Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des transports terrestres inscrit dans le projet de loi de finances pour 2005 s'élèvera à 7, 6 milliards d'euros en moyens de paiements, soit une augmentation d'un peu plus de 1 % par rapport à 2004.
Le budget « actif » des transports terrestres représente environ un tiers du montant total de ce budget, les deux autres tiers étant constitués de dotations que je qualifierai de « captives » puisqu'un tiers est consacré au régime de retraite de la SNCF et un autre tiers aux charges d'exploitation et de désendettement du ferroviaire.
L'innovation, en 2005, réside dans la nouvelle ressource « débudgétisée », constituée par l'Agence de financement des infrastructures de transport en France, qui devrait être recevoir 635 millions d'euros. La création de l'AFITF témoigne de la priorité que le Gouvernement entend donner à l'investissement dans le domaine des transports terrestres.
La France a retenu, on le sait, une série de projets routiers et ferroviaires représentant un programme de travaux d'environ 20 milliards d'euros, à réaliser d'ici à 2012.
L'agence est un établissement public qui sera chargé de financer les contributions publiques de l'Etat pour un certain nombre d'opérations, notamment celles qui ont été prévues par le CIADT du 18 décembre 2003.
Dans le domaine ferroviaire, ce CIADT a confirmé plusieurs projets : la deuxième phase du TGV-Est ainsi que les lignes à grande vitesse Nîmes-Montpellier, Rhin-Rhône, Sud-Europe-Atlantique et Bretagne, auxquelles il convient d'ajouter des études concernant la liaison Lyon-Turin.
L'article 41 du projet de loi de finances prévoit pour l'Agence, au titre de 2005 : une dotation en capital de 200 millions d'euros, un montant de dividendes versés par les sociétés d'autoroutes à hauteur de 280 millions d'euros, un montant de redevance domaniale versée par les sociétés d'autoroutes à hauteur de 155 millions d'euros.
A l'évidence, la création de l'AFITF, qui fut particulièrement appréciée au Sénat, tendra à sécuriser les dotations de l'Etat affectées aux grandes infrastructures.
On se rappelle que la commission des affaires économiques s'était élevée avec vigueur contre la suppression, par la loi de finances de 2001, du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, qui avait une finalité comparable.
J'en viens au plan « fret » de la SNCF.
Lors de son audition devant la commission, le président de la SNCF, M. Louis Gallois, a insisté sur l'importance de ce programme dans la stratégie de l'entreprise.
Le volume d'activité du fret de la SNCF a baissé de 6, 4 % entre 2002 et 2003, passant de 50 milliards à 46, 8 milliards de tonnes par kilomètre. Pour 2005, l'opérateur prévoit 44 milliards de tonnes par kilomètre, soit, au fil des années, une baisse en valeur absolue du tonnage transporté.
Le plan « fret » comporte quatre orientations : la refonte de l'outil de production, qui serait désormais centré sur cinq axes seulement ; une amélioration de la productivité grâce à des investissements d'un montant de l'ordre de 600 millions d'euros ; une politique commerciale plus stricte, tendant à mieux rentabiliser les trafics avec des majorations des tarifs ; une offre élargie sur le plan international, en coopération avec d'autres opérateurs.
Le coût du plan « fret » serait de 1, 5 milliard d'euros, dont 800 millions d'euros supportés par l'Etat et 700 millions d'euros à la charge de la SNCF.
Le volet financier du plan fait actuellement l'objet d'une enquête de la part des services de la concurrence de la Commission européenne.
Nous attendons une réponse pour les semaines qui viennent. Si le blocage devait perdurer, il en coûterait environ 40 millions d'euros de frais financiers à la SNCF.
S'agissant du financement du secteur ferroviaire, je tiens tout d'abord à apporter quelques précisions sur la contribution de l'Etat, en 2005, à la SNCF et à Réseau ferré de France, RFF.
La dotation de 3, 3 milliards d'euros de l'Etat à la SNCF se décomposera de la manière suivante : 109 millions d'euros au titre des tarifs sociaux, 677 millions d'euros au titre du service annexe d'amortissement de la dette et 2, 5 milliards d'euros au titre des charges de retraite.
La dotation de 3, 2 milliards d'euros à Réseau ferré de France se décomposera de la manière suivante : 1, 2 milliard d'euros au titre de la contribution aux charges d'infrastructures ferroviaires, 244 millions d'euros en subventions d'investissement, 800 millions d'euros au titre de la contribution au désendettement et 900 millions au titre des investissements de régénération du réseau.
Par ailleurs, on observe deux flux financiers de sens contraire et d'un montant comparable : le financement de RFF par la SNCF, d'une part, avec les péages d'infrastructures, soit 3 milliards d'euros prévus en 2005, et le financement la SNCF par RFF, d'autre part, au titre de la « convention de gestion » qui finance la gestion déléguée du réseau par la SNCF, pour un montant de 2, 5 milliards d'euros en 2005.
La contribution de l'Etat au désendettement de RFF - 800 millions d'euros - a remplacé en 2004 les dotations annuelles en capital, dont le montant cumulé s'élevait à 8, 9 milliards d'euros au 31 décembre 2002.
La subvention à la régénération du réseau de RFF - 900 millions d'euros - permet, quant à elle, la prise en charge d'investissements qui, jusqu'à présent, étaient financés par la seule augmentation de l'endettement de RFF !
Il convient de toujours garder à l'esprit quelques données structurelles.
Tout d'abord, le seul pôle rentable de la SNCF est celui des trains à grande vitesse.
Ensuite, le pôle des trains classiques, dits « Corail », que la SNCF souhaite baptiser « trains interrégionaux », ou TIR, perd chaque année de l'argent : environ 150 millions d'euros en 2004, dont 50 millions pour les seules lignes Bordeaux-Lyon, Nantes-Lyon, Quimper-Bordeaux et Lille-Strasbourg.
Enfin, le fret pouvait être considéré, avant le lancement du plan « fret », comme en quasi-faillite, puisque, en 2003, par exemple, il a enregistré une perte de 451 millions d'euros, soit 20 % du chiffre d'affaires global du fret.
Ces constats montrent l'importance des deux orientations stratégiques de l'opérateur ferroviaire dans les années à venir.
La première est la réorganisation du pôle fret. A cet égard, il faut rappeler que, dès 2007, le transport de fret devrait être « libre » sur les réseaux de l'Union européenne. Mon rapport contient toutes les précisions utiles sur la mise en oeuvre des différentes directives ferroviaires.
La seconde orientation réside dans une demande de prise en charge partielle des lignes interrégionales classiques par les régions.
En ce qui concerne la RATP, mon rapport écrit apporte des précisions sur les trafics et sur la situation financière de l'entreprise. Je tiens toutefois à indiquer que la RATP a enregistré, en 2003, un résultat courant bénéficiaire de 10, 2 millions d'euros, en baisse de 10 millions d'euros par rapport à 2002, en raison des grèves des mois de mai et juin 2003, qui ont provoqué une réduction importante des recettes voyageurs.
En 2003, les recettes de la RATP se sont établies à 3, 6 milliards d'euros, dont plus de la moitié au titre de la subvention versée par le Syndicat des transports d'Ile-de-France, le STIF, qui exerce une responsabilité directe dans l'exploitation des transports collectifs en Ile-de-France.
On rappellera que le contrat signé le 12 juillet 2000, entre le STIF et la RATP, visait à améliorer la qualité du service rendu aux voyageurs et à assurer une meilleure responsabilisation de l'entreprise quant à la maîtrise de ses charges.
En conclusion, je dirai que l'effort accompli par les pouvoirs publics dans le domaine des investissements me paraît devoir être salué eu égard à l'actuel contexte de rigueur budgétaire.
Les choix effectués par le CIADT du 18 décembre 2003, tout comme la création de l'AFITF, qui vise à sécuriser et à pérenniser le financement d'un certain nombre de grands projets, constituent des orientations qui vont dans le sens des souhaits que la commission des affaires économiques a maintes fois formulés.
Pour ces raisons, elle a émis un avis favorable quant à l'adoption des crédits du budget des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 2005.
Je vous poserai toutefois deux questions, monsieur le ministre.
En premier lieu, la SNCF souhaite manifestement que l'Etat, et surtout les régions, participent au financement des liaisons dites interrégionales, assurées par des trains Corail. Quelle est la position officielle du Gouvernement sur ce sujet ?
En second lieu, lors de la manifestation du jeudi 25 novembre dernier, les représentants d'une organisation syndicale de cheminots - la CGT - ont clairement laissé entendre que l'accord sur le dialogue social et la prévention des conflits, signé le 28 octobre, ne devait en aucun cas remettre en cause le droit de grève des cheminots, tel qu'il est habituellement exercé. Y aurait-il plusieurs lectures de l'accord ? Quelle est, en tout cas, celle du Gouvernement ?