Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 10 décembre 2004 à 15h15
Loi de finances pour 2005 — V. - mer

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme pour l'ensemble des autres budgets, le budget de la mer n'échappe pas à la politique de restriction budgétaire engagée par le Gouvernement.

A l'exception de l'ENIM, dont la hausse des charges était prévisible, les crédits relatifs à ce budget ne progressent que très faiblement. Sur fond de coupes dans certaines lignes budgétaires, cette faible progression ne permettra ni de renforcer les efforts en matière de sécurité - bien que, par exemple, de nouveaux emplois soient nécessaires dans les CROSS, dans le cadre du nouveau plan de sécurité - ni d'engager de nouvelles actions pour 2005.

Globalement - et malheureusement -, ce budget n'est pas à la hauteur des défis posés par le développement durable.

C'est une politique plus volontariste qu'il faudrait mener, afin de procurer à l'ensemble de la filière du transport maritime les soutiens nécessaires à son développement, dans la perspective d'un rééquilibrage intermodal.

D'après le rapport de la DATAR, Construire ensemble un développement équilibré du littoral, le transport maritime ne représente que 2 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone, contre 17 % pour la route.

Les communistes ont été les premiers à mettre l'accent sur la nécessité du développement du cabotage. Mon collègue et ami François Liberti y a d'ailleurs consacré un rapport en montrant tout l'intérêt. Une telle option, qui participe du rééquilibrage intermodal, requiert cependant des infrastructures spécifiques, notamment en matière ferroviaire, afin de permettre des connexions avec les hinterlands, connexions indispensables à l'acheminement des marchandises.

En ce domaine, les efforts tardent toujours et les parts de marché de la route continuent de grimper.

Par ailleurs, vous soulignez, monsieur le rapporteur pour avis, que les ports français souffrent d'un déficit de compétitivité criant face aux grands ports européens, en raison notamment du fait d'une desserte ferroviaire insuffisante et d'encombrement des conteneurs.

Ceci, au fond, révèle l'absence d'une véritable politique portuaire globale et est la conséquence directe des choix restrictifs en matière budgétaire.

Le retard important pris dans l'exécution des contrats de plan Etat-région est tout à fait symptomatique de cette logique de restriction budgétaire, qui se manifeste aussi à travers des reports, des gels et des annulations de crédits.

Dans ma propre région, la Bretagne, le conseil économique et social a manifesté une vive inquiétude en raison de l'incertitude qui pèse sur l'achèvement des programmes prévus pour la fin de l'année 2006. Le taux de réalisation du volet portuaire, qui concerne quatre ports d'intérêt national - Brest, Concarneau, Lorient et Saint-Malo -, n'est que de 19 %, alors qu'il devrait atteindre 57, 2 %. En 2003, la sous-consommation des crédits en matière portuaire atteint plus de 26 millions d'euros. Où en sont exactement les dossiers d'exécution des projets dans les ports d'intérêt national ? Ne risque-t-on pas de perdre les financements européens ? Dans ces conditions, d'autres choix en faveur de ports régionaux ne sont-ils pas préférables ?

Où en est-on du volet portuaire, concernant la convention additionnelle « marée noire et intempéries » qui porte sur près de 75 millions d'euros de crédits supplémentaires, dont 40 millions provenant de l'Etat ?

Le conseil économique et social de Bretagne constate aussi que, à plusieurs reprises, la région a financé des programmes au-delà de ce qui était prévu, et ce afin de pallier la défaillance de l'Etat. Le taux actuel d'exécution de la région, soit 53, 3 %, est nettement supérieur à celui de l'Etat, qui n'atteint que 42, 6 %. Doit-on craindre, monsieur le secrétaire d'Etat, que de telles avances se transforment de fait en véritables dépenses supplémentaires ? Comment, dès lors, envisager des redéploiements de crédits dans le cadre, par exemple, des engagements pris lors du comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, le CIADT, du 18 décembre 2003 ?

Au final, on a de bonnes raisons de croire que les contrats de plan Etat-région sont devenus des variables d'ajustement de la politique budgétaire de l'Etat. Cela compromet le dynamisme économique régional. Dans le même temps, les charges des collectivités territoriales s'alourdissent.

Nous ressentons ici clairement, à travers l'exemple des contrats de plan, les effets d'une politique de décentralisation qui a été menée dans la précipitation et qui n'est rien d'autre que la mise en oeuvre du désengagement budgétaire de l'Etat. Un tel empressement pose de multiples problèmes. Je voudrais vous faire part de l'un d'entre eux. Il s'agit de la propriété des voies ferrées des ports. A qui sera-t-elle transférée ? N'y a-t-il pas, dans le cadre de la décentralisation, un risque de rupture de la continuité du réseau ferré ? En dernière instance, Réseau ferré de France, RFF, ne devrait-il pas en récupérer la propriété ?

Pour terminer, je vous serais reconnaissant de nous informer de l'évolution du dossier relatif à la libéralisation des services portuaires, qui avait été bloqué, à la fin de l'année 2003, par le Parlement européen. La nouvelle mouture répond-elle mieux, notamment en matière de sûreté et de sécurité portuaires, aux soucis exprimés par les professionnels du secteur ?

Et avons-nous la garantie que la proposition de loi relative à la création du registre international français, qui sera finalement débattue en janvier à l'Assemblée nationale, préservera l'emploi ? L'effectif d'exploitation réellement embarqué sera-t-il composé obligatoirement d'un minimum de 35 % de Français ?

Au-delà de ces interrogations, et pour les raisons que nous venons de développer, vous comprendrez que le groupe communiste républicain et citoyen vote contre ce budget.

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