres à chaque fonction publique, notamment les décrets d’application des modifications du statut général. La commission a complété cette coordination en prévoyant la participation aux séances, sans voix consultative, du président du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière.

Le CSFPT ne doit pas être dessaisi des sujets relevant de la fonction publique territoriale : il doit pouvoir émettre un avis sur les orientations des nouveaux dispositifs, quand bien même ceux-ci relèveraient du Conseil commun.

Il ne s’agit ni d’affaiblir celui-ci ni de s’opposer aux convergences nécessaires entre les trois versants de la fonction publique ; il s’agit de reconnaître l’identité de chacun et de préserver un fonctionnement harmonieux des trois versants de la fonction publique.

La commission a complété le volet « dialogue social », en premier lieu, pour ajuster la représentation des personnels dans les instances de la fonction publique hospitalière et, en second lieu, pour préciser l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions.

Elle a tenu compte des résultats des élections aux comités consultatifs nationaux, qui représentent les personnels de direction et les directeurs des soins pour la répartition des sièges au CSFPH. La même précision a été apportée pour la période transitoire.

La commission a exclu les agents des corps de direction du collège « personnels » des comités techniques des établissements hospitaliers et sociaux et médico-sociaux. Recrutés et gérés à l’échelon national et, à ce titre, relevant d’un comité consultatif national, ces agents président les comités ou peuvent être amenés à suppléer le président.

La commission a enfin modifié le dispositif d’entrée en vigueur des nouvelles règles de désignation des membres des instances consultatives dans les trois versants de la fonction publique. Ces ajustements doivent permettre au Gouvernement d’organiser l’harmonisation voulue des cycles électoraux.

Une première étape interviendrait à la mi-2011, avec les élections dans la fonction publique d’État et dans la fonction publique hospitalière, pour parvenir à la convergence à la fin de 2014 avec la fonction publique territoriale.

En un mot, la nécessaire convergence des statuts de la fonction publique ne doit pas être une raison de supprimer les originalités qui caractérisent et enrichissent chacune d’elle, en particulier dans l’exercice du dialogue social.

Réformer le régime de retraite des infirmières en toute transparence, tel est l’objet de l’article 30.

La commission des lois a décidé de s’en remettre à la commission des affaires sociales, saisie pour avis, pour l’examen de l’article 30 fixant les conséquences pour leur retraite de l’accession en catégorie A des personnels infirmiers et paramédicaux du secteur public.

Je rappelle que l’objet de la réforme est, d’une part, de classer les personnels infirmiers en catégorie sédentaire, en contrepartie de leur intégration à la catégorie A par application du dispositif « LMD » et de la revalorisation salariale correspondante ; d’autre part, d’ouvrir un droit d’option aux personnels en place, aujourd’hui classés en catégorie B en fonction à la date de publication de la loi, entre le maintien de leur situation actuelle en classe active ou l’intégration à la catégorie A en passant en catégorie sédentaire.

Tout en reconnaissant la nécessité d’harmoniser la mise en place du dispositif « LMD » avec les personnels en activité, votre rapporteur s’interroge sur les incidences de l’exercice du droit d’option sur les effectifs, que nul aujourd’hui n’est en mesure d’évaluer. En effet, un effet mécanique pourrait résulter de l’exercice du droit d’option par une partie des agents demandant leur mise à la retraite plutôt que de s’engager sur le prolongement de leur activité.

Or, dans ce métier plus qu’ailleurs, l’expérience est irremplaçable et la transmission des savoirs est précieuse pour la formation des jeunes infirmiers et la bonne marche des services. La disposition proposée devrait permettre le maintien en fonction des personnels de façon à « lisser » les à-coups de la pyramide des âges et atténuer les difficultés de recrutement déjà constatées.

Ainsi que nous avons eu l’occasion de l’évoquer à plusieurs reprises, j’attire l’attention du Gouvernement, madame le ministre, sur la nécessité impérieuse de permettre aux agents d’opter en toute clarté, c’est-à-dire de disposer de toutes les informations concernant leur situation personnelle.

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