Intervention de Jean Desessard

Réunion du 4 décembre 2010 à 14h30
Loi de finances pour 2011 — Santé

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

… le principe de précaution devrait être également appliqué dans le domaine de la santé, ce qui permettrait d’éviter, à terme, des dépenses plus lourdes.

Il faut agir fortement sur les causes des maladies, qui sont de plus en plus souvent liées à la mauvaise qualité de l’air, de l’eau, de nos aliments, à nos modes de vie.

Mais la prévention fait partie d’une autre approche de la santé, une approche globale, qui mettrait l’accent sur l’éducation en matière de santé, qui s’appuierait sur une médecine du travail indépendante et proposerait une meilleure offre de soins sur l’ensemble du territoire. Manifestement, vous ne souscrivez pas à cette approche, madame la secrétaire d'État.

Après avoir tenté de faire passer un cavalier législatif sur la médecine du travail, censuré par le Conseil Constitutionnel, rien n’arrête le Gouvernement.

La semaine dernière, c’est l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, l’ANACT, chargée de proposer des solutions pour améliorer les conditions de travail et prévenir le stress et les pénibilités, qui a vu son budget diminuer de 10 %. Quel cynisme, alors que votre ministère regroupe désormais santé et travail ! De plus, c’est en contradiction avec les conclusions du rapport d’information sénatorial sur le stress au travail !

Et où en est-on de l’instance de garantie de l’indépendance de l’expertise demandée par le Grenelle 1 ? Le texte évoquait une « instance d’appel en cas d’expertises contradictoires ». Une telle structure aurait eu une utilité certaine dans la gestion de la grippe A/H1N1 et aurait peut-être évité que des conseillers à la solde des grands groupes pharmaceutiques ne se laissent entraîner dans un conflit d’intérêt en surestimant les commandes de vaccin et en entretenant un mensonge d’État.

Un rapport sur l’opportunité de créer cette instance de garantie devait être remis par le Gouvernement au Parlement en août dernier. Or toujours rien ! J’aimerais savoir où nous en sommes, ou, plutôt, j’aimerais savoir où vous en êtes, madame la secrétaire d'État.

Et pendant ce temps, la part des frais de santé augmente dans le budget des ménages, surtout, évidemment, chez les plus modestes et chez ceux qui souffrent de pathologies chroniques.

Par ailleurs, les crédits de personnels ne sont pas abordés dans cette mission, mais une chose est sûre : nos hôpitaux manquent de personnels. Entre les centres IVG qui ferment et l’AP-HP qui subit des réductions drastiques d’infirmiers et de médecins, comment assurer un service public de qualité ?

Au-delà d’un service public de qualité, est-ce trop demander que ce service soit accessible à tous ?

Dans le programme Protection maladie, la majorité présidentielle s’en prend à l’aide médicale de l’État, l’AME, qui bénéficie aux personnes en situation irrégulière vivant en France et dont les revenus ne dépassent pas 634 euros par mois.

Parmi les bénéficiaires de l’AME, les pathologies graves sont surreprésentées, tels les problèmes neurologiques, cardiaques et le VIH.

Comme l’indique M. Jégou dans son rapport, les dépenses d’AME « répondent à un double objectif humanitaire et de santé publique ».

Je précise d’ailleurs que le montant de ces dépenses s’élevait, en 2009, à 540 millions d’euros, ce qui représente moins de 0, 3 % des 160 milliards d’euros de dépenses de la branche maladie de la sécurité sociale.

Chers collègues, comptez-vous sincèrement restreindre l’accès aux soins pour ces personnes qui vivent déjà dans une extrême précarité ?

Vous savez pertinemment, et le rapporteur lui-même l’a souligné, qu’obliger des malades insolvables à payer aurait pour effet de les faire renoncer à ces soins.

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