Intervention de Jean-Louis Carrère

Réunion du 30 novembre 2009 à 15h00
Loi de finances pour 2010 — Action extérieure de l'état

Photo de Jean-Louis CarrèreJean-Louis Carrère :

Monsieur le ministre, vous venez, comme moi, d’entendre nos rapporteurs, de toutes tendances politiques. Je n’aurai donc pas la cruauté de répéter des analyses qui, si on sait les écouter, accablent ce budget, dont vous êtes d'ailleurs le premier responsable !

Mes collègues socialistes viendront plus tard développer quelques points très symboliques. Pour ma part, je voudrais simplement présenter l’opinion du groupe au nom duquel j’ai l’honneur de m’exprimer sur la politique étrangère et ses moyens.

Pour commencer, monsieur le ministre, je formulerai trois remarques sur les moyens qui vous sont octroyés.

Premièrement, en ce qui concerne la diplomatie dite « culturelle », votre bilan et celui de vos prédécesseurs immédiats est catastrophique. La politique culturelle extérieure de la France souffre et décline depuis 2002.

Cette grave crise du rayonnement culturel français à l’étranger est le symptôme d’une affection bien connue : le libéralisme à tout crin, c’est-à-dire la méfiance à l’égard des acteurs publics, la vénération des agents privés, l’antiétatisme primaire.

Le gouvernement auquel vous appartenez en sait quelque chose : externalisations, privatisations, bouclier fiscal, niches fiscales, dette colossale – je pourrais poursuivre cette énumération – sont les autres caractéristiques de cette pathologie que notre pays supporte, de plus en plus mal, depuis 2002.

Pour autant, puisque vous vous piquez de bonne gouvernance, avez-vous favorisé l’essor de nos industries à l’international, et celui de notre commerce extérieur ? Je crains que tel ne soit pas le cas... Monsieur le ministre, les chiffres sont encore accablants : le déficit du commerce extérieur est aujourd’hui abyssal ; il atteignait 55, 7 milliards d'euros en 2008. Pourtant, c’est aussi cela, la politique étrangère !

Quel échec ! Quelle catastrophe !

Malgré, entre autres, les voyages d’affaires du Président de la République, malgré le tapage médiatique qui l’accompagne dans ses déplacements, malgré la pompeuse war room installée à l’Élysée, malgré, malgré, malgré, notre commerce extérieur ne décolle pas, il plonge !

Deuxièmement, vous êtes l’esclave consentant – pardonnez-moi cette métaphore – de la révision générale des politiques publiques, cette machine à tuer l’emploi et à démanteler les services publics. Votre ministère paie un très lourd tribut au dogme du « moins d’État ».

La RGPP qui, je vous le concède, est appliquée avec brutalité aujourd’hui - et le sera encore demain - au ministère des affaires étrangères et européennes, remet en cause l’universalité du réseau aussi bien que les conditions de travail des personnels. Elle met ainsi en danger, monsieur le ministre, toute perspective de politique étrangère autonome !

Troisièmement, avec ce projet de budget, et malgré les arguties de sa présentation financière, les moyens dont vous disposez pour développer la politique extérieure de la France n’augmentent pas, vous le savez bien.

Certains dogmatiques – j’en ai entendu ! – peuvent s’en féliciter : moins de moyens, moins de personnels, moins d’actions, bref, une politique extérieure rabougrie, condamnée au suivisme, incapable de porter haut et fort la voix et les intérêts de la France.

Tel n’est pas notre cas : nous ne voulons pas nous résigner à un nouveau recul de la France sur le plan extérieur. Voilà pourquoi, monsieur le ministre, j’aborderai maintenant l’aspect politique de votre action.

Nous avons la fâcheuse impression que la politique étrangère, confuse et chaotique, est conçue et conduite depuis l’Élysée. Mais peut-être nous trompons-nous ?

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