D’une manière plus générale, il est frappant de constater que le Gouvernement a placé son projet de budget « santé » pour 2011 sous le signe du renoncement.
Avec une hausse d’à peine 2 % de ses crédits de paiement, il enregistre, en effet, une augmentation très modérée, pour ne pas dire homéopathique. Ce très léger relèvement s’explique par les dépenses consenties par le Gouvernement en faveur de la formation médicale initiale. Votre prédécesseur, madame la secrétaire d’État, a en effet précisé le 2 novembre dernier devant l’Assemblée nationale que le Gouvernement avait décidé cette année d’honorer l’engagement pris au début de l’année 2009 lors du débat sur la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », ou HPST, et de porter à 8 000 le numerus clausus, afin d’augmenter le nombre de futurs spécialistes de médecine générale.
Cette mesure va dans le bon sens ; elle ne saurait toutefois suffire à elle seule. L’augmentation du nombre de places disponibles en médecine générale, en effet, ne garantit pas qu’elles soient in fine toutes occupées. En outre, on constate que trop de diplômés de médecine générale renoncent encore à s’installer en qualité d’omnipraticien.
C’est pourquoi nous considérons que des mesures plus volontaristes s’imposent : rendre par exemple obligatoire pour les jeunes diplômés l’exercice de la médecine de premier recours pendant trois ans pourrait constituer une réponse plus opérante à la situation de pénurie, même si, nous vous l’accordons, ce n’est pas la panacée. Il faudrait également prendre d’urgence des mesures concernant l’installation des médecins. S’arc-bouter sur la préservation de leur liberté d’installation conduit à des aberrations dont les patients sont les premières victimes : ceux qui vivent dans les territoires ruraux ou encore dans les quartiers populaires ont d’ores et déjà difficilement accès à un médecin généraliste.
Par ailleurs, force est de constater que les deux dispositions votées avec la loi HPST concernant la démographie médicale – l’obligation faite aux médecins de prévenir de leur absence et pour les praticiens installés en zone « surdense » de consulter dans les zones « sous-denses » via les contrats solidaires – ne sont plus à l’ordre du jour puisque votre prédécesseur a finalement, compte tenu de leur caractère vexatoire à l’égard du personnel médical, décidé de les suspendre purement et simplement. Dans un tel contexte, on comprend que l’efficacité de la hausse du numerus clausus ne peut qu’être limitée ; c’est le seul levier pourtant que le Gouvernement consent à utiliser.
Cette question lancinante de l’accès aux soins nous conduit à évoquer, pour les déplorer, les dispositions visant à réduire l’accès à l’aide médicale de l’État introduites dans le projet de budget de la santé pour 2011 par l’Assemblée nationale. En la matière, beaucoup de critiques peuvent être apportées ; j’y reviendrai à l’occasion de la défense des amendements de suppression que mon groupe a déposés.
Cette décision est d’autant plus regrettable qu’elle s’accompagne d’une nouvelle réduction des crédits alloués à la prévention. Ceux-ci baissent de presque 5 % pour les crédits de paiement et de 2 % pour les autorisations d’engagement. Alors que les comportements à risque se développent et que des maladies sexuellement transmissibles telles que la syphilis réapparaissent, ces mesures d’économies prises en matière de prévention nous semblent incompréhensibles.
Pour conclure, je regrette la réduction importante des moyens octroyés par l’État à la mise en œuvre de l’action 12 du programme 204. Cette réduction de crédits, il est vrai, n’a rien de surprenant ; elle est la conséquence directe du transfert de cette mission à l’industrie pharmaceutique dans le droit fil de la politique du Gouvernement de privatisation de notre système de santé.
Déjà en 2009, à l’occasion de la lecture de la loi « HPST », un amendement gouvernemental offrant la possibilité aux firmes pharmaceutiques de participer au financement de l’éducation thérapeutique avait été voté. Cette décision anticipait déjà le recul budgétaire que l’on observe aujourd’hui ainsi que le transfert de cette mission de service public vers le secteur commercial.
C’est là une belle opportunité offerte aux entreprises pharmaceutiques qui, au travers de ces actions d’accompagnement, peuvent s’engager dans des opérations lucratives de fidélisation des patients.
Une fois de plus, il faut bien reconnaître que les laboratoires pharmaceutiques sont très réactifs et qu’ils ont su anticiper en faisant évoluer leurs méthodes de communication.
Aussi, vous le comprendrez, en raison de toutes ces carences – dont certaines ont été relevées par M. le rapporteur – le groupe CRC-SPG ne peut que voter contre le budget proposé pour cette mission.