Intervention de François Patriat

Réunion du 4 décembre 2010 à 14h30
Loi de finances pour 2011 — Politique des territoires

Photo de François PatriatFrançois Patriat :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, mon collègue et ami Martial Bourquin, retenu à Audincourt, a souhaité que je l’associe à mon propos, dans ce débat sur la mission « politique des territoires ».

Monsieur le ministre, en une heure et demie, un samedi après-midi, dans les conditions que chacun sait, traiter de la politique de l’aménagement du territoire, sujet vaste et transpolitique, sur lequel, au-delà de nos oppositions, mes chers collègues, nous pouvons trouver des voies de convergence, revient à tronquer, rétrécir le débat, qui ne peut être à la hauteur de l’enjeu que chacun veut défendre.

J’ai entendu des propos flatteurs à l’égard de telle ou telle mesure et, dans le même temps, toujours les mêmes récriminations sur les territoires qui seraient pauvres, déshérités et oubliés. Je me demande où est l’urgence : est-elle à la ville ou à la campagne ? J’entends les représentants de la campagne parler de paupérisation, ceux du territoire urbain dire l’urgence face à la violence, à la pauvreté et aux difficultés qui s’installent. Une telle différenciation n’est pas non plus à la hauteur de l’enjeu.

Dans le peu de temps qui m’est imparti, je me livrerai, moi aussi, à l’examen quelque peu rétréci des crédits.

Monsieur le ministre, cette politique de l’aménagement du territoire, déclinée sur plusieurs chapitres, dénote un manque de confiance et d’ambition pour nos territoires.

Avec une diminution des crédits de 5 % en autorisations d’engagement et de 10 % en crédits de paiement, ainsi qu’une nouvelle baisse de 10 % attendue dans les deux prochaines années, l’État se donne de moins en moins les moyens de faire vivre une politique dynamique d’aménagement du territoire.

Je l’avais déjà constaté avec votre prédécesseur, aujourd’hui garde des sceaux, M. Michel Mercier, dont je ne conteste pas, loin de là, les qualités humaines. Lors de sa venue sur le territoire que j’ai momentanément en charge, il s’était dit disposé à accorder des crédits pour telle voie, tel nœud routier, telle démolition, telle construction ou plan, mais sans vision globale de l’aménagement du territoire.

C’est en ce sens que le désengagement de l’État est manifeste.

Monsieur le ministre, comme l’avait fait votre prédécesseur l’année dernière, vous nous répondrez sans doute, pour faire passer l’amertume de la potion, que la politique des territoires va bien au-delà des crédits dédiés à cette mission. Néanmoins, les chiffres sont sans fard. Nous pouvons vous rétorquer, comme nous l’avons fait l’an passé, que le désengagement de l’État va, lui-aussi, bien au-delà de cette mission.

Je pense aux ravages de la RGPP, qui viennent d’être évoqués, au gel des dotations et à la réforme territoriale qui plonge les investissements dans l’insécurité, au ferroutage abandonné, autant de politiques gouvernementales qui vont à rebours des objectifs affichés par cette mission.

Monsieur le ministre, ne prenez pas cette remarque pour une attaque personnelle – vous savez qu’en dépit des désaccords qui peuvent nous opposer je sais reconnaître les mérites de l’action que vous menez –, mais je suis de ceux, et il en est d’autres ici, qui étaient favorables à la création d’un grand ministère de l’aménagement du territoire. Ce dernier, qui aurait bien entendu reçu les moyens nécessaires, aurait enfin été à la fois cohérent et visible sur le plan politique et comptable, en intégrant les services publics, les transports, les collectivités territoriales, le développement rural, mais aussi – pourquoi pas ? – les PME.

Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez affirmé que les baisses drastiques menaceraient peu la continuité des projets locaux. Je ne doute pas de votre sincérité, mais je vois mal comment il pourrait en aller ainsi.

Comment maintenir, avec la même qualité, la présence publique dans nos territoires malgré une baisse des crédits de 10 % en deux ans ? Comment espérer que la présence postale sera la même ? Comment ne pas craindre un coup d’arrêt aux PER alors que les collectivités territoriales qui les cofinancent sont exsangues et que des maisons médicalisées pourraient être entretenues, demain, via ces pôles ?

Les initiatives territoriales doivent être appuyées. Nous savons tous que les finances publiques se trouvent dans un état catastrophique. C’est vrai d'ailleurs dans tous les pays d’Europe aujourd'hui. Toutefois, la raison d’État n’est pas tout. Monsieur le ministre, on ne peut pas traiter de la même façon certains cadeaux fiscaux improductifs et des initiatives territoriales créatrices d’emplois, d’activité ou de mieux-être pour les populations.

Notre collègue Martial Bourquin préside depuis quelques mois une mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires.

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