Comme le Président de la République s’y était engagé, 5 milliards d’euros seront bien affectés à l’opération Campus. Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur, les PRES, seront directement dotés, mais la gestion financière sera probablement centralisée. Ce mode de gestion sera économe, à long terme, des deniers publics, parce que la maintenance des bâtiments est financée sur une durée de vingt-cinq ans.
S’agissant de l’évolution du modèle d’allocation des moyens, le rapport du Sénat a bien entendu été scrupuleusement pris en considération : nous tiendrons davantage compte de la diversité des établissements ; le poids de l’enveloppe dédiée à la licence sera accru ; la situation particulière des universités de taille réduite sera mieux prise en compte, au bénéfice des 10 000 premiers étudiants ; la pondération des étudiants en IUT et en école d’ingénieurs sera relevée ; une enveloppe de 45 millions d’euros sera consacrée à la nouvelle équivalence entre travaux pratiques et travaux dirigés ; il n’y aura pas de redéploiements d’emplois en 2010 entre universités, mais la dotation de chaque université tiendra compte de sa situation du point de vue des emplois.
Cette dernière mesure constitue une vraie réponse à la question de l’efficience posée par certains présidents d’université. Chaque emploi manquant sera compensé à un niveau équivalant au coût moyen d’un emploi de catégorie A, soit 45 000 euros.
MM. Adnot et Plancade ont évoqué les dispositifs de valorisation de la recherche. On connaît notre retard en la matière, qui est sans appel. La recherche contractuelle représente 4, 6 % du budget de la recherche publique, contre 11, 8 % en Allemagne, malgré le doublement du crédit d’impôt recherche. En matière de transferts de technologies, les licences concédées à l’industrie représentent chez nous 1 % du budget des universités, contre 3 % aux États-Unis.
Plusieurs freins expliquent ce retard : le mille-feuille de notre système de recherche – 71 % des brevets publics sont déposés en copropriété –, un financement insuffisant de la phase de maturation, estimé à 0, 1 % du budget de la recherche académique, un manque de professionnalisme des services de valorisation, qui sont trop fragmentés, 50 % d’entre eux comptant moins de trois emplois et demi en équivalents temps plein.
Nos efforts de simplification commencent toutefois à porter leurs fruits. Ainsi, de nouveaux partenariats public-privé ont été signés, et nous allons amplifier ce mouvement. En outre, douze sociétés d’accélération du transfert de technologies sont en cours de création sur les principaux campus universitaires. Elles constitueront des guichets uniques et professionnels pour les chercheurs et les PME. Enfin, les filiales de valorisation des organismes de recherche doivent se mettre au service des alliances et se repositionner sur quatre missions : constituer des portefeuilles de brevets ; développer des activités de veille technologique ; offrir des services de négociation de licences aux structures locales ; augmenter leur capacité de financement de l’amorçage des start-up. Le grand emprunt pourrait être l’occasion de créer un « fonds pour la maturation de projets innovants ».
S’agissant de la simplification des actes de gestion des unités mixtes de recherche, nous progressons vers la généralisation de la délégation globale de gestion. Aujourd’hui, il existe trois systèmes d’information pour les 600 UMR qui ont trois tutelles ou plus. Dès janvier 2010, vingt laboratoires, représentant mille chercheurs en tout, expérimenteront la délégation globale de gestion. Nous les accompagnerons avec des formations, une modernisation de la gestion et une optimisation des systèmes d’information.
Monsieur Adnot, je suis évidemment favorable à une harmonisation fiscale pour la taxe sur les salaires entre organismes et universités. Peut-être les parlementaires pourraient-ils m’aider à convaincre les services de Bercy ?
En ce qui concerne le grand emprunt, je suis évidemment très satisfaite des conclusions de la commission présidée par MM. Juppé et Rocard, même s’il faut encore attendre les arbitrages définitifs du Président de la République.
Nous disposerons en réalité de bien plus que les 16 milliards d’euros annoncés dans la presse : ce sont au moins 25 milliards d’euros sur lesquels la recherche, l’innovation et l’enseignement supérieur peuvent compter.
Tout d’abord, 16 milliards d’euros « non thématiques » seront consacrés à faire émerger des campus d’excellence en matière de formation et de recherche et des campus d’innovation technologique.
Ensuite, la commission a réparti 9 milliards d’euros par grandes thématiques, par exemple les instituts hospitalo-universitaires, le développement des énergies décarbonées, les agro-technologies, les PME innovantes, la mobilité du futur, les villes durables, le numérique.
Au total, ce sont les deux tiers du grand emprunt qui sont susceptibles d’être consacrés à la science et à l’innovation. Ces sommes s’ajouteront au 1, 8 milliard d’euros de progression des trois derniers budgets, aux 730 millions d’euros du plan de relance et aux 5 milliards d’euros du plan Campus.
C’est donc un nouvel âge d’or qui s’ouvre pour la recherche de notre pays. Nous replacerons la France dans le peloton de tête des grands pays de recherche et d’innovation.
Mme Morin-Desailly m’a posé une question plus spécifique sur les instituts hospitalo-universitaires. Nous serons très sélectifs dans ce domaine, comme le propose le professeur Marescaux dans le rapport qu’il m’a remis, afin de faire émerger de cinq à dix instituts de rang mondial autour de pathologies ciblées, de la recherche la plus fondamentale jusqu’aux innovations thérapeutiques. Mais, nous le savons bien, l’excellence est partout et l’INSERM dot continuer à soutenir les meilleures UMR. J’ai eu l’occasion de le rappeler au cours d’un récent déplacement à Bobigny.
J’en viens maintenant aux organismes et à l’ANR. La structuration des organismes en alliances permettra de les décloisonner, notamment lorsqu’il existait des recoupements de compétences entre différents organismes. Ces alliances auront un rôle majeur à jouer dans la future programmation de l’ANR ; la coordination est désormais très étroite entre l’ANR et les alliances, tous les organismes ayant participé à la définition de la stratégie nationale de recherche et d’innovation.
S’agissant du CNES, le sujet de la TVA sur les satellites Pléiades est bien identifié. Le Gouvernement va s’employer à le traiter, monsieur Plancade, sachant qu’il aura une incidence lors de la mise en service de ces satellites, en 2011 et en 2012.
La mission sur la diffusion de la culture scientifique a effectivement été supprimée au sein de mon ministère, mais elle sera mieux assurée par le nouvel acteur né de la fusion de la Cité des sciences et de l’industrie et du Palais de la découverte, qui sera opérationnel au 1er janvier 2010. Comme le recommande la commission du grand emprunt, nous donnerons à ce nouvel opérateur les moyens de fédérer toutes les actions en matière de culture scientifique et technologique.
Le rôle du crédit d’impôt recherche a été évoqué par Mme Blandin et MM. Lagauche, Gaudin et Plancade. Je me suis engagée auprès du Parlement à présenter une évaluation globale du dispositif en 2010, mais, d’ores et déjà, il apparaît que celui-ci a été un amortisseur pendant la crise et sera un tremplin pour l’après-crise. Grâce à lui, en effet, les dépenses de recherche et développement se sont maintenues à 15 milliards d’euros et le nombre d’entreprises déclarantes a très fortement augmenté, de 24 %.
La plupart des entreprises ont accru leurs dépenses de recherche et développement, à l’exception de celles des secteurs de l’automobile et de l’aéronautique, où une baisse de 20 % a été enregistrée. L’ensemble des autres secteurs ont augmenté leurs dépenses, à hauteur de 2 %, cette croissance s’élevant même à 11 % dans le secteur des services de recherche et développement.
Le crédit d’impôt recherche ne profite pas particulièrement au secteur bancaire. M. Carrez, dans son récent rapport sur ce dispositif, critique la montée du secteur « banques et assurances » parmi les bénéficiaires. Cette évolution ne reflète pas un changement particulier, mais résulte d’une modification de traitement statistique : depuis 2008, l’INSEE a changé ses codes de nomenclatures d’activité, faisant passer les holdings de groupes industriels dans la catégorie « secteur bancaire et assurances ». Si l’on retraite les chiffres selon l’ancienne procédure, il apparaît que les holdings de groupes industriels ont récupéré 29, 3 % du crédit d’impôt recherche de 2007, contre 2, 3 % seulement pour le secteur bancaire à proprement parler. Au total, l’essentiel des dépenses liées au CIR concernent des activités industrielles, soit directement, à concurrence de 60 %, soit indirectement à travers des services de recherche et développement fournis à l’industrie.
Quant aux PME, elles sont globalement gagnantes, puisqu’elles bénéficient de 22 % du CIR, alors qu’elles n’effectuent que 14 % des investissements en recherche et développement.
Monsieur Plancade, pour l’heure, le secteur de la recherche a bénéficié d’une mise en réserve allégée. En 2009, les organismes de recherche ont vu leurs moyens gelés à hauteur de 2, 5 % pour les crédits de fonctionnement et de 0, 25 % pour la masse salariale.
Nous sommes actuellement en discussion avec Bercy pour la mise en réserve au titre de 2010 et nous faisons valoir la nécessité de bénéficier d’un traitement équivalent. Nous souhaiterions bien évidemment que le taux soit le même pour les EPIC, mais cette question n’est pas tranchée. Je compte bien entendu sur l’appui du Parlement sur ce sujet !