Intervention de Christian Estrosi

Réunion du 30 novembre 2009 à 10h00
Loi de finances pour 2010 — Recherche et enseignement supérieur

Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie :

Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, Mme Pécresse ayant largement évoqué les questions qui concernent son ministère, je m’efforcerai de répondre sur les aspects industriels de ce projet de budget.

En matière de recherche, notre pays a pris un certain retard sur nos concurrents les plus en pointe, comme les États-Unis ou le Japon, ainsi que sur les objectifs européens fixés à Lisbonne en 2000 : 3 % du PIB consacré à la recherche et développement.

De nouveaux acteurs apparaissent, tels l’Inde, la Chine et les autres pays émergents, qui ne dépensent pas encore autant en recherche et développement privée que nos entreprises, mais progressent rapidement. L’an dernier, la Chine a ainsi augmenté ses dépenses de recherche et développement de 40 % par rapport à 2007, l’Inde de 27, 3 % et Taïwan de 25, 1 %.

Cela étant, cette évolution est non pas une fatalité, mais un formidable défi pour l’action politique !

En France, l’industrie réalise d’ailleurs 85 % de la recherche et développement privée, contrairement à ce que certains d’entre vous ont affirmé. Le secteur industriel doit donc être la priorité de nos efforts. Ces dernières années, nous avons mis en place de nombreux outils.

S’agissant du crédit d’impôt recherche, il a été rappelé à juste titre qu’il avait joué un rôle d’amortisseur face à la crise, puisqu’il a permis le maintien de l’effort de recherche et développement des entreprises, grâce à la mesure de remboursement anticipé qui a été prise en 2009 et sera reconduite en 2010.

Selon des estimations macroéconomiques, l’intensité de la dépense en recherche et développement pourrait croître de 0, 33 point de PIB en dix ans, grâce aux effets de la réforme du crédit d’impôt recherche, ce qui correspond à 25 000 chercheurs supplémentaires, soit 25 % de l’effectif actuel.

En 2010, ce sont 4 milliards d’euros qui ont été consacrés au crédit d’impôt recherche, et nous comptons bien prolonger le dispositif de remboursement immédiat, comme je l’ai déjà annoncé.

Je tiens d’ailleurs à tordre dès maintenant le cou à certaines idées fausses : les PME bénéficient, comme les grandes entreprises, de la croissance du crédit d’impôt recherche. Les entreprises de moins de 250 salariés ont ainsi reçu 22 % du crédit d’impôt recherche, alors qu’elles ne représentent que 14 % des dépenses de recherche et développement déclarées.

Au passage, j’indique que les dépenses de sous-traitance à l’étranger sont bien sûr éligibles au crédit d’impôt recherche pour l’ensemble des territoires de l’Espace économique européen, soit l’Union européenne plus l’Islande, la Norvège et la Suisse. Il n’y a donc aucune pratique discriminatoire en la matière !

Ainsi que vous le souhaitez, messieurs les rapporteurs, une évaluation du crédit d’impôt recherche sera réalisée en 2010 sur la base des déclarations au titre de 2009. L’augmentation du crédit d’impôt recherche ne s’est pas faite au détriment des aides budgétaires aux PME ! Je rappelle que, en 2005, OSEO, qui s’appelait alors l’Agence nationale de valorisation de la recherche, ne bénéficiait que d’une dotation de 80 millions d’euros ; en 2007, elle s’élevait à 170 millions d’euros, et elle sera, en 2010, de 310 millions d’euros, dont 170 millions d’euros sur crédits budgétaires.

D’ailleurs, le programme « Innovation stratégique industrielle », géré par OSEO, est destiné exclusivement aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire innovantes de croissance. J’y reviendrai.

En ce qui concerne les craintes, que l’on peut comprendre, d’un contrôle fiscal, je voudrais rappeler qu’il est désormais possible d’interroger le ministère chargé de la recherche, l’ANR et OSEO Innovation sur le caractère scientifique d’un programme de recherche et développement –c’est la procédure dite du rescrit fiscal –, mais également les services fiscaux sur la prise en compte d’une dépense particulière au sein du crédit d’impôt recherche.

Enfin, il faut définitivement balayer l’argutie selon laquelle le crédit d’impôt recherche profiterait aux banques et au secteur tertiaire. Cette erreur découle d’une lecture trop rapide de la répartition sectorielle du crédit d’impôt recherche. Les derniers chiffres disponibles, pour l’année 2007, montrent clairement que l’industrie reçoit plus de la moitié du crédit d’impôt, les banques en absorbant seulement 2 %.

Au-delà du succès du crédit d’impôt recherche, j’ai proposé, dans le cadre des états généraux de l’industrie que j’ai lancés au début du mois de novembre dernier et qui s’achèveront au début de février 2010, d’étudier la mise en œuvre d’un crédit d’impôt innovation. En effet, comme l’ont souligné un certain nombre d’entre vous, le crédit d’impôt recherche n’accompagne les entreprises que jusqu’au stade du brevet, et celles qui n’ont pas les marges de manœuvre nécessaires s’y arrêtent, sans qu’il y ait d’incidence directe sur la production industrielle. Par conséquent, pouvoir conduire un certain nombre d’entreprises jusqu’au prototype, jusqu’au stade de la production, représenterait un gain à la fois pour elles et pour l’État. Je propose donc que le Sénat participe à la réflexion sur l’évolution de l’accompagnement des entreprises dans ce domaine.

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