Je suis convaincu que l’assurance publique conditionne le bon développement des assurances, comme c’est le cas dans bien des pays, notamment en Italie, en Espagne et aux États-Unis.
Certes, nous sommes sur le bon chemin, mais nous risquons de perdre beaucoup de temps. Il nous faut aller plus loin.
Si, aujourd’hui, le projet de loi sécurise les agriculteurs face aux risques climatiques et sanitaires, demain, cette assurance devra être étendue aux risques économiques ; c’est à ce prix que les exploitations agricoles pourront être pérennisées dans leur diversité.
Cela étant, il n’y aura pas de développement important de l’assurance récolte sans réassurance de l’État.
En effet, il est certain que les assureurs ne seront pas en mesure de couvrir les exploitants agricoles contre ces risques, puisque les contraintes prudentielles auxquelles ils sont soumis les en empêchent, sans compter que ces règles seront considérablement renforcées avec l’entrée en vigueur de la directive européenne dite « Solvabilité II ».
Pour la France, en cas d’une couverture complète – j’insiste sur ce terme – des exploitations, le risque maximal serait de l’ordre de 4, 4 milliards d’euros, plus de quatre fois le montant annuel des primes d’assurance ainsi collectées. Les assureurs seront donc dans l’impossibilité de supporter un tel risque, qui mettrait en péril cette assurance et potentiellement leur existence.
Aujourd’hui, le niveau de protection contre ces risques susceptible d’être apporté par la réassurance privée ne dépasse guère 600 millions d’euros.
Si certains réassureurs présents sur le marché français ont pu affirmer que la réassurance privée serait à même de répondre intégralement aux besoins des assureurs, d’autres réassureurs majeurs ont exprimé des avis opposés. C’est le cas de Swiss Re et Munich Re, les deux plus grands réassureurs mondiaux, qui sont par ailleurs les deux plus gros réassureurs agricoles.
Il paraît en effet irréaliste que la France, qui peut être soumise à des aléas climatiques majeurs, ne se dote pas d’un système de réassurance à la hauteur de ses besoins. Pourquoi y aurait-il une exception française en la matière ?
Un mécanisme de réassurance publique est nécessaire. Sans cela, il n’y aura pas de développement de l’assurance multirisque climatique sur les récoltes. À l’instar de la protection contre les attentats et le terrorisme, la Caisse centrale de réassurance interviendrait ainsi en surplus des capacités de réassurance privée, avec la garantie de l’État, pour couvrir les assureurs contre des événements extrêmement coûteux, mais très peu probables. Ce mécanisme ne serait donc pas du tout mobilisé en temps normal.
Par ailleurs, les assureurs paieraient bien entendu le coût de cette réassurance à son tarif habituel. Aucun effet d’aubaine ne sera donc possible.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, la question des assurances constitue l’un des enjeux essentiels de l’agriculture de demain, que le projet de loi se doit de porter.
Monsieur le ministre, nous avons confiance en vous. Vous vous êtes battu, et bien battu, je l’ai déjà dit. Le Président de la République vous a entrouvert la porte sur cette question. Nous sommes derrière vous pour vous aider à entrer !