Quant à M. Marleix, il déclarait : « Il faut être agrégé de droit public pour comprendre qui est qui et qui fait quoi. L’urgence est là : il faut simplifier l’architecture territoriale. » Or nous nous acheminons vers une overdose de complexification.
Monsieur le ministre, le budget que vous nous présentez n’a rien pour soulever l’enthousiasme. L’action Attractivité économique et compétitivité des territoires subit une érosion de 35 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 20 millions d’euros en crédits de paiement. Autant d’implications en moins pour la DATAR ! L’action Développement solidaire et équilibré des territoires voit ses crédits de paiement amputés de 16 millions d’euros. Quant à la dotation d’équipement des territoires ruraux, elle n’apporte rien de plus au cumul de la dotation de développement rural et de la dotation globale d’équipement.
Le Gouvernement applique aux collectivités territoriales sa révision générale des politiques publiques, multiplie les restructurations, par exemple pour les hôpitaux, dégrade la qualité du service public, considérant que les services publics sont le problème de la France parce qu’ils nuisent à sa compétitivité.
N’oublions pas qu’une nation vivante, ce sont d’abord des territoires et des habitants traités de manière égale et considérés comme une richesse ; c’est un pacte de confiance et un contrat territorial ; ce sont des solidarités et des efforts partagés. Tous ces éléments sont au service d’un grand dessein, d’un avenir considéré comme une marche vers le progrès, et non comme un retranchement, la fin des ambitions collectives ou la démission.
Le budget de la mission que nous examinons nous renvoie à la situation de la collectivité ayant pleinement compétence en matière d’aménagement du territoire, autrement dit la région. Le comité Balladur proposait de « renforcer le rôle des régions françaises, notamment au regard de leurs homologues étrangères. » En réalité, les régions sortent exsangues de la réforme territoriale, à l’image du département, dont la capacité à agir fond comme neige au soleil.
Ainsi, en 2009, pour la première fois de leur histoire, les conseils généraux ont réduit de 3, 95 % leurs dépenses d’équipement brut, c’est-à-dire les investissements effectivement concrétisés. C’est un signe incontestable de leurs difficultés actuelles.
La réforme des collectivités traduit un objectif unique : envisager l’avenir au travers d’un dialogue simplissime, un face-à-face entre l’État et les métropoles, laissant les espaces interstitiels à un sort peu enviable, celui du chacun pour soi ou de la débrouillardise. Tout autre échelon est considéré comme un obstacle, voire un contre-pouvoir, qu’il importe de fragiliser ou de faire disparaître à terme.
Or, pour que notre pays soit attractif, il faut que tout son espace le soit ; la reprise d’une croissance économique durable nécessite des collectivités fortes, déployant leurs services à la population et investissant pour l’équipement de la nation.
En matière de technologies de l’information et de la communication, quel hiatus entre, d’une part, les déclarations officielles et offensives et, d’autre part, leurs déclinaisons concrètes, d’une lenteur qui suscite l’impatience, voire la colère ! Le comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire, le CIADT, caractérisé par cette priorité numérique, remonte pourtant à 2001, voilà presqu’une décennie !
Les annonces du CIADT du 11 mai dernier sont plus qu’écornées par leur traduction budgétaire pour 2011. Le sort réservé aux zones de revitalisation rurale suscite nombre d’inquiétudes, alors que ces zones devraient s’inscrire dans la durée.
La réalité est cruelle, que ce soit en matière d’infrastructures de transport, de crédits accordés par le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, de logement, d’offre de soins. Le FNADT subit, lui aussi, une restriction de ses moyens. Les projets de pôles d’excellence rurale sélectionnés ou en cours d’arbitrage risquent fort de connaître une réponse budgétaire très insuffisante.
Cette réalité bien terne vient se greffer sur une toile de fond : la crise sans précédent que traverse, depuis trois ans, le monde agricole, en particulier toutes les filières de l’élevage.
Mes chers collègues, l’État est défaillant et exacerbe les fractures. Quelle est sa stratégie pour que la politique d’aménagement post-2013 ne soit pas réorientée sur les seuls grands pôles urbains ? A-t-il des idées claires en matière de cohésion territoriale et de péréquation ?
En effet, les projets des territoires sont plombés par l’étranglement des départements et des régions. La soumission à l’incontestable effet de ciseau entre l’accroissement des dépenses, sociales en particulier, et le gel des dotations est la traduction d’un véritable coup de poignard budgétaire, alors que la création du conseiller territorial insulte le bon sens.
À l’image du projet de budget pour 2011, cette politique témoigne d’une coupable indifférence face au désarroi non seulement des élus locaux, mais aussi des populations et des territoires qu’ils représentent.